« Le temps de l’autisme est arrivé » a déclaré le Premier ministre Édouard Philippe le 6 avril lors du lancement de la stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement (TND), 2018-2022.
La stratégie, aboutissement de neuf mois de concertation pilotés par Claire Compagnon, se décline en cinq engagements : promouvoir la recherche (14 millions d’euros), intervenir précocement (106 millions), mieux repérer et diagnostiquer les adultes (115 millions), améliorer la scolarisation (103 millions) et accompagner les familles (6 millions). Financée au total à hauteur de 344 millions d’euros, contre 205 pour le troisième plan autisme 2013-2017, elle a pour ambition d’aborder le parcours de vie des personnes avec TSA ou TND dans sa globalité.
« L’enjeu de cette concertation, qui fut un exercice de démocratie sanitaire, en réunissant tous les acteurs, y compris les personnes autistes, était de permettre de réinterroger le parcours de soins et de prise en charge sanitaire, mais aussi éducative, sociale, des enfants et des adultes avec TSA, en visant leur pleine participation dans la société », explique Claire Compagnon. Membre de l’Inspection générale des affaires sociales depuis 2015, elle avait évalué le troisième plan autisme avant de se voir confier la coordination de la concertation. Elle est depuis le 27 avril 2018 déléguée interministérielle à la stratégie.
Remobiliser généralistes et pédiatres
Aux côtés de Sophie Cluzel, l'ex-militante associative détaille les enjeux : « À la différence du 3e plan autisme axé sur le médico-social, la stratégie est plus large. Elle tient compte des enjeux de recherche, jusqu'ici insuffisamment abordés*. Nous souhaitons aussi faire évoluer les réponses sanitaires. Notre mesure phare à l’égard des enfants est de remobiliser les généralistes et les pédiatres autour du repérage de difficultés qui s’avéreront être des troubles du neuro-développement, afin de mettre en place des interventions précoces. Car l’on sait scientifiquement que plus on agit précocement, plus on diminue les risques de sur-handicap. »
« Pour les adultes, l’enjeu est de savoir où ils sont et quelles sont leurs difficultés, afin de mettre fin aux hospitalisations inadéquates ou aux séjours inadaptés dans les établissements de santé mentale et de renforcer leur autonomie et intégration sociale et professionnelle », détaille encore Claire Compagnon au « Quotidien ».
Interrogée sur la place de la psychanalyse, au cœur des débats lors de la publication des recommandations de 2012 de la Haute autorité de santé sur les interventions chez l’enfant (complétées début 2018 par des nouvelles recos sur le repérage/dépistage chez les enfants et l’accompagnement des adultes), elle explique : « nous revenons d’une longue histoire, mais les recommandations disent très clairement que ces interventions ne sont pas adaptées pour les autistes. Je ne dis pas qu’elles ne peuvent pas être utiles pour accompagner des familles ou fratries, mais ce sont d’autres méthodes dans le champ éducatif, rééducatif, sanitaire et social qui font consensus au niveau international pour les personnes avec TSA », affirme-t-elle.
Enfin, la stratégie entend rendre plus lisibles aux yeux des familles les dispositifs existants, par exemple, les plateformes de répit.
Six mois après son lancement, cette stratégie s’est dotée d’instances de gouvernance, avec la mise en place du comité de pilotage opérationnel réunissant l’ensemble des administrations et opérateurs du champ de l’autisme et des TND et la constitution d’un conseil national des TSA et des TND, où siègent associations, professionnels de la santé et du médico-social, personnes avec des TND et personnalités qualifiées. Cinq unités d’enseignements à l’école élémentaire sont expérimentées cette rentrée 2018. Et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019 devrait formaliser les financements pérennes des plateformes d’intervention précoces.
* Lire sur ce sujet le point de vue de la Pr Catherine Barthélémy, page 16
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