Dans le cadre solennel de la Sorbonne, devant un parterre de 800 personnalités du monde politique, scientifique et universitaire, Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen ont lancé ce 5 mai un vibrant appel à la communauté scientifique internationale. Face aux menaces qui pèsent sur la liberté académique, notamment aux États-Unis, la France et l’Union européenne affichent leur ambition : faire de l’Europe un refuge pour les chercheurs du monde entier et un pôle d’excellence scientifique. À travers de nouveaux investissements, Paris et Bruxelles entendent renforcer l’attractivité du continent, garantir l’indépendance de la recherche et défendre un modèle fondé sur l’ouverture, l’innovation et la liberté intellectuelle.
100 millions pour attirer les talents
Le président Macron a ainsi promis que l'État allait investir 100 millions d'euros « supplémentaires » pour attirer en France les chercheurs étrangers, notamment américains, « qui sont menacés » au moment où les États-Unis de Donald Trump diminuent les financements et les visas destinés aux chercheurs. Ces 100 millions ne sont pas à proprement parler de nouveaux fonds, puisqu’il s’agit du budget de réserve de France 2030 qui n’était pas encore fléché.
Si ces mesures ne sont pas destinées à attirer exclusivement des chercheurs travaillant actuellement aux États-Unis, l’ombre de Donald Trump et de sa politique de recherche, faite de coupes budgétaires et d’arrêt de financements sur des sujets de recherche qui ne lui conviennent pas, a plané lors de la matinée. « L'Europe, oui, doit devenir un refuge », a ajouté Emmanuel Macron en lançant « un appel de la Sorbonne qui s'adresse à tous les esprits libres qui veulent œuvrer pour la science et défendre notre modèle ». Inaugurée le 18 avril dernier, la plateforme « Choose France for Science » a suscité déjà plus de 30 000 connexions, dont un tiers depuis les États-Unis selon l’Élysée. Plusieurs centaines de dossiers ont en outre déjà été ouverts par le biais de la plateforme.
Des bases de données en danger à sauvegarder
Au cours d’une intervention de 40 minutes, Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité d’investir en Europe dans des projets structurants. Il a alerté sur le risque de voir disparaître, en raison du rôle central des États-Unis dans la science mondiale, de grandes plateformes de recherche et des bases de données essentielles, notamment en épidémiologie et en climatologie. Selon lui, certaines pourraient devenir inaccessibles, voire irrémédiablement perdues pour la science. « La France et l’Europe ne peuvent pas laisser faire cela. Il est urgent de mettre à l’abri ou de recréer ces bases de données pour en assurer la continuité », a-t-il martelé.
Le Président a également appelé l’Europe à investir massivement dans « une dizaine de chantiers du siècle » : santé, espace, technologies quantiques, intelligence artificielle, économie circulaire, vieillissement, énergie nucléaire, climat, électronique et lutte contre la désinformation.
Rendre plus attractif les carrières de chercheur en Europe
Pour Emmanuel Macron, la réponse française et européenne doit s’appuyer sur la loi de programmation de la recherche (LPR), le plan France 2030 et une stratégie européenne inspirée par le rapport Draghi. L’Élysée rappelle que, dès avant l’élection de Donald Trump, la LPR prévoyait 25 milliards d’euros d’investissements sur 2021-2030, dont 4 milliards déjà engagés. À cela s’ajoutent les 4 milliards d’euros du programme France 2030, investis dans des domaines stratégiques.
La revalorisation du métier de chercheur, permise par la LPR, garantit désormais à tous les jeunes chercheurs une rémunération d’au moins deux Smic, selon un conseiller du président. Des primes, des repyramidages et l’accompagnement via les chaires de professeur junior ont également été mis en place. Ces chaires, créées dans le cadre de la LPR, ont permis de recruter 60 % de chercheurs, français ou étrangers, travaillant auparavant à l’étranger, ce qui témoigne de l’attractivité du dispositif. Le programme Pause, lancé en 2017, a aussi permis d’accueillir de nombreux chercheurs.
Au niveau européen, 95 milliards d’euros sont consacrés à la recherche pour la période 2021-2027, soit 10 % du financement public total. En avril, 13 États membres, dont la France, ont adressé à la Commission européenne une lettre réaffirmant leur attachement à la liberté de la recherche scientifique et académique. La Commission a répondu en annonçant un nouveau paquet de mesures en ce sens, ainsi qu’un travail de cartographie des dispositifs fiscaux de soutien à la recherche.
500 millions en Europe
La commissaire européenne à la recherche, Ekaterina Zaharieva, a rappelé que la Commission prépare un second « Europe Research Area Act » pour 2026, doté d’un budget de 500 millions d’euros. Ce texte vise à améliorer les carrières et la mobilité des chercheurs, à harmoniser les droits sociaux et à soutenir la recherche sans condition de publication. « Le “publish or perish” ne doit plus guider les carrières », a-t-elle insisté. Selon elle, 70 % des chercheurs non européens ayant bénéficié d’une bourse ERA restent en Europe deux ans après la fin de leur financement.
Ursula von der Leyen a présenté les premiers éléments de l’initiative « Choose Europe for Science ». L’Union européenne prévoit de nouvelles « super bourses » à l’horizon 2026-2027 pour attirer des chercheurs de haut niveau et renforcer le soutien aux jeunes scientifiques, avec l’objectif d’atteindre 3 % du PIB européen investi dans la recherche. Elle a également évoqué un futur « Business Innovation Act » pour faciliter le passage de la recherche fondamentale à l’innovation commerciale.
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