C’était une décision attendue depuis longtemps. Un décret gouvernemental du 5 septembre 2025 vient d’interdire la production, la fabrication, le transport, l'importation, l'exportation, la détention, l'offre, la cession, l'acquisition et l'emploi de produits à usage oral contenant de la nicotine sur l’ensemble du territoire national. Cette interdiction couvre « tous les produits manufacturés, constitués totalement ou partiellement de nicotine synthétique ou naturelle, conditionnée pour la vente, quelle que soit leur présentation, et destinés à la consommation humaine par ingestion ou absorption ». Le tabac à chiquer et les médicaments destinés à l’arrêt du tabac ne sont pas concernés par cette interdiction. Cette décision fait suite à celle de l’interdiction de la puff en février dernier.
Dénoncés pour leur toxicité et leur caractère addictif en particulier pour les enfants et adolescents, les sachets, billes et gommes de nicotine seront donc interdits en France à partir de mars 2026. Ce bannissement « vise à protéger la santé publique : la nicotine est désormais considérée comme une substance vénéneuse en raison de ses effets nocifs, et son usage à visée récréative présente un risque d’initiation au tabagisme, notamment chez les jeunes », a justifié auprès de l'AFP le ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités.
Feu vert de Bruxelles
Le gouvernement Barnier avait annoncé à l'automne 2024 son intention de bannir les sachets de nicotine, également appelés pouches, en raison d'un accroissement des intoxications chez les adolescents. En février, la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, Catherine Vautrin, prévoyait une interdiction, mais restait dans l’attente d’une autorisation de la Commission européenne, finalement donnée le 1er septembre. Le marché mondial des pouches a été évalué à 6,6 milliards de dollars (5,6 milliards d'euros) pour l'année 2023, et pourrait atteindre 27,4 milliards de dollars (23,4 milliards d'euros) en 2032.
L'Alliance contre le tabac, a salué une « victoire », ajoutant qu’il s’agit « d’une mesure cruciale pour protéger les jeunes et contrer les stratégies pernicieuses d’une industrie qui prospère sur le marché de l’addiction, au détriment de la santé publique ».
« Face à la baisse de la consommation de cigarettes dans les pays développés, les sachets de nicotine et les nouveaux produits nicotiniques (tabac chauffé et cigarettes électroniques) constituent le nouvel eldorado financier des cigarettiers », souligne l'organisation pour qui, « loin d’être des outils de sevrage, les sachets de nicotine et leurs dérivés (billes, perles) n’ont pour objectif que d’étendre le marché de l’addiction à la nicotine ».
L’Institut du cancer (Inca) a également applaudi cette « mesure d’interdiction prise pour la santé de nos plus jeunes ». L’organisation estime que, bien qu’ils puissent être présentés comme un dispositif d’aide à l’arrêt du tabac ou une alternative à la cigarette, les produits à usage oral présentent un risque d’accoutumance, du fait de leur dosage en nicotine plus élevé que celui des cigarettes. « Par ailleurs, les premières données de la littérature soulignent les risques accrus de lésions pulmonaires, une exposition à des substances cancérigènes, ainsi qu’un risque pour les fonctions cognitives du fait de la consommation de nicotine. »
En novembre 2023 déjà, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) avait appelé à une vigilance particulière. « Les enfants et adolescents sont les principales victimes », avait-elle constaté, déplorant une majorité d’intoxications chez les 12-17 ans. Selon son analyse, les sachets de nicotine peuvent provoquer des syndromes nicotiniques aigus parfois sévères : vomissements prolongés avec risque de déshydratation, convulsions, troubles de la conscience, hypotension ayant nécessité un remplissage vasculaire…
Les billes aromatiques présentent aussi un risque d'accident domestique, en particulier pour les enfants de moins de trois ans qui les ingèrent. Le nombre d'appels aux centres anti-poison concernant ces produits était passé de trois en 2020 à 86 en 2022, selon l'Anses.
Les États-Unis en ordre inversé
Les fabricants British American Tobacco France et Philip Morris France, ainsi que le lobby Nicotine World, ont protesté contre l'interdiction. Le premier a critiqué une « approche dogmatique, sans débat ni concertation » de la France, qui « prend le risque (...) de priver les fumeurs adultes d’alternatives encadrées » au tabac. Pour le second, « la France s’entête dans une stratégie d’interdiction inefficace ».
Dans le même temps, les États-Unis adoptent une politique différente, pour ne pas dire diamétralement opposée. Sous la pression de la Maison Blanche, le département américain des brevets et des marques de commerce (USPTO) devrait lancer un programme visant à accélérer les procédures d’autorisation de mise sur le marché de sachets de nicotine. La FDA, l’agence du médicament américaine, a pour sa part requis que les fabriquant s’assurent que les emballages ne puissent pas être ouverts par des enfants.
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