Le rapport bénéfice/risque du finastéride 1 mg dans l’alopécie androgénétique est défavorable, considère l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), marquant sa divergence avec l’Agence européenne du médicament (EMA), qui vient pourtant d’appeler à modifier les résumés des caractéristiques des produits (RCP) et les notices des médicaments contenant du finastéride et du dutastéride (qui appartient à la même classe pharmacologique).
À la demande de l’ANSM en septembre 2024, l’EMA a réévalué le rapport bénéfice/risque de ces médicaments. À savoir le finastéride 1 mg par voie orale et le finastéride 2,275 mg/mL en solution pour pulvérisation cutanée qui sont indiqués dans les stades peu évolués de l’alopécie androgénétique chez les hommes de 18 à 41 ans ; mais aussi le finastéride 5 mg ainsi que le dutastéride 0,5 mg, qui sont utilisés dans le traitement de l'hypertrophie bénigne de la prostate et la prévention de troubles urologiques associés.
À l’issue de cette réévaluation, le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l’EMA confirme que le finastéride (1 mg et 5 mg) est bien associé à un risque d’idées suicidaires et recommande de l’indiquer dans la rubrique effets indésirables pour tous les médicaments en contenant. Les laboratoires doivent ainsi modifier les RCP et les notices qui indiqueront aux patients qu’ils doivent consulter un médecin s’ils présentent des troubles sexuels avec une carte patient dans chaque boîte de finastéride 1 mg (rappel des risques et de la conduite à tenir). Les professionnels de santé recevront un courrier ce mois de septembre.
Même s'il n’a pas été possible d’établir un lien entre les pensées suicidaires et le dutastéride, sa notice comportera aussi, par mesure de précaution, des informations sur le risque possible de troubles de l’humeur, y compris des pensées suicidaires.
Mais selon l’ANSM, ces mesures ne vont pas assez loin. L’agence française ne partage pas l’une des conclusions de l’EMA, à savoir que le rapport bénéfice/risque de ces médicaments resterait favorable, sous réserve du renforcement de l’information. « Nous estimons que les mesures prévues au niveau européen ne suffisent pas à réduire efficacement le risque d’idées suicidaires », lit-on.
Interrompre le traitement en cas de changements de l’humeur
Aussi demande-t-elle aux médecins de surveiller les modifications de l’humeur ou l’apparition de troubles sexuels chez leur patient traité par finastéride, et d’interrompre le traitement s’il présente des changements de l’humeur, une humeur dépressive, une dépression ou des idées suicidaires. Plus largement, les professionnels de santé doivent réévaluer systématiquement la pertinence de la poursuite du traitement lors de chaque consultation de suivi et vérifier qu’il est bien toléré. A fortiori, lorsque le patient évoque l’apparition de troubles de la fonction sexuelle ou de tout autre effet indésirable. « Nous vous rappelons que ces troubles sexuels peuvent contribuer à des changements de l’humeur, y compris à des idées suicidaires », est-il souligné.
L’ANSM fonde sa position sur une expertise de pharmacovigilance conduite par le centre régional de pharmacovigilance de Limoges, qui porte sur 110 cas de troubles psychiatriques isolés ou associés à des troubles sexuels survenus en France entre le 1er janvier 1985 et le 31 mai 2024.
La majorité de ces jeunes patients (30 ans en médiane) avaient été traités par finastéride pendant près de 6 ans en moyenne. Les deux tiers (67,3 %) de ces cas étaient graves, dont 1 décès par suicide et 4 tentatives. Pour la moitié de ces patients (56 cas), les troubles psychiatriques ou sexuels n’étaient pas résolus au moment de la déclaration de l’effet indésirable, malgré l’arrêt du traitement. Sur ces 56 cas, la moitié présentait encore des troubles après environ 3 ans, et 25 % après plus de 8 ans. Depuis le 31 mai 2024 (fin de la période couverte par cette expertise), deux autres suicides ont été déclarés chez des personnes traitées pour alopécie avec ce médicament, malgré les actions d’information et de surveillance des effets indésirables menés depuis 2019. « Ces données nous renforcent dans notre conviction que le rapport bénéfice/risque du finastéride 1 mg dans l’alopécie androgénétique est défavorable », lit-on dans un communiqué.
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