C’est un des effets induits engendrés par la pandémie de Covid. La téléconsultation, jusqu'alors peu répandue en soins de ville, a pris véritablement son essor avec le premier confinement, à une époque où c'était presque devenu la seule possibilité pour les médecins libéraux de continuer à travailler un peu. Comme le télétravail avec le monde de l’entreprise, l'émergence d'actes en distanciel a bouleversé les codes relationnels du parcours de soins. Et, c’est la première surprise du chantier de data journalisme qu’a ouvert « Le Quotidien » : salariés télétravailleurs et patients téléconsultants se ressemblent finalement beaucoup. La téléconsultation se révélant dans notre enquête une pratique urbaine, concernant des populations plutôt cadres et plutôt jeunes aussi.
Pour déconcertant qu'il soit, ce constat ne paraît pas illogique : de tout temps, les catégories citadines, professions intellectuelles et nouvelles générations n'ont-elles pas été les premières à prendre le train de la modernité ? Découverte un peu gênante pourtant puisqu'elle infirme les idées reçues et remet en cause la croyance selon laquelle la e-santé serait la solution miracle pour venir au secours des déserts médicaux. En réalité, le recours au médecin par écran interposé est beaucoup plus fréquent en Gironde ou en région parisienne que dans la Creuse ou l’Aveyron, départements ruraux dans lesquels cette pratique reste confidentielle. Notre enquête suggère donc en creux qu’il faudra, pour les zones sous-denses, réorganiser le dispositif pour qu’il s’adapte aux plus âgés et aux malades chroniques. Côté soignants, cela suppose non seulement le déploiement de la fibre mais aussi celui des coopérations interpros. Côté patients, un travail de fond est indispensable pour faire reculer un illectronisme, qui touche les vieux, les pauvres et les populations isolées.
L’autre enseignement du travail statistique réalisé par nos fins limiers est que ce mode d'exercice convient visiblement davantage à certaines disciplines qu’à d’autres. Si les psychiatres et les cardiologues ont investi massivement cette nouvelle façon de travailler, les généralistes s’y sont convertis, tout en retrouvant une pratique plus traditionnelle après le boum de 2020, quand d’autres spécialités campent encore sur le tout présentiel. Alors pourquoi maintenir aujourd’hui une limitation à 20 % des actes qui gêne le développement de cette dynamique dans certaines disciplines ? À l’évidence, ce sera un des sujets qui faudra aborder lors des prochaines négociations conventionnelles. Pas le seul. Car pas question non plus de libéraliser à tous crins : l'encadrement du dispositif reste indispensable si l’on ne veut pas laisser le champ libre aux opportunistes et aux plateformes, avec le risque de remettre en cause le parcours de soins. D'aucuns pointent aussi du doigt certaines dérives consuméristes, avec des arrêts de travail de complaisance plus souvent accordés sur le marché du distanciel. Un argument de plus pour ne pas déréguler complètement.
Exergue : Il faut libéraliser cette pratique, mais pas trop non plus pour éviter des dérives consuméristes
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