Les raisons pour lesquelles quelques patients infectés par le VIH-1 sont capables de contrôler leur infection après arrêt de leur traitement antirétroviral restent en grande partie une énigme. Dans une nouvelle publication parue dans la revue Med, des chercheurs de l’Institut Pasteur, de l’Inserm et de l’AP-HP, avec les financements de l’ANRS-MIE, sont parvenus à identifier des caractéristiques génétiques immunitaires particulières à cette catégorie de patients.
Cette étude, coordonnée par Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, a identifié que certaines caractéristiques génétiques associées à des cellules de l’immunité innée (les cellules Natural Killer ou NK) sont très fréquemment retrouvées chez les contrôleurs post-traitement de l’étude Visconti. Les scientifiques montrent que la présence de ces marqueurs génétiques est accompagnée par l’existence de populations particulières de cellules NK qui ont une capacité accrue à contrôler l’infection. Plus en détail, il s’agit de la combinaison d’un HLA-B35 avec le génotype Bw4TTC2, ce contexte génétique favorisant l’éducation des cellules NK à tuer le VIH.
« Ces résultats soutiennent le rôle des cellules NK dans la rémission prolongée du VIH et pourraient orienter le développement de nouvelles immunothérapies », commente Asier Sáez-Cirión, coordinateur de la cohorte Visconti, dans un communiqué de l’Institut Pasteur.
Les « contrôleurs post-traitement » constituent un petit groupe de patients capables de maintenir leur infection par le VIH-1 indétectable après avoir arrêté leurs traitements. Certains d’entre eux ne sont plus traités depuis vingt-cinq ans, sans rebond viral. Tous les contrôleurs post-traitement, comme ceux suivis dans les cohortes françaises Visconti et Primo, ont été découverts plus ou moins par hasard, alors qu’ils ont été contraints d’interrompre leur traitement pour diverses raisons.
La question est de savoir identifier les patients qui pourraient être des contrôleurs et interrompre leur traitement. L’initiation d’un traitement précoce, dans les premiers jours suivant l’infection, semble favoriser le contrôle post-traitement du VIH-1, mais les mécanismes immunitaires restent encore mal compris.
Afin d’identifier les caractéristiques génétiques, les scientifiques ont utilisé les données de 27 contrôleurs de l’étude Visconti et celles de la cohorte Primo, totalisant plus de 1 600 patients VIH suivis depuis le début de leur infection.
Un génotype particulier en association aux antigènes HLA-B35
Les antigènes HLA-B35 sont associés à une progression rapide de l’infection par le VIH-1. Paradoxalement, les chercheurs ont trouvé qu’il y a une fréquence élevée de l’allèle codant pour HLA -B35 chez les contrôleurs. Mais, précision importante, la protection est conditionnée par la présence d’autres marqueurs sur d’autres allèles d’HLA de classe 1 : les ligands KIR (pour killer immunoglobulin-like receptors) Bw4 et C2. Le génotype Bw4TTC2 favorise l’éducation des cellules NK, qui ont une capacité accrue à contrôler l’infection.
Ces travaux offrent des renseignements inédits sur les mécanismes immunitaires associés au contrôle du VIH sans traitement antirétroviral et ouvrent de nouvelles perspectives pour le développement d’immunothérapies visant la rémission ou la guérison de l’infection par le VIH.
Un essai clinique, intitulé ANRS 175 Rhiviera 01, est en cours depuis mars 2023 pour étudier l’association entre les marqueurs génétiques des cellules NK et le contrôle post-interruption du traitement. Dans ce cadre, une interruption du traitement étroitement surveillée a été proposée à 16 personnes porteuses de ces caractéristiques génétiques et qui étaient traitées depuis leur primo-infection.
En parallèle, les scientifiques sont en train de caractériser l’influence précise de ces spécificités génétiques associées à la rémission sur le programme et la fonction des cellules NK. Cette approche permettrait de développer des immunothérapies pour mobiliser ces cellules particulières chez d'autres personnes vivant avec le VIH.
Pour Asier Sáez-Cirión, ces travaux « représentent une étape cruciale dans la poursuite de la rémission durable de l’infection par le VIH. Dans un contexte où les programmes d’accès aux antirétroviraux sont fortement menacés, des nouvelles thérapies qui permettront aux personnes vivant avec le VIH de mener une vie normale sans devoir prendre de traitement deviennent encore plus nécessaires et urgentes, » conclut-il.
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