En Occitanie, « une consommation atypique de soins de dialyse » pointée par la chambre régionale des comptes

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Publié le 30/06/2025
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Un rapport de la chambre régionale des comptes d’Occitanie étrille le trop grand recours aux soins de dialyse dans l’est de cette région, où la Fondation Charles Mion-AIDER Santé capte près de la moitié de l’activité.

Crédit photo : S. TOUBON

Y a-t-il trop de patients dialysés en ex-Languedoc-Roussillon, dans l'est de la région Occitanie ? C'est ce que sous-entend, sans pour autant l'affirmer aussi clairement, la chambre régionale des comptes d'Occitanie dans un rapport publié vendredi 27 juin 2025.

« Si le recours aux soins de dialyse par habitant est un des plus importants de France métropolitaine, cette consommation importante n’est pas corrélée aux principaux facteurs de risque de la maladie. Ce surplus de consommation de soins est évalué par la chambre à environ 60 millions d'euros par an pour l’Assurance-maladie », écrivent les magistrats.

« En 2022, les départements du Gard (avec 113 séjours pour insuffisance rénale chronique / 1 000 habitants), de l’Hérault (112), des Pyrénées-Orientales (104) et de l’Aude (102) présentent des taux de recours très largement supérieurs à la moyenne nationale (77,6) ou même au taux de recours d’autres départements occitans. À̀ titre d’illustration, le taux de recours en Haute-Garonne est de 72 séances de dialyse pour 1 000 habitants alors même que l’incidence et la prévalence de l’IRCT sont proches de celles des autres départements occitans », poursuit la chambre régionale.

Le rapport cible l'activité de la Fondation Charles Mion-AIDER Santé, organisation à but non lucratif historiquement implantée dans la région qui assure 44 % des dialyses dans le territoire analysé pour la période 2019-2024. La chambre régionale pointe notamment une décorrélation entre la prévalence des maladies rénales chroniques dans la région, qui est équivalente à la moyenne française, et une « intensité des soins apportés parmi les plus fortes de France métropolitaine sans que pour autant le taux de mortalité en soit significativement impacté à la baisse ».

Le travail des soignants « en pâture »

Des accusations qui font bondir Anne-Valérie Boulet, directrice générale de la Fondation Charles Mion – AIDER Santé, interrogée par Le Quotidien. « La chambre régionale des comptes n'est pas plus épidémiologiste que nous. Seule l’agence de Biomédecine peut nous expliquer ces disparités. Y a-t-il plus de patients présentant des complications dans notre région que dans d'autres territoires ? Je n'en sais rien mais je peux vous garantir qu'on ne dialyse aucun patient qui n'en a pas besoin. On ne peut pas jeter ainsi en pâture le travail de soignants », s'emporte-t-elle.

Alors que les Sages occitans estiment que le rôle de la Fondation dans cette consommation « atypique », au même titre que celui de l’ensemble des autres acteurs de la dialyse en Languedoc-Roussillon, « pourrait utilement être évalué par les autorités sanitaires », Anne-Valérie Boulet affirme que les inspecteurs de l’Igas seraient « bienvenus car il s'agit de gens compétents qui savent, eux, de quoi ils parlent ».

Concernant la surconsommation de soins estimée à 60 millions d'euros dans la région, là encore, la Fondation se veut combative : « Nous réalisons 44 % des dialyses (1113 patients en 2023) pour un chiffre d'affaires de 57,3 millions d'euros. Cela veut dire que 50 % des personnes dialysées par nous et par d'autres, soit un millier de personnes, ne devraient pas l'être ? Restons sérieux ! »

Depuis quelques années, les activités des centres de dialyses sont régulièrement scrutées par les chambres territoriales. Deux rapports de la Cour des comptes, en 2015 et 2020, pointent par ailleurs le « coût excessif de la dialyse au détriment de l’Assurance-maladie ». En 2019, ce sont les dysfonctionnements d'une association qui avait été mise en exergue sur l'île de la Réunion. La semaine dernière, l’ARS Grand Est a fait état dans un rapport d'experts de dialyses abusives au sein de l’hôpital privé Nancy-Lorraine (groupe Elsan). Révélé par « Le Monde », le document indique que dans cette clinique, « la dialyse était justifiée dans seulement 16 cas sur 38 ».


Source : lequotidiendumedecin.fr