Pr Gilles Berrut, chef de service de médecine aiguë et gériatrie au CHU de Nantes, président de la Société française de gériatrie et de gérontologie
« Choisir d’emblée la gériatrie »
Les services de médecine polyvalente, médecine interne, freinent parfois pour que quelques lits soient dédiés à la prise en charge gériatrique impliquant à la fois du temps et de la formation. En ville, les étudiants qui s’investissent en gériatrie sont encore souvent issus de la médecine générale. Or cette formation de gériatre doit relever désormais d’un premier choix. Cela doit devenir un diplôme d’études spécialisées pour des personnes qui décident d’emblée de se mettre au service des personnes âgées. Ensuite, des spécialités pourront être choisies. Nous avons besoin de gériatres spécialisés et, aujourd’hui, l’oncogériatrie ou les gériatres spécialisés dans le domaine des urgences sont des compétences très recherchées. Nous attendons impatiemment la création de cette filière gériatrie actuellement en discussion au ministère. Cette clarification rendra nos relations avec la médecine générale beaucoup plus sereine et cette reconnaissance de notre spécialité permettra de la faire connaître et de valoriser notre métier.
Pr Jean-Pierre clément, chef du pôle de psychogériatrie au centre hospitalier Esquirol, Limoges
« De nouveaux modes d’exercice pour éviter des hospitalisations »
La psychiatrie de la personne âgée demeure encore aujourd’hui sous-utilisée et je regrette qu’en France nous accusions un retard dans ce domaine. Il convient d’envisager plus systématiquement la prise en charge des troubles psychiques de la personne âgée. Je pense aux troubles psychiatriques communs comme la dépression ou au registre du délire, mais aussi aux pathologies démentielles. On pense naturellement à la maladie d’Alzheimer, mais il y a beaucoup d’autres maladies qui peuvent entraîner des souffrances et des troubles du comportement. Le développement des hôpitaux de jour et la multiplication d’équipes mobiles qui se rendent sur les lieux de vie des patients âgés à domicile ou en EHPAD sont par exemple de nouveaux modes d’exercice très prometteurs. Ces équipes en binôme infirmiers-médecins procèdent à une évaluation sur le terrain, en amont d’une éventuelle hospitalisation, et permettent de la prévenir, voire même de l’éviter.
Patrice Bouchacourt, rhumatologue gériatre, service de gérontologie 2, groupe hospitalier Broca, La Rochefoucault, La Collégiale, Paris
« Une autonomie plus longue et importante possible »
Aujourd’hui, les diagnostics sont réalisés plus systématiquement et cette évaluation compte beaucoup pour les rhumatologues. Des patients peuvent tout simplement ne pas prendre leurs médicaments parce qu’ils ont des troubles de la mémoire et c’est quelque chose que nous devons avoir constamment à l’esprit. Ces problèmes vont se poser avec beaucoup plus d’acuité dans les années à venir. Les gens veulent rester en bonne santé, le plus longtemps possible et actifs. Il souhaite une véritable troisième vie, car la retraite n’est plus la simple attente de la mort. C’est désormais une renaissance et les patients veulent faire autre chose. Les rhumatologues sont là pour leur garantir le minimum de handicap ou sa meilleure prise en charge pour une autonomie la plus longue et plus importante possible.
Alain Delarque, MPR CHU de la Timone, Marseille
« L’augmentation de la durée de vie nous place devant des situations nouvelles »
En médecine physique et de réadaptation, nous nous trouvons face à une explosion du nombre de sujets âgés que nous sommes amenés à prendre en charge. Ces patients présentent toutes les pathologies et déficiences que nous connaissons bien. Il m’arrive, par exemple, d’aller en service de médecine de soins intensifs pour m’occuper d’une patiente de 80 ans qui vient d’avoir un accident de la circulation. Naturellement, l’augmentation de la durée de la vie nous place devant des situations nouvelles. Je pense aussi aux hémiplégiques paraplégiques, voire tétraplégiques, qui vivent eux aussi plus longtemps et nous sommes désormais à même de suivre des personnes dont l’espérance de vie était considérablement réduite il y a trente ans. Notre spécialité travaille désormais en étroite collaboration avec les gériatres. Dans les différentes structures, on voit des équipes mixtes se constituer pour travailler avec ceux qui ont l’expérience de la prise en charge de la personne âgée. À Marseille, nous nous sommes organisés en ce sens depuis un peu plus d’un an.
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