Devant une centaine de cadres de la CSMF, réunis jusqu'à dimanche à Antibes pour la 28e Université d'été du syndicat, le ministre de la Santé et de la Prévention François Braun a fixé le cap de la prochaine convention médicale, en annonçant notamment une simplification du dispositif de l'assistant médical et des aides à l'installation pour les médecins.
Priorités et lignes rouges
En préambule, le Dr Franck Devulder, président depuis six mois de la centrale confédérale, avait énoncé les revendications de la Conf' – hiérarchisation et valorisation des consultations, déploiement des assistants médicaux, lancement des équipes de soins primaires et spécialisés, etc. – mais aussi ses lignes rouges, dont la coercition à l'installation ou la stagnation du tarif de l'acte.
Venu sur place et applaudi à plusieurs reprises par cette assemblée de libéraux, le ministre de la Santé a toutefois exhorté les médecins à « passer à la vitesse supérieure », notamment pour relever le défi de l'accès aux soins et des besoins de santé. « Nous ne devons plus fermer les yeux devant le malaise qui parcourt notre système de santé tout entier », a lancé François Braun, attaché à « la confiance et la responsabilité ». « Notre but de guerre, il est clair : c’est de répondre aux besoins de santé, de toutes les Françaises, de tous les Français, peu importe où ils habitent, leurs revenus, leur situation sociale. C’est un objectif non négociable », a continué le successeur d'Olivier Véran. Il a apostrophé à plusieurs reprises les libéraux de la CSMF – « ma démarche c'est de parier sur vous » ; « ça dépend de vous » ; « je sais que vous serez au rendez-vous ».
Obligation de résultat
Le ministre, ex-chef du pôle des urgences du CHR de Metz Thionville il y a quelques mois encore, a ensuite détaillé les « échéances structurantes » des mois à venir – le PLFSS 2023, les négociations de la convention médicale début octobre et le volet santé du conseil national de la refondation (CNR) voulu par le président de la République, qui se nourriront les uns des autres. La méthode, toute macronienne, sera celle de la concertation, du pragmatisme et des territoires, a martelé François Braun.
Mais la confiance n'empêche pas l'exigence de résultat. La priorité absolue sera de lutter contre les inégalités d'accès à la santé, avec pour objectif « un médecin traitant pour chaque Français », et notamment pour les patients en ALD, a insisté François Braun, en excluant formellement l'obligation d'installation.
Généralistes : quatrième année d'internat fléchée dans les déserts?
Le ministère mise d'abord sur les aides à l'installation, qui seront simplifiées, dans une logique de guichet unique (quatre contrats d'aides existent actuellement, NDLR). Pour autant, « il faudra des résultats », a répété le ministre. « Il nous faudra aussi prévoir des solutions pour les territoires où rien ne se passe, nous ne pouvons pas abandonner nos concitoyens », a-t-il souligné.
La mise en place de la quatrième année de médecine générale a également été évoquée très brièvement à cette occasion, d'autant que le président de la République avait exprimé pendant sa campagne son souhait que ces semestres supplémentaires s'effectuent en priorité dans les déserts médicaux. « Je souhaite que nous puissions avancer en concertation avec les internes et les enseignants», a avancé le ministre. Le sujet devrait se retrouver dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2023), ce qui risque d'ouvrir un front avec les juniors. François Braun a également fait allusion à une lettre de mission adressée avec sa collègue de l'Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, à quatre praticiens chargés de mener la concertation sur le projet d'ici à la fin de l'année.
« Compte tenu de la démographie médicale et de la répartition des professionnels sur le territoire, cette année de consolidation aura vocation à se dérouler en priorité en zone sous-dense, écrivent les ministres dans la lettre consultée par l'AFP. L’ajout de cette phase de consolidation au diplôme d’études spécialisées de médecine générale, qui serait exercée exclusivement en pratique ambulatoire, viserait à compléter la formation, ainsi alignée sur les autres diplômes d’études spécialisées».
Remplir les tableaux de garde
Concernant la permanence des soins, autre priorité, le ministre a pris les devants, toujours avec la même méthode : soit les professionnels s'organisent entre eux « en veillant à remplir tout le tableau de garde, en offrant un accès à des soins non programmés sur tout le territoire, en soirée et le week-end », soit ils ne le font pas et « il faudra prévoir une organisation ». « Le gouvernement prendra ses responsabilités : on ne peut plus tergiverser lorsqu’il s’agit de l’accès aux soins. Les médecins, hospitaliers comme libéraux, ont une responsabilité en matière d’accès aux soins et elle doit s’exercer collectivement », a justifié l'ex urgentiste. François Braun a cependant rassuré l'assistance en glissant que « tout le monde sait, les appels après minuit relèvent du conseil médical ou de l'urgence qui conduit à l'hôpital ». Confirmation implicite que la permanence des soins ambulatoire peut s'arrêter à minuit, ce qui lui a valu des applaudissements.
Si le « déploiement du SAS » doit être accéléré, le locataire de Ségur n'a toutefois pas tranché clairement la pérennisation de la majoration de 15 euros sur les soins non programmés régulés (dont un bilan doit être réalisé), une demande forte de la profession.
Patientèle à étendre
L'autre priorité sera de libérer du temps médical, par le biais principalement des assistants médicaux qui permettent aux médecins d’augmenter de 10 % en moyenne leur patientèle. Les règles seront simplifiées pour passer la vitesse supérieure. « Il faut qu’il y en ait partout, et prioritairement dans les zones sous denses, y compris pour les médecins isolés », a annoncé le ministre. Au passage, il a redit le travail engagé avec le soutien des Ordres « sur le transfert de tâches et les délégations de compétences aux autres professionnels de santé ».
Pour autant, le ministre entend les interrogations des médecins sur la rémunération. « Même si nous cherchons à diversifier les modes de rémunération, nous n’allons pas revenir sur la place centrale de la rémunération à l’acte, qui fonctionne et à laquelle je sais que vous êtes très attachés », a conclu le ministre de la Santé, avant d'inviter dans une métaphore rugbystique les médecins « à reprendre le ballon au bond »
Le retour à l’hôpital d’une généraliste après 25 ans de libéral
AP-HP, doyens, libéraux : pourquoi le secteur médical quitte X (ex-Twitter) au profit de Bluesky ?
Nouvelles missions infirmières : les médecins sur leurs gardes
La MSA mise déjà sur les délégations