Gilles Johanet*:

« Une opportunité pour le transfert des compétences ! »

Publié le 19/03/2010
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En matière de démographie médicale, Gilles Johanet n’a rien perdu du malthusianisme qui le caractérisait du temps où il était directeur général de la Cnamts. Huit ans après son départ de la Sécu, il n’a pas non plus renoncé à prendre le contre pied des idées admises. Pour lui la baisse attendue des effectifs de généralistes est ainsi « une opportunité historique ». Et, loin d’être une catastrophe, le passage de 55 000 à 35 000 généralistes dans les dix ans serait le moment idéal pour organiser de vrais transferts de compétence avec les paramédicaux. « Dans le domaine de la santé, nous vivons depuis des décennies sur une gestion extensive de la ressource, qui confine au gaspillage concernant la démographie. Saisissons cette occasion unique pour changer de paradigme ! »

Gilles Johanet est persuadé de proposer là une opération gagnant-gagnant. Pour la collectivité, d‘abord, qui pourrait réaliser à coût constant un transfert « impossible à réaliser avec 55 000 praticiens ». Pour les généralistes, ensuite qui gagneraient à recentrer leur activité. «Ils ont un handicap par rapport aux autres spécialités, ils n’ont pas de nomenclature. Or, à partir du moment où on rémunère de la même façon la piqûre et le bilan clinique, comment voulez-vous payer correctement les actes à forte valeur ajoutée ? »

L’ancien patron de la Sécu juge inquiétante la désaffection des jeunes pour la médecine libérale et très révélatrice les réticences à confier la récente campagne de vaccination aux généralistes : « on quand même est le seul pays du monde, où l’on envisage la vaccination à 22 euros. C’est un schéma perdant-perdant », martèle-t-il ! Le généraliste qui est le seul en Europe à avoir un périmètre aussi large d’intervention aurait donc intérêt à déléguer définitivement tout un pan de son activité aux paramédicaux. Ceux-ci seront-ils assez nombreux pour relever le défi ? Gilles Johanet veut le croire. On manque d’infirmières libérales ? Pas si sûr : sur 450 000 actuellement, 400 000 travaillent dans les hôpitaux. Dans 15 ans, il n’est pas dit, parie-t-il, que l’hôpital restera le maillon fort du système de soins.

* Conseiller maître à la Cour des Comptes

Source : lequotidiendumedecin.fr