Nicolas Sarkozy devrait annoncer d’ici à la fin octobre, les orientations du nouveau plan cancer pour 2009-2013. La lutte contre les inégalités sociales face à la maladie et l’accent sur la recherche seraient privilégiés. Ce plan cancer 2 devrait aussi insister sur le rôle du médecin traitant en matière de coordination du parcours des malades. Mais comment ? En Champagne, un réseau rapproche avec succès hospitaliers et libéraux. Pour sa part, le Pr Albert Hirsch juge indispensable une consultation de prévention. Et pour la financer, le vice-président de la Ligue réclame une hausse de 10 % du prix du tabac.
Constat. « Les généralistes n’ont été ni associés ni véritablement concernés par le plan cancer 1. Ce dernier
était tourné vers les pôles d’excellence, la recherche via les cancéropôles, et la mise en place de protocoles. Aujourd’hui, compte tenu des différentes missions que reconnaît la loi HPST au médecin traitant, j’espère que nous y serons cette fois-ci intégrés ». Ce souhait, le président de MG-France pourrait bien le voir exaucer dès la fin du mois, échéance à laquelle le Président de la République devrait annoncer les grandes orientations du plan cancer 2.
En effet, dans un message lu par Roselyne Bachelot, la semaine dernière lors d’un colloque national sur le futur plan cancer organisé par l’Inca, Nicolas Sarkozy, indiquait, en la matière, sa volonté de réduire les inégalités sociales. « Le risque de mourir d’un cancer entre 30 et 65 ans est deux fois plus élevé chez les ouvriers que chez les cadres et les professions libérales ». Situation inacceptable jugeait le chef de l’Etat.
« Dans le fonctionnement du dispositif actuel, les personnes les plus vulnérables, celles qui cumulent les facteurs de risques – tabac, alcool, mauvaise hygiène alimentaire- sont laissées sur le bord de la route,» diagnostique le Pr Albert Hirsch. Pour le vice-président de la Ligue contre le Cancer, l’une des solutions passe par le médecin traitant, « à condition de lui accorder le temps et les moyens financiers nécessaires » (voir entretien ci-contre).
Dans ce domaine, la Ligue entend donner l’exemple. Elle travaille à l’établissement d’une convention expérimentale avec des généralistes, dans le domaine de la prévention. L’idée de départ est simple : « quand vous abordez des problèmes de comportement, vous rentrez dans la vie intime des personnes et il faut du temps. Parmi les éléments sur lesquels nous réfléchissons, est la possibilité, pour des généralistes, dans un territoire donné, d’adresser leurs patients, qu’ils soient ou non, malades, sur un référent qui serait dans le comité départemental de la Ligue, situé à proximité du lieu d’exercice du médecin et du domicile du patient. Le Pr Hirsch n’en dira pas plus: «Il est encore trop tôt pour faire une annonce précise... Dans un avenir proche... » .
En Champagne-Ardenne, en revanche, le contenu possible du nouveau plan cancer ne semble pas tellement émouvoir l’une des chevilles ouvrières du réseau d’oncologie Oncocha (voir article en page suivante), le Dr Jean-Yves Schlienger. La raison ? Le fonctionnement du dossier communicant en cancérologie que les praticiens de la région ont mis sur pied depuis 2004, occasionne déjà un réel gain de temps dans le suivi des patients atteints de cancer, en tout cas pour les généralistes. Mais toutes les régions sont loin de réagir de la même manière. Ainsi en Alsace qui a développé trois réseaux de cancérologie, (Nord, Centre et Sud), le Dr Michel Levêque, généraliste installé à Thann (Haut-Rhin) souhaiterait voir ce plan cancer 2 désormais mettre l’accent sur une meilleure articulation ville-hôpital dans le retour du patient à domicile.
Des desiderata qui correspondent aux contributions proposées , à la suite du rapport Grünfeld, par MG-France et mises en ligne cet été sur le site du syndicat. « Le patient cancéreux guéri n’est pas un patient comme les autres. Il a senti le vent du boulet et est, en règle générale davantage sensible aux messages de prévention, pas simplement en matière de prévention d’une éventuelle récidive, mais dans le souci de la préservation de son capital santé, au sens large », développe le Dr Martial Olivier-Koehrett. Qui s’interroge sur les moyens qui seront alloués aux médecins traitants pour réaliser le suivi de ses patients, « qui nécessitent, entre autres, un travail de secrétariat très lourd ».
La question des moyens inquiète d’ailleurs l’ensemble des chefs de file syndicaux. Preuve en est leur réaction unanime aux annonces récentes de Roselyne Bachelot évoquant une sortie plus précoce du dispositif ALD des patients guéris d’un cancer. L’Unof vient ainsi de réclamer que le forfait « médecin traitant » pour les généralistes qui continuent à suivre ces patients, leur soit toujours réglé chaque année. Le chef de l’Etat n’entrera sans doute pas dans ce niveau de détail à la fin du mois. Mais il devrait, à tout le moins, lever un coin du voile sur le montant et les modes de financement dévolus aux médecins traitants, si ces derniers se retrouvent, une fois de plus, comme le rappelle le Pr Hirsch, « en première ligne ». D’ailleurs ce dernier fait une proposition très claire au président de la République : la hausse annuelle constante de 10 % du prix du tabac, alliée à une attribution plus substantielle de ces recettes au budget de la santé, permettrait de financer, tout ou partie du plan cancer. « Je sais bien que la mode est aux taxes, carbone, écologique, bonus-malus… et qu’elle ne font pas toujours recette auprès des Français, mais celle sur le tabac devrait faire véritablement sens auprès de l’opinion, si de fait, elle est reversée en direction d’actions de santé publique ». Une nouvelle forme d’éducation thérapeutique en somme.