Noms d’oiseaux et sac de nœuds. Le torchon brûle entre plusieurs syndicats infirmiers et le médiatique Dr Arnaud Chiche, anesthésiste-réanimateur à la polyclinique d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), fondateur en juillet 2020 du collectif Santé en danger (dont la page Facebook rassemble plus de 237 000 membres) et lui-même à la tête d’une communauté significative (6 500 abonnés sur X, 11 600 sur LinkedIn).
Les faits : trois syndicats et collectifs d'infirmiers ont transmis à l'Ordre départemental des médecins du Pas-de-Calais, jeudi 4 septembre, via leur avocat, une plainte déontologique conjointe à l’encontre du Dr Chiche, très argumentée. Parmi les plaignants figurent la Fédération nationale des infirmiers (FNI) et deux branches locales (56 et 62) l'Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa) et le Collectif des infirmiers libéraux en colère (Cilec). Plusieurs infirmières et infirmiers se joignent, en leur nom propre, à cette longue plainte, révélée par France info et dont Le Quotidien a eu copie.
La profession infirmière salie
Tous reprochent à l’anesthésiste de tenir « des propos contraires aux principes du code de déontologie médicale sur divers réseaux sociaux ». Le Dr Chiche y est accusé d'avoir publié « depuis plusieurs mois » sur ces réseaux « des messages haineux, menaçants et insultants à l'endroit de toute personne qui viendrait lui apporter la contradiction ».
Des propos qui, au demeurant, invisibilisent ou « salissent » la profession infirmière, de façon récurrente, expliquent les plaignants. « Il est clair que le Dr Arnaud Chiche a perdu toute réserve dans son discours qu’il semblerait justifier par le caractère louable de sa cause, peut-on lire encore dans la plainte qui entend « alerter votre conseil [de l’Ordre des médecins] sur la dérive d’un de vos pairs ».
Dédain, dénigrement, intimidation : plusieurs propos de l’anesthésiste (depuis effacés de son compte) ciblant en particulier la compétence des paramédicaux (infirmières libérales, IPA) sont rapportées factuellement dans la plainte.


La plainte mentionne aussi des propos condescendants vis-à-vis de contradicteurs : « Tu parles à tes 50 abonnés ? Parfois t’as des réponses ? Ça fait quoi d’être un moustique ? Invisible…Inutile… ». Ou des insultes plus explicites : le Collectif des infirmiers libéraux en colère (Cilec) est qualifié d’« insignifiant », la Fédération nationale des infirmiers (FNI) gratifiée de « complice de raclure ». « Les propos du Dr Arnaud Chiche montrent une totale perte de contrôle sous couvert de liberté de parole », expose la plainte, qui considère que plusieurs articles du code de déontologie médicale ont été violés (article 3 sur les principes de moralité et de probité, article 13 sur l’information prudente, article 31 sur le fait de ne pas déconsidérer la profession, article 68 sur la bonne confraternité avec les membres des autres professions de santé).
Contacté par Le Quotidien, le Dr Chiche reconnaît aujourd’hui avoir « répondu bêtement » à des « attaques » qui le visaient sur les réseaux sociaux, lui reprochant son attitude hautaine et de ne pas être qualifié pour parler au nom des infirmiers. « Le collectif Santé en danger soutient tous les soignants et sa présidente administrative est infirmière libérale. Si c’est ça dénigrer la profession infirmière », objecte-t-il.
Ses dérapages seraient donc une riposte maladroite à ce qu’il déclare subir lui-même en ligne. « J’étais en congés ce mois d’août en famille et je découvre qu’on me traite de “psychopathe”. J’ai voulu répondre… Depuis, je croule sous les attaques de dizaines de comptes qui se soutiennent : IPA, IDEL, anciens du collectif », affirme Arnaud Chiche. Il a ainsi compilé de son côté les posts, tweets et autres attaques ad hominem qui, assure-t-il, le visent.
L’anesthésiste dénonce même un « cyberharcèlement » venant pour partie de membres des premiers jours du Collectif santé en danger fondé en 2020, qui n’auraient pas obtenu les postes de responsabilité convoités. Aussi simple qu’un conflit basé sur de vieilles rancœurs recuites ?
Désescalade ?
Ce sera à l’Ordre des médecins du Pas-de-Calais de trancher, notamment en retraçant l’historique et le contenu des propos publiés sur les réseaux sociaux. Sans doute « d’ici à la fin de l’année », estime l’avocat des plaignants qui, dans son dépôt de plainte du 4 septembre, remercie l’Ordre « de bien vouloir convoquer les parties à une réunion de conciliation ».
Pas en reste, le Dr Arnaud Chiche a lui aussi fait appel à un défenseur. En attendant la conciliation éventuelle, son avocat doit déposer « dans les jours à venir » une plainte contre X « pour harcèlement et atteinte au secret des correspondances ». Pas sûr que cette riposte contribue à apaiser les tensions dans l’immédiat.
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