Ils constituent le deuxième motif de consultation en service de neurologie, avec une prévalence d'1/1 000. Pourtant, les TNF restent encore particulièrement méconnus des praticiens œuvrant dans d'autres spécialités. Les choses pourraient cependant changer avec, à compter de cette rentrée universitaire, une formation élargie à l'ensemble des étudiants dès la deuxième année de médecine, alors que seuls les internes en neurologie et psychiatrie en bénéficiaient jusque-là.
« Cette pathologie est encore mal diagnostiquée alors qu'elle est plus fréquente que la SEP ou Parkinson. Alors que le retard diagnostique est aujourd'hui de sept ans, l'évolution de l'enseignement constitue donc une grande avancée qui, je l'espère, permettra aux patients d'être mieux orientés et donc plus rapidement pris en charge », se satisfait la Pr Béatrice Garcin*, neurologue à l’hôpital Avicenne de l'AP-HP, qui compte parmi les pionnières en France de la promotion d'une meilleure connaissance autour des TNF, qui concerne trois fois sur quatre une femme.
Selon le Vidal, « les TNF sont des symptômes neurologiques qui peuvent se manifester sous forme de crises non épileptiques psychogènes (Cnep) et/ou toucher les fonctions motrices (déficit moteur, tremblement, dystonie...), sensorielles (altération ou absence de sensation, cécité...) ou cognitives, alors qu'il n'y a pas de lésion identifiée au niveau du système nerveux ». Ainsi, les patients concernés passent parfois pour des simulateurs, ou relevant d'abord de la psychiatrie avant la neurologie.
« Les TNF n'étaient jusqu'ici pas enseignés correctement. Il y a encore aujourd'hui trop de mauvaises prises en charge par incompréhension », reconnaît la Pr Isabelle Laffont, présidente de la Conférence des doyennes et des doyens et cheffe du service de médecine physique et réadaptation (MPR) au CHU de Montpellier, une spécialité vers laquelle sont souvent orientés ces patients.
Des patients atypiques
Médecin dans son service, la Dr Claire Jourdan témoigne : « Il faut bien reconnaître que les patients atteints de TNF font peur à tout le monde. Ils mettent en échec les outils diagnostiques et thérapeutiques traditionnels et bousculent nos compréhensions de la neurologie. » Une formation en 2023 a changé son regard sur le sujet : « J'ai, depuis, fait évoluer ma pratique pour trouver les bons mots. J'utilise souvent la métaphore de l'ordinateur en expliquant au patient que le disque dur n'a pas de problème mais qu'il bugue parfois de façon inexpliquée. C'est cela, les TNF. »
Il y a encore aujourd'hui trop de mauvaises prises en charge par incompréhension
Pr Isabelle Laffont, cheffe du service de MPR au CHU de Montpellier
Parmi les incohérences observées, le patient va par exemple délimiter ses troubles sensitifs à l'exact milieu du corps. « Or, les limites sensitives se chevauchent de droite à gauche. Il y a donc un mélange entre les prédictions du cerveau et ce qu'il perçoit réellement », précise la Pr Garcin.
« La guérison est possible parce qu'il n'y a pas de lésion, pose-t-elle. Quand on explique bien le symptôme et rapidement, cela disparaît parfois complètement. Malheureusement, cela concerne encore une minorité de cas. La formation de l'ensemble des futurs médecins laisse espérer à l'avenir une réduction du temps d'errance thérapeutique, ce qui est crucial pour atteindre un meilleur taux de guérison. »
En grande partie non médicamenteux, les traitements contre les TNF passent en premier lieu par le dialogue. « Il faut parfois simplement détourner l'attention, détaille la neurologue. Dans le cas du tremblement fonctionnel, si on demande au patient de battre la mesure, il va la battre à un autre rythme que celui habituel ; s'il n'arrive pas à lever la jambe quand on lui demande, on se rend compte qu'il peut le faire quand on détourne son attention sur autre chose », abonde la Pr Garcin. Aux États-Unis, les coûts de soins de santé pour l'hospitalisation de ces patients dépassent le milliard de dollars.
*Coautrice de Troubles neurologiques fonctionnels, EMPR, Sauramps Médical, 32 euros, 2024
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