?Le projet de taxe inclus dans la loi « HPST », qui entre en discussion au Sénat mardi, va-t-il inciter les médecins qui refusent la FSE à s’y mettre ? Aujourd’hui, alors que huit généralistes sur dix pratiquent la télétransmission, une poignée d’irréductibles, le plus souvent dans les villes, Paris en tête, rechignent encore à télétransmettre leurs feuilles de soins. De nombreuses voix dans la profession estiment que la taxation risque de braquer les médecins. Et beaucoup ?réclament une meilleure rémunération des FSE.
L?e député du Bas-Rhin, Yves Bur, en demandant, dans le cadre du débat sur le projet de loi « HPST », de taxer les médecins qui se refuseraient à télétransmettre aurait-il inconsidérément mis le feu aux poudres ? On pourrait le penser, en tout cas à en juger par cette réaction spontanée d’un confrère du Loir-et-Cher : « c’est bien simple, si cette taxe est votée, je cesse tout de suite de télétransmettre » (lire témoignage). Reste qu’au-delà de la provoc’ du Dr Delamare, c’est bien le principe même de la mesure qui exaspère la profession.
Le Dr Martial Olivier-Koehret en tête. « Cette proposition est symptomatique du manque de considération à notre égard. Si les caisses veulent que tous les généralistes se mettent à la télétransmission, il faudrait déjà commencer par les y inciter avec un minimum de politesse ». Et le président de MG-France de citer son exemple personnel. « J’ai reçu, il y a trois semaines un courrier comminatoire de ma caisse primaire me disant qu’il fallait impérativement que je change mon lecteur pour qu’il puisse traiter la nouvelle génération de carte vitale ». Coût de l’appareil : deux cents euros. Echanges explicatifs et pédagogiques avec les services de la caisse d’assurance-maladie : zéro. Conclusion. « Avec cette manière de procéder, les généralistes ont le sentiment de devoir se plier à la politique du bâton ».
Chez les présidents du tout nouveau syndicat Union généraliste (fusion d’Espace Généraliste et
de la FMF-G), l’heure est aussi à l’irritation. « Nous ne comprenons vraiment pas pourquoi le gouvernement trouve utile d’agiter le chiffon rouge sur des sujets, finalement secondaires. Tout d’abord, près de 80 % des généralistes télétransmettent aujourd’hui », lâchent à l’unisson, les Dr Jean-Paul Hamon et Dr Claude Bronner. Et ce dernier d’enfoncer le clou, « le fait de vouloir jouer les gendarmes, en l’occurrence, risque surtout de fâcher celles et ceux qui seraient plutôt en faveur de la réforme. Est-ce vraiment nécessaire ? ».
Dix-neuf heures de travail par an et par généraliste
?Les statistiques leur donnent en partie raison. Sesame vitale est déjà employée par une très grande majorité de professionnels de santé, les généralistes se situant ici dans le trio de tête. Juste derrière les pharmaciens, et à quasi-parité avec les infirmières (voir histogramme). A titre indicatif, plus d’un milliard de feuilles de soins ont été transmises en 2008, par quelque 259 300 professionnels de santé. Qui ont dû y passer du temps. En effet, à l’occasion des dix ans d’existence de la carte vitale en 2008, une interne de médecine générale a disséqué, l’année dernière, dans le cadre de son mémoire de stage auprès du praticien et dans trois cabinets différents, « le temps imparti aux feuilles de soins électroniques dans une consultation de médecine générale ». Chronomètre à la main. Conclusion de la jeune femme : « la télétransmission occupe en moyenne 45 secondes. La rédaction manuelle d’une feuille de soins prend 20 secondes, l’impression d’une feuille de soins avec les mêmes logiciels prend moins de 30 secondes. On peut donc dire que la télétransmission prend au minimum 15 secondes
de plus à chaque consultation, ce qui représente sur 4 500 actes chaque année, près de dix-neuf heures de travail par an ».
A supposer que l’indemnisation de 0,07 euros par FSE soit consacrée à indemniser le temps passé, cela représenterait 16 euros par heure. Mais ce n’est pas le cas, puisque l’assurance-maladie considère que l’indemnisation sert au matériel (et à ses frais d’entretien) nécessaire à la création et à la télétransmission des FSE ; le temps médical perdu à ces manœuvres est donc un cadeau des praticiens à l’assurance-maladie, aux dépens des patients et des médecins.
? Cqfd », répond depuis Blois, le Dr Georges Delamare qui verrait d’un meilleur œil une plus juste rétribution des FSE. « Après tout, cet outil électronique entraîne un gain pour l’assurance-maladie ». « Mais c’est avant tout un gain pour les patients, rétorque pour sa part la directrice de la Cpam de Paris où le taux de praticiens qui télétransmettent est particulièrement
bas (50 %). Et il faut admettre que les services ?de Marie-Renée Babel n’ont pas ménagé leur ppeine pour convaincre et assister les récalcitrants (lire entretien).
Le Sénat reviendra-t-il sur la taxe Bur ?
?A l’évidence, tous n’ont pas bénéficié d’une même qualité de service. « Que les caisses commencent déjà à délivrer aux patients des cartes qui fonctionnent, et à les renouveler en temps », diagnostique le Dr Michhell Combier. Et avec vitale 2, qui comporte désormais une photo, une idée aussi d’Yves Bur en son temps, cela ne va pas faciliter les choses ». Pour autant le président de l’Unof est plutôt confiant. « La télétransmission est passée dans les mœurs. Depuis les grandes grèves du début des années 2000, les appels des cntrales syndicales au boycott ne sont pas très souvent suivis d’effets. Cela étant, il est vrai qu’il n’est pas trèss malin de la part des pouvoirs publics d’envisager une taxe de plus »… Il n’empêche, le Dr Combier veut croire que la suppression de cette disposition, qui fait partie des propositions d’amendements déposés tant par l’Unof que par le SML, sera retenue par les sénateurs. La Haute Assemblée se penche à son tour sur le projet de loi « Hôpital, Patients, Santé Territoire » à parti de mardi 12 mai.
Les sénateurs disposeront, en l’occurrence, d’un argumentaire déjà prêt pour éviter, tel qu’il est prévu dans le texte de loi, que le directeur de l’Uncam fixe, au 1er septembre 2009, le montant de la contribution forfaitaire pour les feuilles de soins papier. Selon vos syndicats « cette disposition est totalement inappropriée, sachant que la télétransmission est déjà la règle pour la nouvelle génération de médecins. Le spectre de la sanction est donc sans intérêt. Ce qui doit être encouragé, c’est l’informatisation des cabinets, en particulier le développement des logiciels médicaux. En la couplant à ne sanction, l’informatisattion es cabiinets médicaux risque de comporter une connotation négative ». Pour le Dr Vincnt Hélis, jeune générraliste installé dans les Deux-Sèvres, c’est maintenant chosefaite (lire témoignage). Malgré tout, comme 85 % de ses confrères libéraux, il entend continuer à télétransmettre ses FSE. Librement.