Conséquence de l’émergence de bactéries résistantes, les infections respiratoires et l’optimisation de l’antibiothérapie ont été largement abordées lors du récent congrès de l’European Respiratory Society. Une édition viennoise également riche en communications sur le tabac et la cancérologie.
Qu'il s'agisse des exacerbations de BPCO ou de la toujours active tuberculose, le développement des résistances bactériennes a remis les infections respiratoires sur le devant de la scène. Avec une volonté nette d’affiner les critères guidant le choix optimal de la stratégie thérapeutique.
Concernant les exacerbations de BPCO, on estime, aujourd’hui, qu’elles sont traitées de façon abusive par
les antibiotiques, seulement 40 % étant d’origine bactérienne, les autres étant virales (40 % en ambulatoire) ou non infectieuses.
Exacerbation de BPCO : les critères d’Anthonisen dépassés
Les critères d'Anthonisen (majoration de la dyspnée et augmentation du volume et de la purulence de l'expectoration) guidant la prescription d'antibiotiques ont été reconduits par les recommandations de l'ERS 2011. L'antibiothérapie est ainsi réservée au type I (tous les critères présents) et au type II (2 critères sur 3) à condition que la purulence soit présente. Mais pour le Dr Marc Miravitlles (Barcelone), « ces critères semblent quelque peu dépassés. Dans le type I, seules 25 à 30 % des cultures sont positives ». Et, finalement, « aucun signe clinique ne permet de trancher significativement entre origine bactérienne ou virale, la purulence restant l'élément le plus pertinent ». La couleur de l'expectoration serait corrélée à la charge bactérienne, le jaune et le vert étant plus prédictifs d'une bactérie potentiellement pathogène que l'augmentation de la dyspnée; mais elle n'indique pas nécessairement le besoin d'antibiotiques, d'où la recherche de marqueurs plus sophistiqués.
On avait misé sur la procalcitonine (PCT), une PCT ›0,25 ng/ml étant en faveur de la prescription d'antibiotiques. Mais une étude récente semble indiquer finalement que la CRP élevée (CRP cut-off à 40 mg/l) est un marqueur plus fiable, et que l'antibiothérapie est bénéfique dans ce cas, même si la PCT reste basse. « Au final, des critères d'Anthonisen, on ne garde que la purulence et on y associe la CRP. »
À l’avenir, « l’idéal serait de traiter les patients en fonction de leur phénotype, pour la prescription d'antibiotiques mais aussi celle de corticoïdes », explique Gernot Rohde (Maastricht). Certains marqueurs pourraient aider à distinguer phénotype bactérien, viral, éosinophile ou pauci-inflammatoire. Parmi les plus prometteurs en faveur d'un traitement par corticostéroïdes des exacerbations, l'éosinophilie sanguine.
Lueurs d’espoir dans la tuberculose
L’optimisation de l’antibiothérapie est aussi de mise dans la tuberculose afin, là encore, de contrer l’augmentation des résistances aux anti-tuberculeux. Celle-ci est liée en grande partie au manque d'accès aux tests diagnostiques et aux protocoles thérapeutiques adaptés en particulier dans les pays émergents. «?Un grand pas a toutefois été fait avec la technique PCR Xpert MTB/RIF, se félicite Gerhard Walzl (Afrique du Sud). Rapide (résultats en deux heures) et fiable, ce test a une sensibilité et une spécificité excellentes proches de 100 % pour le diagnostic mais aussi pour l'évaluation de la résistance à la rifampicine de la tuberculose pulmonaire?». Il doit toujours être associé au diagnostic classique pour confirmation.
Sur le plan thérapeutique, de nombreux traitements anti-tuberculeux sont dans le pipeline. Une étude de phase II portant sur 85 patients vient de prouver l'efficacité d'une nouvelle combinaison thérapeutique associant PA-824, moxifloxacine et pyrazinamide. Bien tolérée, celle-ci éliminerait 99 % des bacilles en 2 semaines. Surtout, elle pourrait permettre de traiter à la fois tuberculoses résistantes et non-résistantes.
Pour toutes les molécules il reste toutefois indispensable de trouver de nouveaux biomarqueurs pour accélérer l'évaluation clinique de leur impact, que ce soit pour la réponse précoce ou tardive, la guérison ou le risque de rechute. Même problématique pour développer des vaccins plus efficaces que le BCG, avec des candidats très nombreux mais dont la plupart sont encore en phase I/II.
La vitamine D comme traitement adjuvant ?
Autre piste d’optimisation thérapeutique, plutôt inédite dans la tuberculose : l’amélioration du statut en vitamine D des patients tuberculeux. Les niveaux de vitamine D sont, en effet, significativement plus bas dans la tuberculose active suggérant qu’une carence pourrait en influencer le développement. à l’inverse, la supplémentation améliore le pronostic de la maladie.
Le rôle de la vitamine D dans la défense immunitaire est aussi attesté dans les pneumopathies communautaires où le niveau de vitamine D serait un facteur prédictif indépendant de la mortalité à
30 jours. Dans ce contexte, le Pr V. Walker (Los Angeles) s'inquiète de la résurgence des insuffisances en vitamine D chez les enfants, les récentes études?épidémiologiques ayant montré une corrélation nette avec l'augmentation de l'incidence des infections respiratoires chez l'enfant, en particulier dans les infections respiratoires liées aux virus. Même si on ne connaît pas exactement les mécanismes en cause, « la supplémentation en vitamine D pourrait constituer une thérapeutique adjuvante intéressante en pédiatrie », conclut-il.