Des irrégularités, beaucoup d’opacité et des retards quasi systématiques dans le versement de leurs indemnités. C’est l’amer constat partagé par un très grand nombre de maîtres de stage universitaires (MSU) d’après un sondage réalisé par la Fédération des médecins de France (FMF) auprès de plus de 400 formateurs.
Alors que la quatrième année de l’internat de médecine générale doit entrer en vigueur à partir de novembre 2026, l’organisation syndicale a souhaité prendre le pouls auprès de ses adhérents sur les potentiels dysfonctionnements déjà à l’œuvre. Objectif : alerter les pouvoirs publics de la lassitude des généralistes enseignants et de leur désengagement croissant, avant qu’il ne soit trop tard.
Un MSU sur dix jamais rémunéré
La première question soulevée par le syndicat porte sur les retards et les difficultés rencontrées par les maîtres de stage universitaires (MSU) dans le versement de leurs émoluments. Près de 75 % des répondants affirment avoir déjà été confrontés à des dysfonctionnements lors du paiement. Pour 44 % d’entre eux, ces problèmes sont récurrents, tandis que seuls 12 % déclarent n’avoir jamais rencontré d’anomalie. « Ce chiffre, à lui seul, invalide tout discours rassurant », souligne la FMF, qui rappelle que beaucoup de MSU ne vérifient même pas, ou ignorent, qu’ils devraient percevoir une indemnité.

Les griefs recensés sont donc nombreux : 60 % mentionnent des retards importants dans le paiement, 31 % pointent la lourdeur administrative et l'absence de réponse claire de la part des facultés, et 10 % évoquent des montants inférieurs à ceux attendus.
Plus alarmant encore, 13 % assurent n’avoir jamais reçu la moindre rémunération, malgré l’accueil d’un ou plusieurs stagiaires. Des témoignages font état de mises en demeure adressées aux universités et de périodes de non-paiement dépassant parfois un an. « Je ne suis toujours pas rémunérée pour les stages depuis l’été 2023. Ce n’est plus un simple retard à ce stade », juge une médecin, loin d’être seule dans ce cas.

Les plus de 300 commentaires recueillis dans le sondage traduisent une profonde lassitude et un mal-être généralisé chez les MSU. « Qu’ils exercent en métropole ou en outre-mer, les MSU décrivent un système dysfonctionnel, avec des problèmes récurrents et uniformément répartis sur le territoire », insiste la FMF.
Lassitude et désengagement
Outre les retards, les médecins formateurs déplorent un manque total de lisibilité : virements bancaires sans libellé, absence de justificatifs, écarts de paiement inexpliqués. L’un d’eux résume : « Une ligne bancaire sans nom, sans date, sans motif… Et débrouillez-vous ! » Un autre de déplorer : « Les retards sont chroniques, au point de ne plus savoir à quel semestre correspond la rémunération ! »
À tout cela s’ajoute une lourdeur administrative écrasante. Chaque année, même sans changement de situation, les MSU doivent reconstituer leur dossier. « Vingt ans que je remplis le même dossier chaque année », regrette un praticien.
Bilan des courses : de plus en plus de MSU, démotivés, démissionnent ou envisagent sérieusement de le faire. « Je suis démissionnaire depuis ce mois de mai et j’ai été MSU pendant 18 ans », confie l’un d’eux. Une tendance alarmante alors que le besoin de maîtres de stage n’a jamais été aussi grand. Des négociations sur la rémunération des MSU dans le cadre des arbitrages sur la quatrième année de médecine générale sont en cours. À ce stade, le ministère de la Santé Yannick Neuder propose un plafond mensuel de 3 000 euros, avec un forfait de base de 1 800 euros. Une formule bien loin de convaincre les généralistes enseignants.
Aux yeux de la FMF, la fonction de maître de stage est aujourd’hui devenue « quasi bénévole » car trop contraignante administrativement et peu valorisée financièrement. « Sans réforme claire, sans respect concret, le désengagement des MSU ne sera pas un accident, mais la suite logique », alerte l’organisation.
Parmi ses revendications : une revalorisation des indemnités, une automatisation et une transparence des paiements, une harmonisation nationale des règles et des modalités avec la possibilité de joindre facilement un référent administratif compétent ainsi qu’une simplification des démarches.
Selon le CNGE, un maître de stage consacre environ une heure de son temps quotidien (souvent à la fin de la journée) à la formation d’un interne en stage ambulatoire de niveau 2 (SASPAS).
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