C’est un revers pour la Haute Autorité de santé (HAS), qui met en lumière l’insuffisante protection de ses experts. Le Conseil d’État, dans une décision rendue le 29 juillet, rejette le pourvoi en cassation qu’elle avait formulé contre un jugement du tribunal administratif de Montreuil daté du 20 février 2024, qui lui enjoignait de communiquer la liste des membres du groupe de travail participant à l’élaboration de recommandations sensibles : celles portant sur la transition de genre. Celles-ci ont été publiées le 18 juillet.
Lors de leur élaboration dès le printemps 2023, l’association Juristes pour l’enfance avait en effet demandé à la HAS de lui communiquer la composition du groupe de travail. Face au refus de l’agence sanitaire dont le règlement interne garantit la confidentialité des experts, médecins comme patients, jusqu’à la publication des recommandations, l’association avait saisi le tribunal de Montreuil, qui était allé en son sens, au nom du droit d’accès aux documents administratifs. La HAS s’était alors pourvue en cassation contre ce jugement, au motif que la divulgation des noms et qualités des experts pouvait porter atteinte à leur sécurité et à leur vie privée. Pour rappel, les recommandations sur la transition de genre ont été élaborées dans un climat particulièrement tendu, marqué par la fuite d’un document de travail confidentiel et surtout la divulgation dans la presse de l’identité et attributions de certains des membres de ce groupe de travail, ce qui a conduit la HAS à déposer une plainte contre X pour violation du secret professionnel et mise en danger de la vie d’autrui ou atteinte à l’intégrité physique par diffusion d’information.
Défense de l’indépendance de l’expertise
Dans un premier temps, le Conseil d’État a accordé à la HAS un sursis à exécution du jugement, ce qui lui a permis d’attendre la publication des recommandations pour dévoiler la composition du groupe de travail. Mais dans cette décision du 29 juillet, que le Quotidien s’est procurée, les magistrats administratifs considèrent que la HAS n’est pas fondée à demander l’annulation du jugement du tribunal de Montreuil. Plus précisément, ils n’ont pas considéré, comme le soutenait la HAS, que le document fixant la liste du groupe de travail avait un caractère préparatoire (ce qui, selon le Code des relations entre le public et l’administration, le rend incommunicable) ; ni que les noms et qualités des membres étaient couverts par le secret de la vie privée ; ni même que leur divulgation exposerait les personnes à un risque pour leur sécurité.
« La HAS prend acte de cette décision qui souligne toutefois que les textes actuels, sur lesquels le juge s’est fondé, ne garantissent pas suffisamment la protection des experts participant à l’expertise en santé », réagit l’agence dans un communiqué. « Les récentes pressions subies par ces derniers dans le cadre de l’élaboration des recommandations sur la transition de genre rappellent pourtant à quel point ce principe est essentiel pour garantir la sérénité de ces travaux ainsi que leur qualité. »
Aussi la HAS appelle-t-elle à modifier le cadre législatif afin de renforcer la protection des experts pendant la durée des travaux, et de garantir l’indépendance de l’expertise. Une démarche qu’elle entend porter au sommet et que le président de la HAS, le Pr Lionel Collet, avait annoncée dans nos colonnes dès mai 2024. Si le Conseil d’État ne casse pas le jugement, « nous devrons réfléchir avec les pouvoirs publics à des textes qui permettent de protéger les experts. La voie serait législative », avait-il indiqué. Le temps presse, puisque de nouveaux travaux devraient débuter en 2026 sur la prise en charge des mineurs transgenres. Juristes pour l’enfance a d’ores et déjà prévenu qu’elle demandera à la HAS de communiquer la composition des groupes de travail.
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