« C'est une décision irrévocable », en désaccord avec la mairie, six médecins d'Auvers-sur-Oise claquent la porte de la MSP

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Publié le 09/06/2022

Crédit photo : DR

« Le corps médical ne doit pas se laisser parler comme cela par les administrations. Ils n'ont pas à nous dire comment tenir nos consultations ou quels actes nous devons faire rapidement. En tout cas, c'est une décision irrévocable », annonce au « Quotidien » le Dr Yann Hérault, praticien de la maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) d'Auvers-sur-Oise dans le Val d'Oise, située dans une zone d'intervention prioritaire (ZIP). Avec les cinq autres médecins généralistes, âgés de 32 ans à 60 ans, ils ont décidé de quitter « dès que possible » la structure « en fonction des opportunités ».

En cause, un profond « désaccord » avec la municipalité. En effet, cette dernière a décidé de ne pas renouveler la convention d’occupation de la maison de santé, ouverte en 2017 et mise gratuitement à la disposition des professionnels de santé libéraux (médecins, infirmiers, kinés et sage-femme). Ce bail devait durer six ans, jusqu'en 2023, avec tacite reconduction.

Contactée par « Le Quotidien », la municipalité a transmis un communiqué signé par la maire (DVD), Isabelle Mézières pour expliquer sa décision. « En raison de nombreux mécontentements de la part des patients qui éprouvent des difficultés à avoir de rendez-vous ou à trouver un médecin référent, la municipalité a souhaité rencontrer l'équipe médicale et paramédicale sur les améliorations possibles », peut-on lire. Malheureusement, poursuit le communiqué, « un seul médecin sur six s'était déplacé ». Et après avoir formulé des « inquiétudes » par écrit aux médecins et sans réponse de leur part, la mairie s'est vue « contrainte » de dénoncer cette convention. Toujours dans ce texte, la ville se dit aussi surprise par la décision des médecins de vouloir quitter la ville alors que « la convention les engage jusqu'en 2023 ».

Pas la même vision des soins

Selon le Dr Hérault, ce n'était pas une proposition de « réunion » mais une « convocation » avec une date imposée que les médecins avaient reçue. Pour cette raison, seul le médecin gérant s'était déplacé pour « nous représenter » et « c'était suffisant ». Par ailleurs, ajoute le médecin, « cela s'était très mal passé ». « On ne nous avait pas demandé si nous avions des difficultés mais on nous a simplement dit que nous ne faisions pas notre travail. Puis la mairie a annoncé sa décision de ne pas renouveler le bail. Alors nous prenons acte cette décision », ajoute-t-il.

Pour le généraliste qui était à l'initiative en 2017 de la création de cette maison de santé, « la mairie n'a pas les mêmes objectifs de soins que nous. Elle veut du quantitatif, elle veut que tous les auversois soient pris en charge. Or nous ne pouvons pas le faire. Nous ne sommes pas juste des machines à se déclarer médecins traitants ». « De quel droit une municipalité peut mettre la pression sur les libéraux comme si nous étions des salariés ? », dénonce-t-il.

Pour informer la population de leur décision, les médecins ont publié un long texte placardé dans la salle d'attente. « La municipalité prétend vouloir influer sur notre activité de médecine libérale en décidant du choix de notre patientèle, en nous imposant une quotité de travail, allant jusqu’à nous conseiller dans nos prises en charge médicales, l’organisation et le déroulé de nos consultations », peut-on lire sur l'affiche.

Affaire incompréhensible

En tout cas, pour le Dr Bijane Oroudji, représentant départemental de MG France, « cette affaire est incompréhensible ». « La méthode a été brutale. Visiblement, la mairie ne comprend pas que nous ne pouvons pas satisfaire toutes les demandes », répond-il au « Quotidien ». Le généraliste à Saint-Ouen l'Aumône explique que son syndicat est prêt à apporter tout son « soutien politique » aux médecins en conflit avec la muncipalité.

Pour l'heure, les médecins ont déjà reçu plus d'une « quinzaine propositions » pour exercer ailleurs. De son côté, la mairie d'Auvers-sur-Oise se retrouve dans la panade. Après avoir pris « les avis des autorités sanitaires de tutelle », elle est en train « de rechercher des médecins généralistes en statut libéral ou salarié ». La ville envisage même d'investir dans un cabinet de téléconsultations et de « mettre à la disposition d'un agent municipal pour mieux faciliter l'accès aux prises de rendez-vous » et orienter les patients pour la téléconsultation.


Source : lequotidiendumedecin.fr