« Je suis totalement écœuré par la situation. On cherche des médecins partout et, tous les jours au marché, les gens demandent à ma femme quand ils pourront enfin prendre rendez-vous dans mon cabinet », s’exclame le Dr Michel Daunay, médecin généraliste à la retraite depuis 2015 à Châtres-sur-Cher en Loir-et-Cher. Toujours inscrit à l’Ordre, il continue à donner des consultations de manière informelle à sa famille et ses voisins. Et depuis bientôt un an, il tente de reprendre son activité à mi-temps. Lancé dans ce qui s'apparente à un parcours du combattant, le généraliste pourrait finir par rendre les armes.
Le 13 juin 2024, il écrivait au conseil régional de l’Ordre pour faire part de sa volonté de reprendre du service, et de « prêter main-forte aux médecins de sa commune » face à la montée des déserts médicaux. Deux options avaient alors été évoquées : soit un engagement de remise à niveau, soit la réalisation d’un diplôme universitaire de médecine générale sur deux ans. Dans un courrier reçu par le Cnom le 8 avril 2025, la décision tombe : ce sera la seconde option. Le praticien « pourra exercer en autonomie sous la responsabilité d’un médecin généraliste MSU comme un étudiant SASPAS tout en mettant à jour ses connaissances en suivant un DU de médecine générale, si besoin en distanciel », écrit le médecin-expert mandaté par le Cnom dans un rapport consulté par Le Quotidien.
Une vérification de connaissance qui vire à la « mascarade »
Cette décision, le Dr Daunay a du mal à la digérer, d’autant plus qu’elle a été prise à l’issue d’une réunion de vérification des acquis qu’il qualifie de « mascarade où aucune question médicale ne lui a été posée ». Son médecin référent lors du test de contrôle des connaissances estime dans son rapport avoir assisté « non pas une expertise, mais a une plaidoirie diligentée et pliée d’avance ». Une décision d’autant plus humiliante pour l’omnipraticien qu’il était lui-même maître de stage. « C’est moi qui formais les internes ! », s’insurge-t-il.
Mon dernier espoir réside dans la décision de l’Ordre national le 4 juin prochain
Dr Michel Daunay
« Entre le 13 juin 2024, date à laquelle j’ai formulé ma demande, et aujourd’hui, cela fait un an qu’on me balade. Tous les jours, la presse parle des déserts médicaux, du manque de médecins. Et nous, dans le Loir-et-Cher, on est au ras des pâquerettes. C’est scandaleux ! ». Selon Michel Daunay, la situation devient critique dans son canton : « Cela va devenir une catastrophe ».
Selon l’atlas de la démographie médical en France 2025, la région Centre-Val de Loire dont fait partie le Loir-et-Cher fait partie des moins bien dotées - comptant 2,8 % des médecins français. Dans le département de Loir-et-Cher, ils sont 788 médecins contre 2 479 en Indre-et-Loire, département limitrophe avec une diminution de 4 % du nombre de médecins entre 2010 et 2025.
Dans son territoire, « nous ne sommes plus que quatre médecins, et encore… Dans le canton de Mennetou-sur-Cher, deux médecins de 64 ans et de 82 ans exercent… Et deux à Villefranche-sur-Cher l’un part à la retraite d’ici la fin de l’année, et une autre de 55 ans prévoit de quitter le secteur si aucun remplaçant n’est trouvé », précise l’ancien médecin. Le cœur de ce praticien balance entre deux options : jeter l’éponge face à cette décision qu’il juge incompréhensible et profondément injuste, ou continuer à faire le nécessaire. Son dernier espoir réside dans la décision de l’Ordre national le 4 juin prochain.
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