La goutte est associée à un risque de mortalité cardiovasculaire (CV) prématurée (HR 1.45) qui n’a pas changé depuis 40 ans. Cette mortalité CV accrue est liée aux comorbidités CV mais aussi à la goutte elle-même. Le surrisque est encore plus élevé chez des patients avec une goutte tophacée et mal contrôlée. Il est lié à l’inflammation de bas grade et à l’inflammation récidivante provoquée par des crises de goutte. Ainsi, la crise de goutte est associée de façon transitoire pendant 1 à 4 mois à un risque accru d’événements CV grave (MACE) (HR 1.93). Et ce, dès la première crise.
Le rôle de l’inflammation dans l’athérosclérose est étayé par plusieurs études cliniques randomisées et une méta-analyse récente montrant que les traitements anti-inflammatoires par colchicine, anti-interleukine (IL)-1 ou encore anti-IL6 diminuent les MACE (2). Ainsi, la colchicine à faible dose (0.5 mg/jour) chez des patients non goutteux avec maladies coronariennes stables ou instables (infarctus du myocarde récent datant de moins d’un mois) diminue le risque de MACE de 31 et 26 %.
Une prophylaxie de 6 mois préconisée par les recos
Alors qu’il existe un risque de crise de goutte lors de l’initiation du traitement hypouricémiant THU et que les recommandations nationales et européennes préconisent une prophylaxie pendant 6 mois, une étude du Lancet Rheumatology a cherché à évaluer dans quelle mesure la prescription de colchicine lors de l’initiation du traitement hypouricémiant (THU) diminuait le risque CV chez les patients goutteux.
Il s’agit d’une étude émulée rétrospective sur une base de données nationales britanniques de soins primaires qui est liée aux registres des hospitalisations et des mortalités. Les patients goutteux initiant un THU ont été inclus. L’incidence des événements CV graves (MACE) pendant les 6 mois suivant l’instauration du traitement a été comparée entre les patients initiant un THU sans prophylaxie et ceux prenant une prophylaxie par colchicine pendant au moins 3 semaines.
Le risque de MACE diminué de 18 %
99800 patients ont été inclus : 25.6 % de femmes, âge moyen 62.8 ans, 4.1 % avaient des antécédents de maladies CV et 16.1 % avaient une prophylaxie par colchicine. Les patients prenant une prophylaxie par colchicine avaient un risque d’événement CV plus bas que les ceux sans prophylaxie : taux d’événement CV de 28.8 pour 1000 personnes-année vs 35.3 pour 1000 personnes-année dans le groupe sans prophylaxie. Ainsi, la prophylaxie par colchicine lors du THU diminuait de 18 % le risque de MACE (HR 0.82 / IC95 % 0.69-0.94) par rapport à une initiation du THU sans prophylaxie. La durée moyenne de prophylaxie par colchicine était de 47.3 jours (DS 33.7). Le traitement par colchicine était bien toléré.
Ces données confirment l’effet cardioprotecteur de la colchicine chez des patients goutteux. Sa prescription lors de l’initiation du THU permet à la fois de réduire les crises inflammatoires et le risque CV. La durée optimale de la prophylaxie n’est pas connue.
(1) Cipolletta E et al. Cardiovascular events in patients with gout initiating urate-lowering therapy with or without colchicine for flare prophylaxis: a retrospective new-user cohort study using linked primary care, hospitalisation, and mortality data. Lancet Rheumatol. 2025 Mar;7(3):e197-e207. doi: 10.1016/S2665-9913(24)00248-0.
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