?Le grêle sort de l'ombre
Les progrès de l'endoscopie digestive des dix dernières années ont largement contribué à l'amélioration des procédures diagnostiques, sans oublier la dimension thérapeutique. « Progrès grâce auxquels l'intestin grêle n'est plus la boîte noire qu'il était, explique le Pr Marc-André Bigard (service d'Hépato-Gastro-Entérologie, CHU de Nancy Vandoeuvre lès Nancy). A cet égard, la vidéocapsule endoscopique a fait la preuve de son efficacité dans le diagnostic étiologique des hémorragies digestives ou des anémies hypochromes inexpliquées. Par ailleurs, la mise au point d'endoscopes à ballon, simple ou double, permet d'explorer le grêle avec précision (saignements digestifs, MICI) et d'effectuer certains gestes thérapeutiques. »
C'est encore à l'intestin grêle qu'ont profité dans une large mesure les progrès de l'imagerie. L'amélioration de la qualité des images avec le scanner à barrettes (entéroscanner) est incontestable. L'entéro-IRM, indiquée, quant à elle, dans le diagnostic des lésions tumorales ainsi qu'au cours de la maladie de Crohn, présente un avantage majeur : elle expose à des taux d'irradiation beaucoup plus faibles que l'examen scannographique. «?Un scanner abdomino-thoracique équivaut en terme d'irradiation à 500-1000 radiographies pulmonaires, et l'on estime que l'accumulation de
6 scanners au cours de la vie augmente d'environ 7 % le risque de cancers (toutes localisations). Or, il n'est pas rare qu'un patient atteint de maladie de Crohn cumule une dizaine de scanners en dix ans. »
Explorations non invasives
Impossible de ne pas insister sur le progrès majeur que représente l'organisation du dépistage du cancer colorectal, généralisé depuis 2008 à l'ensemble du territoire. « La France est le seul pays au monde à avoir mis en place un tel dispositif. Mais le taux de participation, 41 % en moyenne, est très insuffisant. Les travaux portent actuellement sur l'éventuel remplacement de l'Hémoccult® par des tests immunologiques, lesquels n'ont pour l'instant pas suffisamment fait leurs preuves. »
La coloscopie virtuelle obtient de bons résultats, sous réserve d'une excellente préparation colique. Mais cet examen est parfois mal accepté par les patients, car le côlon doit être bien distendu au préalable (air ou eau). « La place de la coloscopie virtuelle reste à préciser. Elle est intéressante notamment chez les sujets fragiles chez qui la coloscopie est récusée, ou bien lorsque l'anesthésie générale est refusée ou risquée. »
La vidéocapsule colique est en voie de développement. Là aussi, une très bonne préparation colique est nécessaire.
Les méthodes non invasives d’appréciation de la fibrose hépatique, basées sur la recherche de marqueurs sériques (Fibrotest®) et sur l'élastographie (Fibroscan®), sont validées dans l'hépatite C. « Ces deux examens permettent d'éviter la ponction biopsie hépatique dans 80 % des cas. »
Au plan thérapeutique
La mise au point de la bithérapie pégylée – association d'interféron pégylé et de ribavirine – a profondément modifié la prise en charge de l'hépatite C chronique : meilleure tolérance au traitement, meilleure observance (une seule injection/ semaine) et 50 % de guérison.
Les anticorps monoclonaux (anti-TNF) – adalimumab dans la maladie de Crohn, infliximab dans la maladie de Crohn et dans la RCH – ont permis d'obtenir des résultats spectaculaires sur les symptômes associés aux MICI.
Dans le domaine de la cancérologie, le grand progrès vient surtout de la mise en place des réunions de concertation pluridisciplinaire qui permettent aux patients de bénéficier d'une prise en charge de meilleure qualité. Les biothérapies ciblées – bévacizumab, cétuximab, panitumumab – ont permis d'augmenter de 4 à 5 mois la durée de vie médiane en cas de cancer colorectal métastatique, avec une bonne qualité de vie. Sans oublier le développement de la cœliochirurgie dans le cancer colorectal. Enfin, s'agissant des traitements endoscopiques, l'utilisation du plasma-argon permet de s'attaquer aux lésions vasculaires du tube digestif : angiomes, angiodysplasie, ainsi qu'aux rectites radiques. Autre avancée : la destruction endoscopique de la muqueuse dysplasique des endobrachyœsophages par radio-fréquence.
?L’essentiel pour Marc-André Bigard
CHU de Nancy,
Vandœuvre-les-Nancy
Les avancées majeures :
2008. Généralisation du dépistage du cancer colo-rectal à l’échelon du territoire.
Objectif 2020
« La détection des anomalies du DNA dans les selles permettrait le dépistage de l’ensemble des cancers du tube digestif, des voies biliaires et du pancréas. »
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