« Le risque de transmettre la maladie à l’enfant est relativement faible, relativise le Dr Antoine Meyer, hépato-gastroentérologue à l’hôpital Bicêtre (Le Kremlin-Bicêtre), car les MICI sont des maladies multifactorielles. Elles surviennent par dysrégulation immunitaire après exposition à un des facteurs de risque environnementaux chez un sujet génétiquement prédisposé. Si l’un des deux parents a une MICI, cela augmente de deux à huit fois le risque d’en développer une chez les enfants comparativement à la population générale ». En revanche, il était nécessaire de mieux cerner les risques liés à la maladie maternelle sur l’issue de la grossesse…
Une grossesse à risque en cas de maladie active
Une étude coordonnée par le Dr Meyer a répertorié 36 654 grossesses chez des femmes atteintes de MICI entre 2010 et 2018, sur les 8,6 millions de grossesses en France. Les résultats sont rassurants. « Le taux de prématurité est plus élevé en cas de MICI : 8 % versus 5,5 % (odds ratio : 1,51), avec une augmentation du petit poids pour l’âge gestationnel (11,1 % vs 9,8 %, OR : 1,15) ainsi que celui de césarienne (26,1 % vs 20 %, OR : 1,39). Cette augmentation est réelle mais modérée ».
D’après l’analyse en sous-groupes, les femmes ayant une maladie active ont des taux de prématurité, de petit poids pour l’âge gestationnel et de césarienne plus importants avec des OR ajustés respectifs de 2,14, 1,27 et 1,57. En cas de MICI inactive, les taux se rapprochent alors de ceux de la population générale avec des OR respectifs de 1,28, 1,10 et 1,32. « Une rémission de la maladie avant et pendant la grossesse est souhaitable, en déduit le Dr Meyer. Les femmes atteintes de MICI devraient faire part de leur projet de grossesse au gastroentérologue, qui devrait lui-même s’enquérir d’un éventuel désir de grossesse ». Par ailleurs, l’activité de la maladie cœliaque tend à diminuer pendant la grossesse, alors qu’elle augmente dans la rectocolite hémorragique (1).
Des données plutôt rassurantes sur les traitements
Le second volet de l’étude, en attente de publication, analyse les thérapeutiques médicamenteuses prises au cours de la grossesse. Il n’y a pas de signal dans la littérature à ce sujet, chez la mère comme chez l’enfant, pour les corticoïdes, les salicylés, les thiopurines, et les anti-TNF (infliximab, adalimumab, golimumab, certolizumab). En revanche, les données sur les molécules plus récentes, comme le vedolizumab, l’ustékinumab et le tofacitinib restent parcellaires mais sans être inquiétantes. Une des formulations de salicylés doit être évitée (Rowasa) car elle contient des phtalates qui peuvent entraîner des malformations. Pour rappel, le méthotrexate est formellement contre-indiqué pendant la grossesse car tératogène. « Les anti-TNF passent la barrière placentaire principalement au troisième trimestre de grossesse, indique le Dr Meyer. Ils sont alors retrouvés pendant la première année de vie chez l’enfant, ce qui l’expose théoriquement à un surrisque d’infections pendant cette période, même s’il n’est pas formellement démontré. D’où la distinction entre les recommandations américaine et européenne sur ce point : le texte européen, plus prudent, stipule que le maintien des anti-TNF lors du troisième trimestre de grossesse est à discuter en fonction de l’activité de la MICI ».
(1) Meyer A. et al. Aliment Pharmacol Ther 2020;52:1480–90
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