Le Dr Ugo Ricci, généticien criminologue, passionne l’Italie

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Publié le 13/06/2025
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Le Dr Ugo Ricci, généticien criminologue, est devenu une référence en Italie pour avoir réussi à trouver de nouvelles traces d’ADN incompatibles avec celles d’Alberto Stasi, condamné à 16 ans de prison ferme il y a 11 ans pour le meurtre de sa fiancée. Les conclusions de cet expert ont permis aux avocats du condamné d’obtenir la réouverture du dossier sur un meurtre commis il y a 18 ans.

Crédit photo : PHANIE

Dans les séries américaines, les enquêteurs sont toujours accroupis à la recherche d’un cheveu, d’une petite tache de sang, d’un morceau de tissu voire d’un mégot de cigarette qui permettrait d’identifier le vrai coupable grâce à l’analyse ADN. Utilisée en criminologie depuis les années 1980 après la découverte des empreintes génétiques par Sir Alec Jeffreys, cette méthode d’analyse a déjà permis de résoudre de nombreuses affaires criminelles. Et en Italie, elle pourrait peut-être réparer ce qui prend les contours d’une possible erreur judiciaire grâce au travail de fourmi du Dr Ugo Ricci, un généticien criminologue renommé.

Scène de crime polluée

Retour en arrière. Le 13 août 2007, Alberto Stasi, un étudiant en économie âgé de 21 ans au futur prometteur, découvre le cadavre de sa fiancée. La scène du crime est rapidement polluée, d’abord par le chat de la victime qui se balade dans toute la maison puis par la police scientifique et les carabiniers qui n’endossent pas de combinaison de protection, de masque, de gants ni de chaussons. Acquitté en première instance puis en appel, Alberto Stasi est finalement condamné à 16 ans de prison ferme, la Cour de Cassation ayant annulé le verdict en raison de multiples incongruences et ordonné que l’affaire soit rejugée.

En 2023, les avocats de l’Italien qui purge sa peine depuis 12 ans sans avoir jamais cessé de se proclamer innocent, saisissent la Cour des droits de l’homme pour obtenir l’annulation du dernier procès. Déboutée, la défense d’Alberto Stasi qui refuse de rendre les armes, décide de tout recommencer depuis le début.

Et c’est là que le Dr Ugo Ricci entre en scène. Avant de rejoindre l’équipe qui travaille à obtenir la révision du procès, ce spécialiste des scènes de crime a participé à la résolution de plusieurs affaires criminelles qui ont défrayé la chronique judiciaire italienne comme entre autres, celle du Monstre de Florence, le premier tueur en série de l'Italie contemporaine ou encore le meurtre de Meredith Kercher, également assassinée en 2007.

Ce généticien pourrait bien réussir à accrocher un nouveau trophée à son tableau de chasse après avoir analysé les traces d’ADN prélevées sous les ongles de la victime et confronté les résultats avec le profil génétique d’un certain Andrea Sempio. En 2016, cet ami du frère de la victime avait été déjà mis en examen dans le cadre d’un nouveau rebondissement de l’enquête. Mais faute d’éléments concrets, le procureur avait opté pour le classement sans suite.

Génétique et petits meurtres

Mais les conclusions du Dr Ricci ont permis d’exclure la présence de toute trace d’ADN d’Alberto Stasi sous les ongles de la victime, un élément crucial dans l’enquête. Or, ce constat ne s’applique pas à Andrea Sempio, dont le profil génétique a bel et bien été identifié, relançant ainsi les soupçons autour de sa possible implication dans ce meurtre. C’est ce qui a permis aux avocats d’Alberto Stasi d’obtenir la réouverture du dossier par un nouveau parquet.

Le Dr Ricci est désormais en passe de devenir une star grâce à la médiatisation de ce nouveau volet dans une affaire aux multiples rebondissements. La carrière de ce spécialiste, aujourd’hui âgé de 62 ans, a commencé à Florence en 1994 lorsqu’il décroche son diplôme de biologie après avoir soutenu sa thèse. Le futur consultant des tribunaux et des parquets italiens décide alors de se spécialiser en génétique médico-légale. En 1999, le Dr Ricci est recruté à Florence par le centre hospitalier universitaire et travaille en parallèle, comme conseiller en génétique pour le tribunal et le parquet. Engagé en 2009 par la région Toscane, il est transféré au centre hospitalier universitaire Careggi qui vient de créer un département de génétique forensique (c’est-à-dire utilisée pour éclairer une affaire judiciaire) qu’il dirige aujourd’hui et qui est considéré comme une excellence à l’échelle nationale.

Dans deux mois, la police scientifique qui reconstitue la scène du crime en 3D à l’aide de drone, scanner et laser, rendra ses conclusions qui s’ajouteront à celle du Dr Ricci. En attendant, toute l’Italie suit l’affaire de près, notamment en ce qui concerne la participation du Dr Ricci qui pourrait susciter de nouvelles vocations.

De notre correspondante en Italie Ariel F. Dumont

Source : lequotidiendumedecin.fr