En recul dans la plupart des pays européens, la mortalité infantile progresse en France depuis plusieurs années, passant de 3,5 décès au cours du premier mois de vie pour 1 000 naissances en 2020 à 4,1 en 2024, une « trajectoire préoccupante » qui place la France au 23e rang sur 27 au sein de l’Union européenne, s’alarme le député Paul-André Colombani. Sa proposition de loi (PPL) de lutte contre la mortalité infantile sera examinée le 15 mai à l'Assemblée nationale dans le cadre de la niche parlementaire de son groupe Liot.
Son inquiétude est partagée par les professionnels de santé, et notamment par la Société française de médecine périnatale (SFMP). Mais les causes du phénomène restent mal identifiées. La ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, Catherine Vautrin, évoquait début avril, lors de la présentation de son « plan d’action » pour les enfants placés, plusieurs facteurs : « réanimation plus systématique de nouveau-nés extrêmement prématurés, augmentation de certains facteurs de risque chez les mères (obésité, âge plus élevé) et comorbidités plus fréquentes (diabète, hypertension…) », listait-elle dans un entretien à Libération.
Paul-André Colombani y ajoute « l’éloignement géographique croissant des structures de soins », conséquence selon lui de la fermeture des trois quarts des maternités en 50 ans, mais aussi une « désorganisation » de la filière périnatale : « saturation des établissements de référence, sous‑dotation chronique en personnel, effritement des dispositifs de prévention, et déclin des services de protection maternelle et infantile, dont la fréquentation a été divisée par deux en vingt ans », énumère-t-il dans son exposé des motifs.
La création d’un registre des naissances annoncée pour 2026
Sa proposition pointe aussi l’absence de registre national des naissances, « alors même que plusieurs pays européens s’appuient sur ce type d’outil pour comprendre, prévenir et corriger les causes de décès précoces ». Réclamée de longue date par différents acteurs, la création d’un tel registre, prévue dans la PPL, a déjà été actée par Catherine Vautrin, qui a annoncé début avril que le dispositif devrait être opérationnel début 2026. Il recueillera « les données des mères, des nouveau-nés et des enfants hospitalisés en néonatologie de manière continue, permettant le suivi de la santé périnatale, l’évaluation des pratiques et de la qualité des soins ».
Ce registre constituerait une « avancée considérable dans la compréhension de la mortalité infantile », juge auprès de l'AFP la Pr Delphine Mitanchez, présidente de la Société française de médecine périnatale. « Avant de pouvoir lutter efficacement, il faut connaître les facteurs qui en sont à l'origine. Aujourd'hui, on n'a aucune certitude, résultat : chacun y va de son hypothèse, plus ou moins farfelue, et on n'avance pas », ajoute-t-elle.
Appel à un moratoire sur la fermeture des maternités
Autre mesure avancée par la PPL, un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternités doit « éviter la disparition irréversible de structures de proximité » et « permettre une évaluation fine et territorialisée des établissements menacés », lit-on dans l’exposé des motifs. Alors qu’un seuil de 300 accouchements par an est souvent utilisé comme « critère implicite de fermeture », l’enjeu est « d’amorcer une réflexion nationale sur les critères d’autorisation d’activité obstétrique, en tenant compte des enjeux d’égalité d’accès, de continuité des soins et de résilience des territoires », poursuit la PPL.
Le texte prévoit enfin la mise en place dans chaque maternité de formations régulières aux gestes d’urgence obstétrique certifiées par la Haute Autorité de santé. Cette mesure, tirée, comme la création d’un registre, des conclusions de la mission flash menée par les députés Anne Bergantz et Philippe Juvin, vise à « renforcer la capacité des équipes médicales à faire face aux situations critiques, en particulier dans les structures isolées ou à faible effectif ».
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