Depuis leur mise sur le marché, les organismes génétiquement modifiés suscitent controverses et a priori. Les OGM sont-ils toxiques ? Sans aucun doute pour le Pr Gilles-Eric Seralini (professeur de biologie moléculaire, université de Caen), auteur d’un article publié dans la revue Food and Chemical Toxicology du 11 septembre 2012 concernant l'alimentation de rats avec le maïs OGM NK 603, un produit déjà commercialisé pour le bétail dans 12 pays. Ce travail suggère une toxicité hépatique et rénale, une augmentation des tumeurs mammaires et des morts prématurés, en rapport avec les OGM testés avec ou sans pesticide.
Sur le coup, cette étude a forcément ébranlé la communauté scientifique et le monde politique, semblant porter le coup de grâce aux OGM. Marisol Touraine a aussitôt réagi : « Les conclusions de cette étude (…) font l'objet d'une saisine immédiate de l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire (Anses). Elles seront aussi analysées par le Haut Conseil des Biotechnologies?».
Mais depuis, ce travail a prêté le flanc à de nombreuses critiques concernant notamment sa méthodologie (effectif insuffisant, choix du modèle expérimental de rats susceptibles de développer spontanément des tumeurs). La façon de présenter les résultats a également été pointée du doigt par la prestigieuse revue Nature. Le Pr Seralini a aussi été très critiqué sur l’interprétation des résultats, notamment sur le lien de causalité entre OGM et les constatations expérimentales. Même l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) s’en est mêlée : « L’article est d'une qualité scientifique insuffisante pour être retenue pour l'évaluation des risques?», a jugé l’agence qui a demandé aux auteurs de fournir davantage d'informations sous peine de rejeter leur étude. Une demande restée jusqu’à présent lettre morte, le Pr Séralini se refusant à fournir des données supplémentaires. « Une seconde analyse, plus complète, sera publiée d'ici la fin de ce mois », a précisé l'EFSA. À cette date sera aussi publié le rapport, très attendu, de l’Anses. En fonction de cet avis, le gouvernement français demandera aux autorités européennes « de prendre toutes les mesures nécessaires en termes de protection de la santé humaine et animale, mesures qui pourront aller jusqu'à suspendre en urgence l'autorisation d'importation dans l'UE du maïs NK 603, dans l'attente d'un réexamen de ce produit sur la base de méthodes d'évaluation renforcées. »
Plus de transparence
Cette tempête médiatique a eu au moins le mérite de remettre sur la table les questions de l’évaluation des OGM. La durée des évaluations demandées aux industriels et l’impartialité sont en effet matière à discussion, ainsi que la transparence sur la communication des résultats. Ainsi, le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll a estimé qu'il était nécessaire de revoir le protocole d'autorisation des OGM à l'échelle européenne, que l'étude soit validée ou non par les scientifiques. Rappelons qu’en France, en vertu du principe de précaution, la culture OGM est soumise à un moratoire.
Article précédent
Des contre-indications qui font consensus
Article suivant
Le jeûne, une fausse bonne idée
Une aura justifiée ?
Le cercle vicieux
Vers des allégations santé plus fiables
Une recherche active
Des contre-indications qui font consensus
Tempête sur les OGM
Le jeûne, une fausse bonne idée
Le BMJ se met à table
Le statu quo
Trois questions au Dr Monique Ferry*
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature