Années après années, le calendrier vaccinal évolue au gré de l’épidémiologie. L’une des nouveautés majeures de l’édition 2010 (BEH 14-15/22 avril 2010) est la recommandation de la vaccination systématique par le vaccin conjugué contre le méningocoque C à une dose (remboursé à 65%) de tous les nourrissons âgés de 12 mois à 24 mois. Avec, pour une période transitoire, une vaccination de rattrapage chez les enfants, les adolescents et les jeunes adultes jusqu’à l’âge de 24 ans révolus.
La France est aujourd’hui l’un des pays qui connaît les taux d'incidence d’infection invasive à méningocoque C (IIM C) les plus élevés en Europe, notamment suite aux succès des stratégies vaccinales promues dans de nombreux pays voisins (Royaume-Uni, Pays-Bas…). Jusqu’alors réservée aux sujets contacts d’un cas d’IIM C ou aux enfants souffrant de déficit en fraction terminale du complément, en properdine ou ayant une asplénie, voire aux situations exceptionnelles dans des zones délimitées où l’incidence du méningocoque C était particulièrement élevée, la vaccination systématique est désormais justifiée, explique Daniel Floret, président du comité technique des vaccinations. « Les IIM de sérogroupe C sont des maladies infectieuses graves, et même si elles ne sont pas parmi les plus fréquentes – le sérogroupe C représente au maximum 30 % des sérogroupes de Neisseria meningitidis – nous comptabilisons aux alentours de 200 cas annuels, une trentaine de décès et au moins autant de sujets présentant des séquelles physiques permanentes. »
Un nouveau pic attendu
Autre argument en faveur de cette nouvelle stratégie vaccinale, l’épidémiologie des IIMC, marquée par des zones d’hyper-endémie, assez courantes au cours de ces dernières années, obligeant les autorités sanitaires à organiser des campagnes prophylactiques vaccinales localisées. Enfin, l’incidence des IIMC fluctue dans le temps avec deux dernier pics, en 1992 puis en 2002 et l’on s’attend à un autre dans les années à venir, d’autant plus que le centre national de référence des méningocoques (CNR Institut Pasteur, Paris) a noté
l’implantation d’une souche de Neisseria meningitidis particulièrement virulente (C : 2a : P 1.7,1/complexe clonal ST-11) dont la part est passée de 1,1 % de la totalité des sérogroupes C avant 2005 à 24 % en 2008. Cette souche est responsable d’un pourcentage légèrement plus important de formes graves avec un taux de létalité supérieur et touchant les tranches d’âges plus élevées que le phénotype majoritaire actuellement
(C : 2 q : P 1,5.2/ST-11).
Enfin, les expériences concluantes et spectaculaires des campagnes de vaccination menées au Royaume-Uni, en Espagne, au Québec, et aux Pays-Bas, où l’incidence des IIM C était plus élevée qu’en France il y moins d’une dizaine d’années, ont montré qu’on pouvait espérer une réduction de 80 % de l’incidence de ces maladies, avec une excellente tolérance du vaccin**.
« L’épidémiologie des IIMC, détaille Daniel Floret, permet de dessiner deux pics, le premier concerne les jeunes enfants jusqu’à trois ans, surtout la première année. Le second est amorcé vers 7-8 ans, culmine vers 12-13 ans pour redescendre progressivement aux alentours de 25 ans. »
La vaccination de l’entourage protègera les nourrissons
Les données sur la létalité du sérogroupe C montrent que sur la période 2003-2007, elle était maximale avant un an (2,07/ 100 000), élevée entre un et quatre ans (1,12 /100 000) et un peu moindre entre quinze et dix-neuf ans (0,86/100 000).
« Les 0-1 ans sont les plus touchés, poursuit Daniel Floret, mais nous avons choisi l’option de ne pas recommander la vaccination dans cette tranche d’âge uniquement parce que, avant un an, trois doses de vaccin sont nécessaires au lieu d’une, au sein d’un calendrier déjà très chargé. La vaccination de l’entourage protègera les nourrissons, notamment celle des moins de 25 ans, car les adolescents et les jeunes adultes possèdent le taux de portage de méningocoque C le plus élevé. L'existence d'une couverture vaccinale élevée (supérieure à 80 % chez les 1-2 ans et au moins à 50% dans la population ciblée pour le rattrapage) au regard des expériences d’autres pays, réduit le portage et protège les populations en dehors de la cible vaccinale. »
**Selon les chiffres du CNR le taux de notification estimé est
de 6,2/100 000 doses et de 2,1 cas graves pour 100 000 doses, essentiellement à type de réactions locales.
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