Trois questions au Pr Bernard Cortet*

«Traquer et recenser les fractures à basse énergie »

Publié le 22/10/2010
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Quelle est la situation du dépistage de l'ostéoporose ?

La situation progresse. Les médecins pensent à l'ostéoporose en cas de fracture vertébrale. Pour les fractures du poignet, ce n'est pas si évident. Pourtant, les données épidémiologiques sont parlantes : les factures périphériques majeures, de la hanche ou de l'extrémité supérieure de l'humérus ou la survenue de plusieurs factures costales sont associées à une surmortalité. Il faut penser à demander une ostéodensitométrie dès qu'il y a une fracture rapportée. Mais, il faut composer avec l'oubli des patients qui ont souvent tendance à occulter une fracture. Les messages les plus clairs sont : toute fracture à basse énergie chez une personne de plus de 50 ans doit faire penser à une ostéoporose. Même si ce n'est pas le motif de consultation. Les chirurgiens n'ont pas tous encore intégré ce message mais la situation s'améliore dès qu'on les rencontre dans leur service. Le médecin traitant doit y penser dans les suites d'une chirurgie orthopédique pour traquer et recenser les fractures à basse énergie.

Comment améliorer la prise en charge ?

Il faudrait trouver un moyen d'inciter les médecins à prescrire davantage d'ostéodensitométrie quand cela se révèle utile car le nombre d'ostéodensitométrie a tendance à stagner. Les modalités de remboursement de l'ostéodensitométrie sont encore mal connues des médecins généralistes et jugées trop compliqués. Il est possible de télécharger un questionnaire sur le site du GRIO. Quand je pose cette question du FRAX en EPU, beaucoup de médecins généralistes ne le connaissent pas et c'est dommage. Frax a l'avantage de fournir une check-list avec des questions fermées qui permettent de faire point lors d'une consultation tout venant. Il est vrai que l'interprétation des chiffres de risque fracturaire est difficile mais il y a un accord consensuel sur des bornes d'intervention. Pour les fractures majeures, en dessous du seuil de 10 %, il n'y a pas lieu de traiter. Au-dessus, il est licite d'instaurer un traitement. Les nouvelles recommandations de prise en charge devraient être mises à disposition à la fin du 1er semestre 2011.

Quelles sont les nouveautés attendues ?

Le dénosumab (Prolia) va changer la donne thérapeutique. C'est un anticorps anti-RANK Ligand construit à partir d'un modèle physiopathologique (en effet ce système joue un rôle important au cours de l'ostéoporose mais aussi des ostéolyses malignes) . Il a montré une efficacité sur les fractures vertébrales et paravertébrales mais il n'y a pas d'études comparative versus biphosphonates. Son intérêt est l'absence d'accumulation osseuse, ce qui semble aller dans le sens d'une bonne sécurité d'emploi. Des données encore contradictoires montrent qu'un traitement prolongé au-delà de dix ans par les biphosphonates pourrait favoriser la survenue de fractures diaphysaires atypiques. La rémanence du produit fait parfois peur aux médecins. Le dénosumab sera injecté par voie sous-cutanée au moyen d'une auto-injection semestrielle

*Service de rhumatologie, CHU de Lille

Source : lequotidiendumedecin.fr