3 questions à Patrick Hassenteufel*

« Une influence non négligeable »

Publié le 10/01/2014
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Quel poids ont les organisations d’internes et de jeunes médecins sur l’exercice libéral ?

Ces syndicats de jeunes ont un poids important au moins sur deux dossiers. L’enjeu du secteur 2, d’abord, qui mobilise beaucoup les syndicats d’internes de spécialité, au moins depuis le début des années 1990. à l’époque, la question posée était celle de la réduction d’accès au secteur à honoraires libres qu’ils n’ont pas entièrement réussi à empêcher. Mais, depuis lors, ils n’ont cessé de peser sur ce dossier. L’autre question sur laquelle les jeunes médecins se mobilisent et ont indubitablement une influence est la défense de la liberté d’installation. Sur ces sujets, leur influence n’est pas négligeable, ne serait-ce que parce qu’ils ont une capacité de blocage des hôpitaux qui est un moyen de pression important.

Ces dernières années, les mouvements de grève des internes ont été nombreux, plus fréquents que ceux menés par leurs ainés. Comment expliquer cette capacité de mobilisation ?

Leur capacité de mobilisation est plus forte pour deux raisons essentielles. D’une part, il s’agit de groupes plus concentrés géographiquement dans les hôpitaux et particulièrement les hôpitaux universitaires, notamment parisiens, alors que les médecins libéraux sont par définition plus éclatés géographiquement. D’autre part, les internes sont plus fortement organisés collectivement : l’importance de leur taux de syndicalisation, supérieur à 50%, tient notamment au rôle de socialisation que jouent leurs organisations. Cela favorise évidemment la mobilisation. à ces deux raisons, on pourrait aussi ajouter la variable âge qui amplifie sans doute la contestation et, peut-être aussi, la variable perte de revenus qui joue a priori moins chez les internes.

Sur l’installation, un dispositif de régulation a été mis en place avec les infirmières libérales, pas avec les médecins libéraux. Peut-on expliquer cette différence de traitement par des capacités de mobilisation différentes chez les jeunes de ces deux professions ?

En tout cas, à l’évidence, les jeunes médecins pèsent beaucoup plus en termes de capacité de pression que les futures infirmières, qui ne semblent pas s’être beaucoup manifestées sur ce sujet. Et puis les internes se projettent probablement plus facilement dans le monde libéral que les jeunes infirmiers et infirmières, même si, ces dernières années, l’aspiration à l’exercice libéral semble moins forte chez les premiers. Cela semble d’ailleurs assez logique que les jeunes médecins soient moteurs sur ce thème, puisque – hormis lors de la réforme Bachelot – les mesures de restriction à l’installation envisagées portent sur ceux qui vont s’installer.

*Professeur de sciences politiques à l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines.

Source : lequotidiendumedecin.fr