Alors que la téléconsultation se développait très lentement malgré la signature en septembre 2018 de l’avenant 6, coup d'envoi national au remboursement de la pratique dans le cadre du droit commun, le confinement a convaincu les médecins de ville au-delà des espérances.
Pour preuve, 3 000 médecins téléconsultants facturaient 40 000 actes seulement en février dernier. Ce chiffre a été multiplié par 30 entre février et mars pour dépasser le million d'actes et par quatre entre mars et avril, atteignant 4,5 millions d'actes. Au total, la CNAM a comptabilisé 5,8 millions de téléconsultations remboursées entre le 15 septembre 2018 et le 30 avril 2020 (dont 96 % assurées par les médecins libéraux, 2 % par les centres de santé et 2 % par l'hôpital). À la manœuvre : 36 000 médecins conquis en mars et 56 000 en avril, selon un bilan présenté le 10 juin par l'assurance-maladie en commission paritaire nationale. Inespérés, ces résultats dépassent largement l’objectif fixé par la CNAM d’un million d’actes remboursés en 2020.
Qui sont ces médecins libéraux téléconsultants ? Ce sont à 82 % des généralistes et des médecins à exercice particulier (MEP) et, dans une moindre mesure, des psychiatres (6,4 %), des pédiatres (2 %), des gynécologues (1,3 %) et des dermatologues (1,1 %). Un cinquième des actes facturés provient d'Île-de-France (1 096 205 actes), loin devant l’Auvergne-Rhône-Alpes (741 427 actes), l’Occitanie (560 528 actes) et la Nouvelle-Aquitaine (541 297).
Sans surprise, cette pratique médicale à distance semble séduire d’abord les plus jeunes. Plus de la moitié des téléconsultants ont moins de 50 ans alors que cette classe d’âge ne constitue que 37 % de l’ensemble des effectifs de généralistes libéraux. À l’inverse, les praticiens ayant plus de 60 ans prescrivent moins que leurs confrères. Mais, selon la CNAM, cet écart « tend à se réduire ». Quoi qu’il en soit, les médecins proposent la téléconsultation aussi bien aux jeunes (un patient sur cinq a moins de 30 ans) qu’aux personnes âgées (un patient sur cinq a plus de 70 ans).
Nouvelles dérogations ?
L’engouement va-t-il perdurer ? Pendant la crise, l'assurance-maladie a autorisé les médecins à recourir à la téléconsultation sans connaître préalablement le patient et en dérogeant aux règles du parcours de soins pour les malades infectés par le Covid-19 ou susceptibles de l’être. Les professionnels ont également pu utiliser des outils peu sécurisés comme WhatsApp, FaceTime, Skype, Teams, Zoom, voire le téléphone dans certains cas. Alors qu'avec le déconfinement, la CNAM a déjà constaté une baisse d'un tiers du nombre des téléconsultations au mois de mai, ces mesures exceptionnelles seront-elles prolongées ?
L’assurance-maladie rappelle d’ores et déjà que l’avenant 8 à la convention médicale, signé en mars 2020, prévoit des dérogations à certains principes comme la connaissance préalable du patient et l'obligation d’une consultation en présentiel une fois par an avant de réaliser la téléconsultation, en particulier pour certaines spécialités pour lesquelles l’accès aux soins est entravé (filière visuelle) ou pour d'autre (filière psychiatrique) pour qui la téléconsultation peut constituer une manière d’entrer dans le parcours de soins.
Dans cette optique, deux projets d'expérimentations de téléconsultation en ophtalmologie (porté par Point Vision et la direction régionale du service du contrôle médical des Hauts-de-France) et en psychiatrie (porté par Doctopsy) seront présentés à la prochaine CPN, en septembre. Reste à savoir si ces petits pas conventionnels suffiront pour conserver la dynamique enclenchée par la crise sanitaire.
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