Le généraliste. Comment est né ce premier congrès européen de pathologies environnementales qui s’ouvre ce vendredi ?
Dr Jean-Luc Martinez. « En réalité nous avions déjà organisé un congrès similaire, mais à l’échelle nationale, en 2005. Il était parti d’un constat de pathologies sanitaires qui nous avait été transmis, il y a neuf ans, par un élu généraliste de notre Union, déjà féru des questions de santé-environnement, le Dr Joël Spiroux. Nous nous y sommes intéressés et avions à l’époque créé la première commission régionale santé environnement. Puis au fur et à mesure des travaux, nous avons réussi à faire ce premier congrès de 2005. Et aujourd’hui ce congrès européen.
Quelles étaient à l’époque, les données qui vous avaient fait réagir?
Dr J.-L. M. Je vais vous citer trois exemples qu’ont mis en évidence l’interrogatoire médical des praticiens. La plus grande fréquence des cancers de la vessie chez les gens qui travaillent dans le milieu du ramonage et les chauffagistes, liée à la suie, tout simplement, auxgoudrons. Deuxièmement, la plus grande fréquence des cancers ORL chez les utilisateurs de bois, qui en inhalent la poussière, et troisièmement la plus grande fréquence des cancers thyroïdiens depuis l’affaire Tchernobyl. Ce sont des constatations de terrain, ce n’est pas du rêve.
Comment passe-t-on d’un congrès national à un congrès à l’échelle européenne ?
Dr J.-L. M.Lorsque j’ai été réélu président, il y a trois ans, c’est quelque chose que j’ai d’emblée proposé parce que je ne voulais que l’on reste dans un cadre franco-français. Je voulais qu’on soit crédible scientifiquement, et pour l’être, il faut échanger avec les autres. Et les pays les plus proches sont ceux de l’Union européenne. Nous pourrons ainsi voir s’ils ont les mêmes problématiques et les mêmes pistes de réflexions que nous. Et surtout, voir si l’on ne pouvait pas développer, pourquoi pas, une vision des problèmes plus collective.
N’est-ce pas quelque peu utopique ?
Dr J.-L. M. L’intérêt de ces échanges est justement de sensibiliser nos confrères européens à l’importance de positions communes. Nous avons été surpris par l’abondance extrême des publications, mais dans le même temps, il n’existe rien qui relie les unes aux autres. C’est cela notre ambition : obtenir des résultats suffisamment regroupables pour qu’on puisse éventuellement peser sur certaines décisions à notre échelle européenne. Je prends l’exemple des pesticides : si on interdit un pesticide en France et qu’il est autorisé dans tous les autres pays de l’Union, cela n’a aucun intérêt. Enfin, je pense que deux thèmes soulèveront davantage le débat : les ondes électro-magnétiques et les nanotechnologies. Il y a beaucoup de polémiques sur ces sujets-là.
Mais, la majorité des généralistes est-elle véritablement intéressée par ces sujets ?
Dr J.-L. M. Réellement intéressés ? Ils le sont tous. Mais s’impliquant activement, il y en a peu, il faut le reconnaître. Mais je relève que de plus en plus de confrères commencent à intégrer la notion de santé environnementale dans l’interrogatoire médical et dans leur exercice quotidien. Et il ne s’agit pas d’une vague écolo-bobo, qui est d’ailleurs justement l’image que l’on ne veut pas donner. C’est pour cela que ce congrès est réservé aux professionnels. Avec des données exclusivement scientifiques, qui ne sont pas des idées en l’air. Notre travail à nous, c’est l’alerte sérieuse sur des bases scientifiques solides, mais ensuite c’est au politique de décider.
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