« Il faut tromper le cerveau ! », s'enthousiasme l'ex-externe en 5e année de médecine, Bruno Verjus. « Car le homard a une saveur vraiment exceptionnelle quand il est cru, mais ce n'est pas dans notre culture culinaire française… », poursuit le désormais chef à deux étoiles de Table, son restaurant parisien.
Zoom sur une recette dont Bruno Verjus ne fait guère mystère. Son produit signature : « L’inimitable », est un homard de casier en provenance de l'île d'Yeu. À déguster mi-cru mi-cuit, « presque » vivant, explique le créatif gourmet : « On amène le homard cru à température de bouche, soit 40 degrés dans la casserole pour qu'il arrive dans l'assiette à 37. Et on l'infuse dans un beurre clarifié de vache Rouge Flamande auquel on mêle les carapaces toastées. Comme en parfumerie, le beurre va faire un enfleurage et prendre tous les arômes. Le homard reste cru avec toutes ses saveurs. Mais on a la sensation de cuit puisque c'est chaud… » Un petit leurre gastronomique qui lui a valu une première étoile en 2018.
« On ne parle pas la bouche pleine »
S'il y a un monde entre médecine et cuisine, Bruno Verjus n'a pas hésité à le parcourir. Abandonnant, à la fois France et externat, celui que les carabins de Lyon surnommaient « le géant aux pieds d'argile », a d'abord mis les voiles pour les États–Unis, puis la Chine. Des actes audacieux, entre photographies de pub, import-export en packaging médical… Et beaucoup de nouveaux départs. Épicurien par nature, car « du côté de ceux qui mangent », l'ex étudiant en médecine souligne volontiers que le ventre est le second cerveau de l'homme ! Alors, de retour en France, le gourmand baroudeur, natif de Renaison (Loire), se fait connaître comme auteur de livres entre poésie et gastronomie : "Recettes pour ma femme, cuisine d'amour et d'humeurs" et d'autres encore, dont le petit dernier "L'Art de nourrir" démontre « pourquoi la façon dont on se nourrit décide du monde dans lequel on vit. ».
Les mots à la bouche
Dans la même veine, Bruno Verjus devient chroniqueur radio sur France Culture. Il animera avec Alain Kruger, l'émission "On ne parle pas la bouche pleine". Jusqu'à atteindre 54 ans. Et là, à l’âge où les chefs s’éloignent des fourneaux, le touche à tout, fini par passer à Table…
À Table !
Que ton alimentation soit ta meilleure médecine ! Fort de l'aphorisme (attribué à tort ou à raison à Hippocrate), Bruno Verjus est convaincu que « bien se nourrir protège de presque tous les maux… ». L'autodidacte, qui s'est fait le palais « en mangeant dans le monde entier » décide de se lancer dans l'aventure de la création culinaire. C’est dans l'Est parisien près du marché d'Aligre, qu'il ouvre, il y a dix ans, son restaurant Table. Il met un point d'honneur à tisser des liens privilégiés avec une sélection d'éleveurs, de producteurs et d'artisans de haute lignée. Tous travaillent dans le respect des cycles de la nature. Ils mènent d'ailleurs la danse. Ce sont eux qui décident des produits et quantités à livrer à " Table ". Ainsi, après la découverte de la livraison du jour, chef et brigade orchestrent une cuisine vivante et jubilatoire ! Ni carte ni menu fixes. Seuls entrent en scène produits d'excellence et créativité. Une approche gastronomique atypique et collective ! Car Bruno Verjus tient au rapport holistique au monde : « Celui dans lequel tout fonctionne en boucle avec l’autre. J'ai appris cela lors de mes 18 années passées en Chine… », souligne-t-il. Un credo qui en cuisine, a fait recette. Ce qui était, au commencement un bistrot gourmand est devenu grand. Si grand, qu'après avoir obtenu une première étoile suivie d'une autre labellisée verte - afin de mettre chefs respectueux de l'environnement et gastronomie durable à l'honneur -, le restaurant "Table" obtient, l'an passé, une deuxième – et plus classique étoile dans le célèbre guide rouge. Consécration qui ne s'arrête pas là. Car le chef autodidacte et original a obtenu, il y a quelques semaines à Valence, la dixième place des meilleurs restaurants du monde au palmarès du "World's 50 Best Restaurants". De la médecine à la gastronomie, des pas de géant même aux pieds d'argile !
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