Ce témoignage remonte à l'année 1963 ! Donc pour les jeunes médecins, à l'Antiquité… Je faisais alors mon service militaire à Orléans. J'ai effectué le remplacement d'un médecin qui exerçait aux confins de la forêt briarde. J'avais rencontré une fois ce médecin et j'ai commencé mon remplacement sans l'avoir revu.
Mon premier patient est venu pour une fluxion dentaire et exigeait que je lui arrache la dent malade. La servante du médecin m'a apporté une boîte de daviers et une seringue qu'elle venait de faire bouillir dans une casserole. Je me trouvais dans l'état d'une poule qui a couvé des canards. Dans les jours suivants, j'ai dû réduire une fracture de Pouteau Colle dans une ferme. L'époque des moissons commençait et le fermier refusait catégoriquement de se rendre à l'hôpital.
Un peu plus tard, j'ai dû me rendre dans une maison en pleine forêt pour un accouchement. On est venu me chercher en lisière du bois avec une lanterne, car sans cela je n'aurais jamais pu trouver la chaumière où vivait la parturiente.
Des patients méfiants
Dans les jours qui ont suivi, j'ai diagnostiqué une cholécystite aiguë et une grossesse extra-utérine. Dans les deux cas, les patientes ont refusé l'hospitalisation et consulté un autre médecin de la région car elles ne faisaient pas confiance au jeune remplaçant que j'étais. Avec du recul, je ne leur donne pas tort.
Enfin, vers la fin de ma semaine de remplacement, une femme étrange est venue me demander de renouveler une ordonnance de dix boîtes d'aspirine ! J'ai appris par la suite que c'était la guérisseuse du canton et qu'elle incorporait de l'aspirine dans les pilules de sa fabrication. La sécurité sociale remboursait l'aspirine, les patients trouvaient un soulagement à leurs douleurs et tout le bénéfice était pour elle.
De retour à ma vie militaire, j'ai décidé qu'à la fin de mon service obligatoire je ferai une spécialité, me sentant incapable de parcourir efficacement le champ des connaissances qu'exige la pratique de la médecine générale.
Mon témoignage est un hommage que je rends à mes courageux confrères généralistes.
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