Au 30 août 2021, 71,9 % de la population générale française avait reçu au moins une dose de vaccin contre la Covid-19 et 65,1 % avaient reçu deux doses, ce qui fait de notre pays l'un des dix états les plus vaccinés dans le monde. Cependant, l'évaluation de l'effet des vaccins sur le nombre de cas sévères de Covid-19 reste un exercice complexe.
Dans une étude prépubliée le 28 août dernier, les chercheurs du CHU de Nîmes, de l'université de Montpellier et du centre hospitalier de Caen Normandie ont mis au point un modèle alimenté par les données hospitalières. Selon leurs calculs, la transmissibilité du virus a été réduite de 43 %, ce qui a engendré une diminution de 39 100 admissions en service de réanimation et de 47 400 décès hospitaliers entre août 2020 et août 2021, soit une diminution respective de 46 % et 57 %.
L'effet plus important sur les décès s'explique par le fait que « tout le monde ne va pas en réanimation : les patients de 80 ou 90 ans vont plus rarement en réanimation et meurent plus fréquemment que les trentenaires », explique au « Quotidien » Samuel Alizon spécialiste en modélisation de maladies infectieuse au laboratoire MiVEGEC (Maladies infectieuses et Vecteurs : Écologie, Génétique, Évolution et Contrôle) et coauteur de l'étude
Un effet observé dans plusieurs pays
Au cours de la première étape de leur travail, les chercheurs ont confronté les évolutions des taux de couverture vaccinale de différents pays et ceux des taux de mortalité au cours des 12 derniers mois. « C'est un travail assez délicat, selon Samuel Alizon. Il existe de grandes variations en termes de nombre de décès et de cas d'un pays à l'autre, poursuit le chercheur. On a donc essayé de standardiser dans chaque pays. »
Il ressort de cette analyse qu'en dessous de 30 % de la population ayant reçu au moins une dose de vaccin, la vaccination n'a aucun effet sur le ratio entre le nombre de cas et le nombre de décès. Au-delà, un effet commence à apparaître et, à partir de 50 % de patient vaccinés, le ratio diminue de 12,5 % pour chaque augmentation de 10 % de couverture vaccinale.
Dans un second temps, les auteurs ont établi un modèle mathématique basé sur les données d'admission et les décès hospitaliers. « L'avantage de ces données est qu'elles sont très exhaustives », explique Samuel Alizon, pour qui les données fournies par le dépistage du Covid-19 en ville ne sont pas exploitables pour ce genre de travail car il ne reflète pas l'état réel de l'épidémie. « Le nombre de tests effectué varie pour un grand nombre de raisons différentes, indique-t-il. Comme l'approche des fêtes de Noël par exemple. Les données hospitalières sont plus représentatives. »
L'effet des variants encore non évalué
À partir des données d'admissions, les modélisateurs ont calculé, à chaque moment de l'épidémie, un « taux de contact » moyen des malades. Ce taux de contact synthétise tous les paramètres inconnus mais que les chercheurs peuvent déduire à partir des données hospitalières : nombre de contacts moyens entre les personnes, politiques publiques appliquées, respect du port du masque, météo, taux d'humidité, etc. « Le seul paramètre qui n'est pas agrégé est le taux de vaccination qui était lui connu et que nous avons pu modifier à loisir pour "refaire le match" et voir quel a été son impact concret sur les admissions et les décès », détaille Samuel Alizon.
Pour ce modélisateur, il est possible que le nombre d'hospitalisations et de décès évité soit sous-évalué, compte tenu de l'apparition de nouveaux variants. « Il a été démontré que le variant Alpha était plus virulent, et des données préliminaires semblent aller dans le même sens en ce qui concerne le variant Delta, rappelle-t-il. Nous n'avons pas pris cela en compte dans notre modèle. »
La protection collective plus forte que celle individuelle
Dans leur modèle, les chercheurs français ont attribué à la vaccination un effet collectif - une réduction de 40 % du risque de transmission du SARS-CoV-2 - et un bénéfice individuel - une diminution de 88 % du risque de développer une forme grave.
Parmi les scénarios reconstitués rétrospectivement, Samuel Alizon et ses collègues en ont imaginé un premier avec un vaccin ne procurant qu'une protection individuelle, et un second avec un vaccin « altruiste » sans effet sur le risque d'hospitalisation mais réduisant la capacité à transmettre l'infection. « Nous avons été un peu surpris de découvrir que le vaccin altruiste réduisait davantage le nombre d'hospitalisation qu'un vaccin qui n'assure qu'une protection individuelle, explique Samuel Alizon. Selon notre modèle, en mai-juin, le gouvernement aurait été obligé de décréter un nouveau confinement pour préserver les capacités hospitalières s'il n'avait disposé que d'un vaccin n'assurant qu'une protection individuelle. »
Les auteurs estiment ainsi que c'est sans doute la protection collective assurée par le vaccin qui est à l'origine de la diminution du nombre d'hospitalisations et de décès, plus que la protection individuelle.
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