L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a exprimé son opposition à un moratoire sur les techniques de modification ciblée de l'ADN, et demande que la stratégie nationale de recherche consacre une plus grande priorité aux biotechnologies, dans un épais rapport de 290 pages présenté mercredi.
Ce rapport a été réalisé en réponse à une saisine du gouvernement, motivée par les récents progrès dans le domaine de la modification ciblée du génome, et notamment le système « CRISPR-Cas9 » inventé par Emmanuelle Charpentier (directrice de l'Institut Max Planck d'infectiologie à Berlin) et Jennifer Doudna (université de Californie à Berkeley). Ce dernier fait d'ailleurs l'objet d'une bataille de brevets entre le duo de chercheuse et Feng Zhang, un scientifique du Broad Institute. Ces chercheurs, entre autres, ont été auditionnés par les parlementaires auteurs du rapport.
Oui au somatique, non au germinal
Une large partie du rapport est consacrée aux applications médicales. Les auteurs distinguent ainsi les modifications des cellules somatiques de celles ciblant les cellules germinales et se transmettant à la descendance. Si les essais cliniques portant sur les modifications des cellules somatiques sont encouragés par les auteurs, ce n'est pas le cas des modifications des cellules germinales qui sont, au moins temporairement, non recommandées.
Outre le problème éthique posé par la modification du pool génétique de la population, le président de l'OPECST Jean-Yves Le Déaut, estime qu'il faudra « attendre que les connaissances accumulées avec les modifications des cellules somatiques nous assurent une maîtrise complète de la mutagenèse dirigée, avec le moins d'effets hors cible possible ». Pour la sénatrice Catherine Procaccia, vice-présidente de l'OPECST, « il faut cependant continuer les recherches in vitro ». Les auteurs du rapport estiment que la réglementation française actuelle encadrant ce type de recherche depuis la modification de la loi de bioéthique de 2013 est suffisante, mais plaident pour un rôle accru de l'Agence de la Biomédecine.
Autre sujet de préoccupation : la modification de l'ADN mitochondrial. Deux enfants sont déjà nés après avoir bénéficié d'une greffe de mitochondrie au Royaume Unis et en Ukraine. Sur ce point, les rapporteurs estiment que la question reste ouverte, à condition de mener un « débat apaisé ». Pour Jean-Yves Le Déaut, « il faut déjà commencer par ne plus utiliser cette appellation stupide d'enfant à 3 parents ». Un réexamen de la loi de bioéthique est prévu en 2018, et sera l'occasion de poser la question du transfert mitochondrial, pour l'OPECST.
Tous les pays du monde ne sont pas à la même enseigne
L'article 13 de la convention d'Oviedo, signée le 4 avril 1997, interdit de modifier le génome de la descendance, mais peu de pays au monde l'ont signée. « Beaucoup de pays l'appliquent sans pour autant l'avoir signée », note toutefois Jean-Yves Le Déaut. Les États-Unis, l'Angleterre et la Chine ont, au contraire, pris le parti d'une législation plus souple. Les États Unis se prononcent pour une autorégulation dans le cadre d'une recherche responsable.
« L'écrasante majorité des brevets sont déposés aux États Unis et en Chine, constate Jean Yves Le Déaut. Les Crispr-Cas9 représentent une innovation de rupture comme il y en a peu par décennie. Malheureusement, l'OMS n'a pas mesuré l'enjeu de ces technologies et n'a pas réactivé son programme de génomique humaine dormant depuis plus de 10 ans. »
Les rapporteurs plaident pour la mise en place d'un comité d'experts indépendants à l'image de ce que réalise le GIEC dans le domaine du climat. Son rôle serait d''évaluer le degré e maturité des nouvelles thérapies géniques, d’en apprécier les enjeux sanitaires et éthiques et de proposer des lignes directrices.
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