Formation, législation et nouveaux traitements
Cette décennie a été déterminante de par les conséquences et développements secondaires aux plans successifs de lutte contre la douleur. Sur le plan de la formation universitaire, 2007 a vu la création du DESC (Diplôme d'Etudes Spécialisées Complémentaire) de médecine de la douleur et médecine palliative. Autre événement marquant, en 2007 aussi, mais dans le domaine médicojuridique : la condamnation, par la cour d’appel de Bordeaux, d’un établissement de santé pour non-prise en charge de la douleur, jugement qui fera jurisprudence.
Le domaine thérapeutique a bénéficié de véritables révolutions. Ainsi, la prise en charge des douleurs paroxystiques des cancers par des produits opiacés d’action extrêmement rapide, sous forme de spray nasal, ou de comprimé gingivo-jugal. Pour les douleurs chroniques bénignes et malignes rebelles, les centres spécialisés de la douleur peuvent recourir à un produit non opioïde, le ziconotide, administré par voie sous-arachnoïdienne. En prévention, le vaccin Zostavax®, destiné aux patients âgés, les protège à 60 % du zona ; en cas de survenue de l’infection, la moitié des patients vaccinés ne souffriront pas de douleur post-zoostérienne. Enfin, toujours dans les douleurs de zona, un traitement anesthésique local efficace peut être proposé aujourd’hui (emplâtre de lidocaïne à 5 %).
Douleur neuropathique
Autre avancée majeure, d’ordre diagnostique : le dépistage de la douleur neuropathique (« douleurs chroniques post-opératoires»), souvent difficile à identifier. Le diagnostic se fait désormais de manière fiable et rapide, en moins d’une minute, grâce au DN4. Ce test inclus 10 items reposant sur l’interrogatoire et l’examen clinique ; un score de 4 points sur 10 permet d’affirmer la douleur neuropathique et de prescrire un traitement spécifique.
Enfin, dernier point, d’ordre sociétal : les changements de comportement des patients et des médecins. La prise en charge pluridisciplinaire des douleurs chroniques rebelles, aux vastes conséquences professionnelles, sociales et familiales, est faite sur un modèle biopsychosocial.
Toujours sous estimés …
Les douleurs induites par les soins, actes diagnostiques et thérapeutiques constituent une part non négligeable des douleurs qui, malgré les moyens et les recommandations, ne sont pas prises en charge. La douleur du sujet âgé est sous-estimée ou mésestimée. La prise en charge de la douleur dans les établissements de santé mentale n’est pas suffisamment prise en compte, alors qu’il s’y trouve autant de patients souffrant de céphalées et de lombalgies qu’à
l’extérieur, et davantage de cas de stomatite et gingivite : ces patients sont souvent sous neuroleptiques et psychotropes, qui assèchent la cavité buccale. Tout n’est pas fait, ni parfait, loin s’en faut…
?L’essentiel pour Alain Serrié
Président-fondateur de Douleurs sans frontières
Unité fonctionnelle douleur, hôpital Lariboisière, Paris
Les avancées majeures :
2006 Annonce du plan gouvernemental quadriennal
(2006-2010) de lutte contre la douleur
2007 Création du DESC de médecine de la douleur
et médecine palliative.
2007 Condamnation d’un établissement de santé pour non-prise
en charge de la douleur.
Objectif 2020
« Les structures de prise en charge de la douleur sont des structures transversales dans les établissements de santé ; on en compte seulement 233 sur 3300 établissements, financées par les missions d’intérêt
général. Il faudrait veiller à ce que le financement attribué à la médecine de la douleur arrive bien à destination et ne soit pas utilisé pour combler le trou financier de l’établissement, comme cela
a été le cas depuis sa création cette dernière décennie…. »
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Avancées réelles, vigilance accrue
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Des évolutions sans révolution
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La métamorphose du regard
Une décennie palpitante
Du « rien à faire » au « c’est possible »
Un bilan en demi-teinte
Une révolution tous azimuts
Dix ans de progrès constants
La révolution culturelle
La décennie de l’espoir
Du combat politique aux progrès cliniques
Des bouleversements inattendus
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