DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA GLOMÉRULONÉPHRITE membranoproliférative (GNMP) progresse dans la moitié des cas vers l’insuffisance rénale, et peut récidiver après la transplantation rénale. Corticoïdes et immunosuppresseurs sont inefficaces ; la stratégie actuelle par perfusions ou échanges plasmatiques n’a pas bien été évaluée.
La GNMP primitive et d’autres glomérulopathies ont été liées à une activation incontrôlée de la voie alterne du complément, d’où réponse terminale cytotoxique. Une thérapie ciblant la voie alterne du complément pourrait donc être bénéfique. Aussi, la possibilité d’utiliser l’eculizumab (Soliris ; Alexion Pharmaceuticals), anticorps monoclonal dirigé contre la fraction C5 du complément, est à l’étude. Ce médicament est déjà approuvé pour le traitement de l’hémoglobinurie nocturne paroxystique et du syndrome hémolytique et urémique atypique.
Trois observations décrivent le succès de l’eculizumab chez 3 patientes atteintes de GNMP.
Patiente, 17 ans
Vivarelli et coll. (Rome, Italie) rapportent le cas d’une patiente de 17 ans atteinte de la maladie des dépôts denses (GNMP de type II) depuis sept ans : protéinurie, microhématurie, sclérose focale dans 40 % des glomérules ; fonction rénale et une TA normales ; présence du facteur néphritique C3, un auto-AC activant la voie alterne du complément. Sous éculizumab : baisse rapide de la protéinurie, disparition de l’hématurie. Biopsies rénales à 6 et 18 mois : réduction progressive de la prolifération mésangiale, de l’épaisseur des boucles capillaires glomérulaires, et des dépôts de C3 et de C5b-9 ; mais progression de la sclérose glomérulaire et une atrophie tubulaire. Interruption temporaire du traitement du 18e au 24e mois, d’où hausse de la protéinurie, qui s’abaisse à la reprise du traitement. Au 33e mois, la patiente se porte bien ; pas d’effet secondaire majeur. Les auteurs suggèrent donc de débuter précocement la thérapie par anticorps anti-C5, avant le développement de la sclérose.
Patiente, 22 ans
Daina et coll. (Bergamo, Italie) rapportent le cas d’une patiente de 22 ans atteinte de la maladie des dépôts denses. Histoire : syndrome néphrotique à 11 ans ; biopsie rénale : GNMP ; corticoïdes pendant cinq ans : inefficacité. À 16 ans, deuxième biopsie : il s’agit d’une GNMP de type II (maladie des dépôts denses). Le rituximab, éliminant les cellules B, diminue l’activité de C3, mais est sans effet sur la protéinurie et la créatinine sérique. À 22 ans, on constate un faible taux du C5 et un taux élevé du C5b-9 (complexe terminal du complément), et une homozygotie pour deux variants du facteur H associés à la maladie des dépôts denses. Traitement par eculizumab (induction à 900 mg par semaine pendant cinq semaines, puis entretien à 1 200 mg toutes les deux semaines). Avec un an de recul : normalisation de la protidémie, de la protéinurie et du taux plasmatique du C5b-9. Daina et coll., après avoir pris connaissance de deux autres cas de traitement par le Dr Richard Smith (Université d’Iowa), suggèrent qu’un taux sanguin élevé du C5b-9 pourrait prédire une réponse positive au traitement.
Patiente, 16 ans
Radhakrishnan et coll. (Hospital for Sick Children, Toronto) décrivent le cas d’une patiente de 16 ans ayant une GNMP de type I. Histoire : syndrome néphrotique (protéinurie élevée, hypoalbuminémie, œdèmes), anémie ; fonction rénale normale. Immunosuppresseurs : inefficacité et survenue d’une polyinfection bactérienne et virale (traitée avec succès) avec syndrome d’activation des macrophages. Puis insuffisance rénale, d’où hémodialyse.
On découvre une activation de la voie alterne du complément (C3 indécelable et taux élevé du C5b-9) et la présence du facteur néphritique C3. Perfusions et échanges plasmatiques sont sans effet sur l’anurie ; détresse respiratoire, hémorragie gastro-intestinale, convulsions. L’eculizumab produit une réponse spectaculaire : disparition des convulsions et normalisation de la fonction rénale dès la première perfusion ; normalisation de l’anémie et thrombopénie dès la seconde dose ; amélioration de la protéinurie et normalisation de l’hypoalbuminémie après la 6e dose.
Daina et coll., Vivarelli et coll. Radhakrishnan et coll., New England Journal of Medicine du 19 mars 2012, pp. 1161,1163 et 1165
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