État de choc

Publié le 04/01/2014
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C’était au début des années 70. J’avais 25 ans, préparant ma thèse, mais remplaçant déjà « régulièrement » un médecin débordé d’un quartier populaire de Paris. Le soir du réveillon de Noël, alors que ma journée de travail se terminait, un appel téléphonique.

Une dame, voisine d’une « malade », m’informait que cette dernière, qui venait de perdre son mari, déprimait et n’allait pas bien…

Alors, dans ma tête qui n’avait pas encore eu à analyser toutes ces difficultés qui, durant les dizaines d’années plus tard, allaient quotidiennement m’apprendre ce métier si complexe – la médecine générale – je me mets à imaginer : une veuve, sans doute récente, allait passer pour la première fois un réveillon de Noël sans son époux, et cette belle fête de famille allait devenir pour la première fois un triste moment. J’allais parler avec elle, l’écouter, peut-être lui donner un calmant, éventuellement en IM pour être plus crédible... Je vérifiais rapidement ma trousse au cas où...

Arrivé sur place, la très grande surprise. Certes, elle était bien veuve mais, malheureusement, c’est en rentrant du travail quelques minutes plus tôt (à cette époque la plupart des jours de réveillon étaient des jours de travail « ordinaires » et peu de gens prenaient des vacances la semaine de Noël), elle avait découvert son mari suicidé !

Les secours (pompiers-police, pas de SAMU alors) avaient constaté le décès et installé le défunt sur le lit conjugal en laissant seule l’épouse. Elle était plus en état de choc qu’en syndrome dépressif constitué, et j’avoue avoir improvisé dans la plus grande bonne volonté de médecin débutant mon attitude.

> Dr M. G.

Source : lequotidiendumedecin.fr