Quelles sont les facs les plus performantes ? Et quelles sont celles qui ont la préférence des internes en médecine générale ? A quelques jours de la rentrée universitaire, et alors que le traditionnel amphi de garnison a débuté hier jeudi, Le Généraliste publie pour la première fois le classement des résultats des UFR de médecine à l’Examen classant national (ECN) 2009, qui est aujourd’hui le seul indicateur de niveau entre facs. Nous nous sommes intéressés aussi au choix des futurs généralistes à l’issue de l’amphi de garnison de l’an passé. C’est plus la localisation que les différences pédagogiques qui semble guider les médecins de famille de demain.
Six facs parisiennes dans le groupe de tête, Grenoble en cinquième position, et des facultés de médecine du Sud de la France, comme Montpellier et Toulouse Purpan, qui se glissent juste avant le centre de l’Hexagone, représenté par Clermont-Ferrand. Ce classement 2009 des facs de médecine que nous publions cette semaine a été établi sur la base des statistiques de l’Association nationale des étudiants en médecine (Anemf). Dans ce palmarès, Reims, Besançon et Paris Bobigny, ferment le banc. Les critères qui ont présidé à ce classement ? Les performances des facs à l’examen classant national (ECN), le nouvel internat pour tous mis en place en 2004. Un parisiano-centrisme affirmé donc, doublé d’un relatif héliocentrisme caractérise les performances des facs de médecine aux ECN. Ainsi, Paris 6 et Paris 5 drainent respectivement 17,6% et 16,4% des étudiants en médecine classés dans les 500 premiers au concours. Et si l’on se base sur les 2 000 premiers, c’est la fac de Paris Ouest qui remporte la palme avec plus de la moitié des candidats.
Pour autant, l’Ile de France est loin d’être la seule région à pouvoir s’enorgueillir de l’excellence de ses internes. Les facs d’Angers, de Marseille, de Strasbourg accueillent plus d’un interne sur dix à avoir été classé dans les 500 premiers au concours des ECN. Mauvais résultat en revanche, sur ces mêmes critères, pour Besançon, Paris-Bobigny, Caen et Saint Etienne, qui compteront dans leur rang, moins de 3% des futurs spécialistes classés dans les cinq cents premiers cette année.
Sur le papier, les ECN, ce concours national instauré en 2004 est aujourd’hui le seul critère permettant de se faire une idée du niveau respectif des différentes facs de médecine les unes par rapport aux autres. Et de ce point de vue, les bons résultats des franciliennes sont peut-être à relier à des moyens (en termes de nombre d’enseignants ou de qualité de la recherche par exemple) plus conséquents qu’ailleurs, à la présence de formations privées plus nombreuses qu’en province et peut-être à l’origine sociale plus favorisée des étudiants. Enfin, la préparation même des étudiants au concours des ECN, qui varie d’une fac à l’autre, au sein d’une même région parfois peut aussi expliquer les différences. Le doyen de la faculté de Paris ouest, troisième fac de France cette année, à accueillir les étudiants classés dans les cinq cents premiers aux ECN, veut le croire, et explique ainsi les différences de classement entre les facs d’Ile de France : « Nous disposons, souvent grâce à des conventions avec des hôpitaux non universitaires, d’une gamme importante de services formateurs et pas trop spécialisés, où les étudiants rencontrent la pathologie la plus courante. Ensuite, un gros effort a porté sur la compréhension des matières de base en P2 et D1, notamment sur l’ensemble anatomie-physiologie-sémiologie et nous n’hésitons pas à faire redoubler les étudiants qui n’ont pas acquis ces fondations nécessaires pour la suite », développe ainsi le Pr Alain Baglin (voir interview en page suivante ). Et si, dans cette fac de l’ouest parisien « l’objectif primaire n’est pas la réussite à l’ECN, on constate que les bons sont ceux qui réussissent le mieux à l’examen classant national »…
Seul critère différenciant aujourd’hui, les ECN sont-elles l’alpha et l’omega du classement des étudiants en médecine et donc des facultés qui les forment? Certains en doutent. « En fait, nous réalisons ce classement chaque année depuis la création des ECN en 2004. Mais jusqu'à maintenant, ce document n’avait pas vocation à être publié, l’Anemf s’en servait comme base de travail interne, » explique ainsi la présidente de l’association. Pourquoi cette discrétion ? Par crainte de semer la zizanie au sein du monde universitaire ? « Non, même s’il est vrai que d’une année sur l’autre certains doyens jouent de la renommée de leur établissement quand il est bien classé. Mais c’est surtout que ce classement n’est pas un instrument qui mesure véritablement la qualité de l’enseignement qui est dispensé dans les facs, mais le niveau des étudiants qui les composent », ajoute Chloé Loyez.
Pour autant, l’ECN reste un baromètre pour nombre de responsables universitaires, de l’aveu même du président de la Conférence des Doyens : « Il faut bien reconnaître que, depuis la création des ECN, ce classement est le seul outil qui existe pour apprécier les résultats des facultés. Et, quand vous êtes responsable d’une université en tant que doyen d’une faculté de médecine, vous ne pouvez pas vous empêcher de regarder le classement de votre fac par rapport à celui des autres », relève le Pr Patrice Deteix. « Mais il convient d’apporter quelques bémols à ce constat », poursuit celui qui est par ailleurs également doyen de la fac de Clermont-Ferrand, (dixième position dans le classement que nous publions). Dans le collimateur du Pr Deteix ? « une partie de la méthode d’évaluation des étudiants au cours des ECN », un examen, qui, en substance, privilégierait trop le « bachotage », au détriment de la réflexion médicale pertinente. Ce diagnostic, ils sont plusieurs à le porter : le doyen de la Faculté de Paris Ouest, d’une part, (voir notre entretien avec le Pr Alain Baglin), les étudiants de l’Anemf aussi. « Lorsqu’on analyse un dossier clinique, il nous faut présenter dix points au jury. Il est du coup assez fréquent qu’on liste tout ce qu’on sait sur le sujet, comme ça, on est à peut près sûr de couvrir l’ensemble des points attendus », souligne ainsi la présidente de l’Anemf.
Dans ce contexte, une commission de réflexion pédagogique, pilotée par le président de la conférence des doyens, réfléchit à la meilleure façon de gommer ces effets pervers. Mais les étudiants ne devraient pas en voir la traduction concrète » avant trois ou quatre ans ». Car l’affaire est complexe. « Attention, alerte de son côté, le président de l’Isnar-Img, à ne pas oublier qu’il s’agit d’un concours, à l’issue duquel on choisit sa fac. La notation lors de l’ECN reste à notre sens le moins mauvais système. Bien sûr qu’il y a une partie de bachotage, mais au moins, le résultat repose sur des critères réellement objectifs », estime ainsi Bastien Balouet.