Presque sans faire campagne et sans surprise – il était seul candidat –, le Dr Franck Devulder a été élu ce samedi, lors d'une assemblée générale statutaire, nouveau président de la CSMF, à l'unanimité (49 voix pour 49 votants). Le gastro-entérologue, à la tête de la branche spé de la Conf', succède au néphrologue Jean-Paul Ortiz, qui quitte la présidence après huit années de mandat. « Nous sommes unis et déterminés à faire évoluer notre système de santé et le rôle central de la médecine libérale », a réagi le Dr Devulder juste après son élection.
Le Dr @franckdevulder est le nouveau président de la #CSMF. pic.twitter.com/EKWT4mAioC
— CSMF_officiel (@CSMF_officiel) March 12, 2022
Sous la houlette du Dr Maffioli
C'est donc à nouveau un spécialiste qui préside aux destinées du premier syndicat médical. Hépato-gastroentérologue à la polyclinique de Reims-Bezannes, le Dr Devulder, 57 ans, était jusque-là président du Syndicat des médecins français spécialistes de l'appareil digestif (Synmad).
C'est aussi un vieux routier de la Confédération. Lillois d'origine, il arrive à Reims au moment de son internat et finit par s'y installer en libéral, sous la houlette du Dr Claude Maffioli, alors président… de la CSMF, en plein combat contre le plan Juppé et la maîtrise comptable. « J'ai adhéré à la Conf ' dès le premier jour de mon installation, en novembre 1997, se souvient-il. Sur les conseils du Dr Maffioli, mon associé, mais aussi parce que je m'intéressais à l'exercice professionnel et à la gestion entrepreneuriale médicale. »
« Un garçon d'autorité, de ténacité et de caractère »
Après un passage par la formation continue au sein de la CSMF et la présidence du conseil national professionnel (CNP) de sa spécialité, il prend discrètement la présidence de la branche spé début 2020, à la suite du départ douloureux du Dr Patrick Gasser, avec une partie des troupes confédérales, pour fonder le syndicat dissident Avenir Spé. Désormais aux manettes de la maison confédérale, Franck Devulder aura la lourde tâche d'en poursuivre la rénovation, lancée après des résultats aux élections professionnelles en demi-teinte.
Dans sa profession de foi, le futur président fait part de sa « détermination » à faire évoluer la CSMF vers un syndicat de services, grâce notamment à la maison de l'innovation et au « cabinet 2030 ». Il espère changer « le syndicalisme médical français », en travaillant à l'« unité syndicale ». « Franck s'est révélé en garçon d'autorité, de ténacité et de caractère, et donc de combat, confie au « Quotidien » son père, le Pr Bernard Devulder, ancien chef du service de médecine interne au CHU de Lille et doyen de la faculté. Il aura pour la CSMF un dévouement sans limites, une passion, une ambition et un idéal confraternel. »
Tiraillé ?
Qualifié, toujours par son père, de « volontaire, infatigable, parfois intransigeant, mais toujours ouvert à la négociation », le nouveau président de la CSMF saura-t-il mener les négociations de la future convention, cet automne, face au directeur de la Cnam Thomas Fatôme, réputé lui aussi tenace, et faire le poids face au futur ministre de la Santé ? « Difficile à dire tant qu'on n'est pas devant l'exercice », glisse le Dr Patrick Gasser (Avenir Spé), à ses côtés pendant plusieurs années chez les spés de la confédération. « Je pense que nous pourrons discuter, nous avons déjà partagé des idées, mais pour les négociations, il sera encore tiraillé entre les généralistes et les spécialistes et aura peu de marges de manœuvre », tacle l'ex-syndicaliste de la CSMF.
« Il a la capacité de rassembler et c'est ce qui doit guider son action syndicale à la CSMF dans les années à venir, pronostique son prédecesseur Jean-Paul Ortiz. Il saura mener un travail en commun avec les généralistes et les spécialistes. » « Franck ne fait aucune différence entre les spécialités au sein de la CSMF, c'est une vraie chance pour les généralistes de l'avoir pour président », renchérit le Dr Luc Duquesnel, à la tête des Généralistes-CSMF, qui le voit « taillé pour le costume ».
Le nouveau patron confédéral aura en tout cas à cœur « la coordination entre tous les médecins », généralistes et d'autres spécialités, « une évidence », mais aussi avec « les autres professions de santé ».
Hiérarchisation des consultations
Autre engagement affiché du nouveau chef de file de la Conf', préserver et même sanctuariser « le caractère libéral » de la profession. « Cet engagement libéral passe par une hiérarchisation des consultations prenant en compte notre expertise et la rémunération de la qualité, indiquait-il dans sa lettre de candidature. Le paiement à l'acte doit rester la règle. »
Né dans une famille de médecins hospitalo-universitaires, ce père de cinq enfants aurait pu suivre la voie familiale, mais il a préféré se tourner vers la médecine de ville. « Sur mon insistance, il avait préparé à contrecœur un diplôme d'immunologie à l'Institut Pasteur, et me l'avait remis avec superbe en déclarant : "Voici ton DEA, maintenant tu me laisses, je veux être médecin libéral et gastro-entérologue", se souvient le Pr Devulder. Mes désirs d'avoir un fils universitaire ont été tués dans l'œuf ! ».
Parmi les dossiers qui attendent le nouveau président de la Confédération, l'amélioration de l'accès aux soins sera sans doute un des plus brûlants. La CSMF portera la mise en place d'un complément emploi/retraite, l'exercice multisite et l’ouverture massive des stages d'internes et d'assistants partagés en libéral. La centrale polycatégorielle entend aussi promouvoir la création de consultations d'observance et de prévention. Sur tous ces sujets, ce féru de voile, attaché à la baie de Somme et parfois qualifié de « peu disruptif », devrait garder le cap défini par son prédécesseur.
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