« Le moment de vérité » pour le Premier ministre François Bayrou a eu lieu ce 15 juillet 2025, dans une allocution très attendue sur les orientations budgétaires à venir. Dans une longue introduction, François Bayrou a rappelé l’état des finances publiques : une dette de 3 300 milliards d’euros qui augmente « chaque seconde de 5 000 euros », un budget dans le rouge depuis un demi-siècle, et une sorte d’addiction à la dépense publique. « Nous sommes accros », a jeté à plusieurs reprises le Palois.
Dans la foulée de l’avis très critique du comité d’alerte, François Bayrou, qui a estimé que la France se situe au niveau de la « dernière station avant la falaise », a présenté deux plans d’action. Le premier a pour objectif de dégager 21 milliards d’euros d’économies sur les dépenses et de stabiliser la dette d’ici à 2029 ; le second de relancer la production.
Patients : la « responsabilité » à tous les étages
En 2026, le gouvernement attend cinq milliards d’euros d’économies sur les dépenses sociales. En premier lieu, François Bayrou s’appuie sur la responsabilisation des patients.
Aujourd’hui, le montant de la franchise médicale est plafonné à 50 euros par an et par assuré sur les boîtes de médicaments, les actes paramédicaux et les transports. Le gouvernement entend doubler cette franchise à 100 euros, ce qui correspondrait à « 8 euros maximum par mois » pour chacun, a bien précisé François Bayrou. Car la notion de « c’est gratuit, j’y ai droit » est selon la ministre Catherine Vautrin (Travail, Santé, Familles, Solidarités) « mortifère ». Ainsi, les franchises seront « versées au comptoir » des pharmacies d’officine pour être « plus visibles » et ainsi mieux responsabiliser les Français.
En ce sens, l’accent sera aussi mis sur la prévention et en particulier la vaccination : « Trois quarts des personnes en réanimation en épidémie de grippe ne sont pas vaccinées », a déclaré François Bayrou, sans aller plus loin dans le développement de sa pensée.
ALD : vers une meilleure gestion des entrées et des sorties
Comme l’a préconisé la Cnam dans son rapport « Charges et produits » ou plus récemment le Medef, le Premier ministre prône une « réforme en profondeur » du dispositif affection longue durée (ALD), argumentant qu’elle concerne 20 % de la population française contre 5 % en Allemagne. Sont visés en premier lieu « les médicaments remboursés à 100 % sans lien avec l’affection » (les cures thermales sont régulièrement citées ici et là) qui sont considérés comme à faible service médical rendu (SMR).
Dans la même veine, le gouvernement prône une gestion plus dynamique des entrées et des sorties avec un dispositif de suivi et de surveillance renforcée des ALD. Objectif : plébisciter la sortie du statut, qui représente 60 % des dépenses annuelles prises en charge par l’Assurance-maladie, « quand l’état de santé ne le justifie plus », a insisté François Bayrou. « Les ADL méritent d’être revisitées (…) d’autant plus que désormais, certaines pathologies sont devenues curables », a appuyé Catherine Vautrin.
Pertinence : cesser les actes et examens « déraisonnables »
Côtés professionnels de santé, face à la « multiplication déraisonnable » d’examens tels les radios et les scanners ou les « visites à 15 jours d’intervalle » pour « contrôler les diagnostics », une « mise au point définitive du dossier médical partagé » (DMP) sera effective. Surtout, sa tenue par les professionnels de santé sera « obligatoire ». Au côté de l’intelligence artificiel (IA), cette mesure permettra de faire des « pas de géants » après 30 ans de petits pas sur ce sujet, a déclaré le locataire de Matignon.
L’hôpital sera aussi concerné par ces mesures d’efficience, François Bayrou demandant aux établissements de santé une « meilleure gestion qui ne coûte rien », en se focalisation sur les achats, la mutualisation des médicaments et le développement de l’ambulatoire.
Arrêts maladie : cesser la « dérive »
Pour mettre fin à « la dérive » des arrêts maladie, constatant que ceux de plus de 18 mois étaient injustifiés pour « 50 % d’entre eux au moment du contrôle », François Bayrou entend aussi agir. « Ceci n’est plus acceptable », a-t-il martelé, tandis que la dépense en arrêts maladie est en hausse de plus 6 % chaque année depuis 2019. Première annonce : pour les arrêts de plus de 30 jours, les généralistes et spécialistes pourront déterminer la reprise du travail et plus seulement les médecins du travail – à l’exception des maladies et accidents liés au travail. « Il s’agit, d’abord, d’une prescription médicale », a rappelé Catherine Vautrin, pour mettre l’accent sur les médecins, tandis que de nombreuses initiatives de la Cnam pour maîtriser leurs avis d’arrêt crispent déjà les principaux intéressés.
Pour faire des économies, le Premier ministre appelle également à réutiliser les dispositifs médicaux, y compris lorsque les personnes sont « disparues ». François Bayrou a cité les cannes anglaises et les fauteuils roulants chers à Emmanuel Macron, sans aller plus loin.
Un projet de loi sur la fraude sociale et fiscale
Plus largement, le gouvernement entend récolter quelques deniers dans la lutte contre les fraudes fiscales et sociales, lutte qu’il espère dynamiser par un projet de loi présenté à l’automne, qui sera accompagné d’une mission parlementaire. Si François Bayrou n’a pas donné de chiffrage lors de sa prise de parole, un document synthétique sur lequel le Premier ministre s’est appuyé évoque « des mesures de justice sociale et fiscale » à hauteur de 9,9 milliards d’euros.
Enfin, les ARS, qui n’ont pas été citées stricto sensu par le Palois, ne sont pas sauves pour autant, le gouvernement ayant confirmé sa volonté de « supprimer » et « fusionner » plusieurs agences d’Etat : 1000 à 1500 postes sont sur la sellette, a précisé François Bayrou.
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