Sur des infections respiratoires virales

Encore trop d’antibiotiques

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Publié le 01/12/2020
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Les prescriptions d’antibiotiques chez les enfants sont encore trop fréquentes en ville et peuvent entraîner des résistances. Une récente étude (1) suggère quelques pistes d’amélioration des pratiques.

La diffusion des recommandations ne suffit pas

La diffusion des recommandations ne suffit pas
Crédit photo : phanie

Les enfants sont particulièrement exposés aux prescriptions antibiotiques inappropriées car, à cet âge, la majorité des infections respiratoires — et elles sont fréquentes — sont d’origine virale. Une étude a ainsi été menée afin d’analyser les prescriptions antibiotiques dans une population d’enfants en France, entre mars 2015 et février 2017, pour en dégager des pistes d’amélioration (1).

Dans un échantillon national de 680 médecins généralistes et 70 pédiatres utilisant un logiciel de prescription identique, 221 768 visites d’enfants de moins de 15 ans ont été analysées. Ont été recueillis : la nature et durée de la prescription antibiotique, le diagnostic, l’âge et la spécialité du médecin et la saison. La majorité des prescripteurs avait plus de 50 ans. Les taux de prescription d’antibiotiques pour 100 visites ont été calculés séparément pour les généralistes et les pédiatres. Les facteurs associés à la prescription d’antibiotiques ont été recherchés.

Les généralistes de plus de 50 ans prescrivent plus d’antibiotiques à large spectre

Les résultats montrent que les médecins généralistes ont prescrit plus d’antibiotiques que les pédiatres : taux de prescription pour 100 visites de 26,1 %, IC95 [25,9 – 26,3], vs. 21,6 %, IC95 [21,0 – 22,2] respectivement, p < 0,0001.

Les cinq antibiotiques les plus prescrits étaient l’amoxicilline (plus chez les pédiatres que chez les médecins généralistes), le cefpodoxime (médecins généralistes > pédiatres), l’amoxicilline/acide clavulanique, la josamycine et le céfixime.

Les infections des voies respiratoires représentaient plus de 80 % des prescriptions d’antibiotiques. Les infections présumées virales étant responsables de 40,8 % de toutes les prescriptions d’antibiotiques par les médecins généralistes et de 23,6 % des prescriptions pour les pédiatres.

Par pathologie, les taux de prescription d’antibiotiques étaient de : 68,1 % pour les généralistes et 79,8 % pour les pédiatres en cas d’otite, 67,3 % et 53,3 % en cas de pharyngite, 67,9 % et 77,3 % en cas de sinusite, 80,0 % et 99,2 % en cas de pneumonie, 65,2 % et 47,3 % en cas de bronchite, 21,7 % et 11,6 % pour les rhumes et 31,6 % et 20 % face à une bronchiolite.

Les généralistes ont prescrit des antibiotiques à plus large spectre que les pédiatres pour les infections respiratoires : 49,8 %, IC95 [49,3 – 50,3], vs. 35,6 %, IC95 [34,1 – 37,1], p < 0,0001. Les traitements étaient de durée similaire (p = 0,21).

Après ajustement pour le diagnostic, les taux de prescription d’antibiotiques n’étaient pas associés à la saison, ni à l’âge des patients, mais étaient significativement plus élevés chez les généralistes âgés de 50 ans et plus.

Chez les pédiatres, il y aurait une tendance à une diminution des prescriptions d’antibiotiques avec l’âge des enfants.

En conclusion, la diffusion des recommandations ne suffit pas. Les futures campagnes de gestion des antibiotiques devraient viser les généralistes âgés de 50 ans et plus, avec des actions ciblées sur les infections respiratoires, présumées virales et l’utilisation d’antibiotique à large spectre.

 

Communication « Les 5 articles de l’année en infectiologie » de la Dr Élise Launay (Nantes) 

(1) Trinh et al. Community antibiotic prescribing for children in France from 2015 to 2017: a cross-sectional national study. J. Antimicrob Chemother. 2020 Aug 1 ;75 (8) :2344-52

 

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin