Insulinothérapie fonctionnelle : des « résistances »
Dix ans après, équipes hospitalières et diabétologues n’adhèrent pas tous au concept de l’insulinothérapie fonctionnelle. « Un développement timoré pour un progrès formidable, qui devrait s’imposer comme l’approche unique et s’appliquer, à de rares exceptions près, à tous les diabétiques de type 1 (DT1). » Comme il ne devrait d’ailleurs plus exister à ce jour qu’un seul schéma de traitement : le « basal bolus » tout analogue. Principe : un, voire deux analogues insuliniques lents quotidiens pour la basale associés à des analogues rapides à chaque ingestion glucidique, ou le traitement par pompe avec analogue rapide. Il mime la physiologie de l’insulino-sécrétion, que l’on distingue entre sécrétion insulinique basale et sécrétion prandiale lors de toute ingestion glucidique, au prorata de la quantité de glucides. C’est le pré-
requis indispensable à la réalisation de l’insulinothérapie fonctionnelle.
Cette dernière requiert une éducation intensive, au sein d’équipes spécialisées pluridisciplinaires ; trop peu la proposent, d’où l’idée de pôles départementaux référents dans des régions sinistrées. Enfin, les avancées de la télémédecine, tel l’outil DIABEO* dont les résultats satisfaisants ont été publiés à la mi-2009, permettront aux DT1 de mieux gérer leur insulinothérapie fonctionnelle. La généralisation de la télémédecine, à court ou moyen terme, dépendra des crédits alloués, promis par le ministère de la Santé… et de la résistance au changement !
« Avec l’avènement rapide (quelques années) des patch-pompes à insuline, on peut rêver de l’association patch pompe-capteur de glucose-système télématique, le tout sous la surveillance du médecin. L’avenir dans le DT1, c’est certain. »
Diabète de type 2 : le grand gagnant
Avec les glitazones, les inhibiteurs des DPPIV/ gliptines, les analogues du GLP1 injectables, sans oublier l’évolution extraordinaire de l’insuline et du schéma basal, le diabète de type 2 (DT2) a connu un enrichissement considérable des thérapeutiques. L’avènement du schéma basal marque un tournant ; toute une génération de généralistes est désormais formée à son maniement. Les spécialistes ont d’ores et déjà commencé à jongler avec les polychimiothérapies, non encore codifiées : « Est-ce d’ailleurs souhaitable d’enfermer les algorithmes thérapeutiques dans un carcan ? D’autant plus que le DT2 va progressivement se démembrer en différents profils-patients, des sous-catégories de diabète vraisemblablement ».
ACCORD secoue la profession
2008 et 2009 ont été des années riches en publications internationales (UKPDS follow-up, ADVANCE, VADT, POST Steno2...). Volontairement provocateur, le Dr Guillaume Charpentier retient l’étude ACCORD**.
Lorsqu’on abaisse, par des stratégies intensifiées et complexes, l’HbA1c de diabétiques de plus de 60 ans à haut risque cardiovasculaire à 6 % comparativement au groupe témoin demeuré à 7,4 %, l’étude en prouve le bénéfice sur le plan cardiovasculaire, avec 24 % en moins d’IDM non mortels, - mais 22 % de décès en plus (d'où l’interruption prématurée de l’étude), provoqués par une stratégie d’escalade acharnée sans possibilité de retour en arrière tant qu’il n’y avait pas d’hypoglycémie sévère. « Ce bénéfice cardiovasculaire a été occulté par les décès causés par des hypoglycémies sévères, dramatiques en cas d’insuffisance coronaire. Mais il est net ; l’objectif d’une HbA1c à 6,5% vaut pour tous … à la condition de veiller aux hypoglycémies.»
?L’essentiel pour Guillaume Charpentier
Médecine interne-endocrinologie,
CH Sud Francilien, Corbeil-Essonne
Objectif 2020:Une prévention ciblée vers les enfants de diabétiques. Si le DT1 est auto-immun, le DT2 est héréditaire, avec une trentaine de gènes de prédisposition identifiés. Le risque de devenir diabétique pour l’enfant dont l’un des parents l’est oscille entre 15 et 25 %. D’où l’idée d’un dépistage (avec l’outil génétique) ciblée vers les enfants jeunes (fonction pancréatique intacte, corps mince, glycémies normales) et d’une prise en charge de ceux réellement à risque parmi les enfants de parents diabétiques.
**The Action to Control Cardiovascular Risk in Diabètes study group. Effects of intensive glucose lowering in type 2 diabètes.
N Engl J Med 2008 ; 358 : 254559.
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