«Je ne souhaite pas répondre sur ce sujet....» «Je préfère ne pas en parler… » « Il me semble nécessaire de conserver une certaine retenue vis-à-vis de la douleur des familles… ». À Pouzauges, commune voisine de Montournais, où s’est déroulé le drame qui a conduit au décès de six personnes, la période est, on s’en doute, toujours douloureuse, dix jours après les faits. Deux généralistes de cette commune de quelque 5 000 habitants, ont catégoriquement refusé de commenter l’affaire. Logique, puisqu’outre l’émoi qu’a suscité le drame chez les habitants de la commune, ils ont aussi perdu leur médecin. Qui va désormais les soigner ?
Les généralistes de la commune bien sûr, même si, pour l’heure, il semble que les praticiens de Pouzauges aient adopté des positions différentes. Certains ne signeront pas de nouveaux contrats de médecin traitant, mais prendront, autant que possible, des patients du Dr Bécaud. En attendant, qui sait, la venue d’un nouveau médecin généraliste… Insistant sur le fait qu’il ne s’exprime « pas au nom de l’ensemble de mes confrères de la ville, le Dr Pascal Chiffoleau suggère seulement « qu’il serait temps de s’interroger sur le fait qu’il n’existe pas de droit du travail pour le médecin libéral ». Plus disert, son confrère le Dr Mathorel exprime sa stupeur et évoque la réorganisation des soins après le drame.
Dr Bruno Mathorel : "Il travaillait beaucoup, mais comme nous…"
D’abord nous avons tous été complètement surpris par ce qui s’est passé. Je n’étais pas présent à une réunion de médecins quelques jours avant le drame sur un projet de maison médicale. Mais le Dr Bécaud ne semblait pas souffrir d’épuisement professionnel particulier, certes, il travaillait beaucoup, mais comme nous tous.
Quand j’ai appris, lundi matin, ce qui s’était passé, cela a été la stupeur. Je le connaissais bien, notamment à travers les tours de garde. C’était un homme mesuré, gentil, on ne peut s’empêcher de se demander quel a été le facteur déclencheur essentiel pour déchaîner un tel orage psychiatrique.
Ma réaction personnelle, en tant que soignant : on voit bien que c’est un confrère à qui c’est arrivé et on se dit qu’on n’est peut-être pas à l’abri, nous sommes tous un peu débordés. Mais ces réflexions ne durent pas longtemps. En revanche, il faut répondre aux questions des patients du Dr Bécaud, qui viennent nous voir. Et la vérité c’est qu’on n’a pas de réponse pour expliquer un tel geste. Certains patients sont particulièrement choqués. Une de ses patientes est venue me voir avec sa fille, elles avaient consulté le Dr Bécaud la veille du drame, la fille ne veut absolument plus remettre les pieds dans ce cabinet, même si on trouve un remplaçant…
Que va-t-il maintenant se passer par la suite dans l’organisation des soins ? Pour l’instant, c’est l’inconnue la plus complète. Sur le terrain on s’organise tous. Parfois différemment. Moi par exemple je ne refuserai pas de signer un contrat de médecin traitant si un patient du Dr Bécaud me le demande, tout simplement parce que si, à l’issue d’une consultation, une intervention chirurgicale s’avère nécessaire, au moins le patient ne souffrira pas de complications financières. Quant à la permanence des soins, je pense qu’on aura une réunion pour se répartir les gardes 2010 du Dr Bécaud. S’il y a des volontaires, tant mieux, sinon on tirera au sort, je ne sais pas, mais je sais que ça se passera en bonne intelligence. De toute manière, cela ne représente pas un énorme surcroît de travail. Sur le canton, nous sommes de garde quatre week-ends par an et en semaine, une nuit toutes les trois semaines. Enfin, le maire de Montournais s’est démené, il aurait déjà trouvé un remplaçant prêt à s’installer, cela me surprend, mais nous verrons bien ».
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