Un biofilm sur les lithiases biliaires

Un repaire de salmonelles débusqué

Publié le 23/02/2010
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Crédit photo : (c) BSIP 2000 #0231100

AUJOURD’HUI, la seule option efficace est radicale : la cholécystectomie. On comprend ainsi que le traitement des porteurs chroniques de salmonelles ayant des lithiases biliaires n’est pas aisé dans les zones endémiques. Des chercheurs mexicains ouvrent une piste à des alternatives thérapeutiques en mettant à jour le mécanisme par lequel la présence de lithiases biliaires favorise la pérennisation de l’infection. « Le dépôt d’un biofilm sur des lithiases biliaires survient chez des sujets porteurs de salmonelles, explique l’équipe de John Gunn. Ce qui suggère une cible thérapeutique inédite pour empêcher la propagation de la fièvre typhoïde. » Un autre mécanisme que l’infection seule semblait en cause en effet, puisque le traitement antibiotique restait désespérément sans effet sur la persistance microbienne. L’équipe de scientifiques a testé l’hypothèse du biofilm sur les lithiases de cholestérol dans le portage typhique, à la fois chez la souris et chez l’homme.

Des antibiotiques inefficaces.

Des souris susceptibles aux lithiases et nourries pendant huit semaines avec un régime lithogénique ont développé des lithiases biliaires sur lesquelles s’est déposé un biofilm au cours de l’infection persistante à un sérotype de salmonelle, le Typhimurium. Par voie de conséquence, la contamination fécale s’est retrouvée majorée, ainsi que la colonisation de la bile et de la vésicule. À Mexico, où l’infection est endémique, 5 % des patients ayant une lithiase vésiculaire étaient porteurs de salmonelles, et des biofilms bactériens ont été visualisés sur les lithiases. À l’inverse, il n’y avait pas de biofilm au cours d’une infection biliaire à E. coli.

Les salmonelles infectant la vésicule biliaire peuvent entraîner une infection aiguë avec cholécystite, ou persister dans cet organe des années après les premiers symptômes. La bactérie utiliserait un mécanisme particulier favorisant la colonisation dans un environnement riche en bile, peu favorable à la multiplication bactérienne. Comme cette sécrétion digestive est émulsifiante et antimicrobienne, les salmonelles ont dû s’adapter pour résister aux propriétés détergentes. La formation d’un biofilm correspond à cette nécessité, celui-ci étant déposé sur les lithiases environnantes. En effet, le portage chronique bactérien est fréquemment associé à la présence de lithiases cholestéroliques, contrairement à celles composées de calcium. En cas de portage à la fois de Salmonella Typhi et de lithiases vésiculaires, les antibiotiques sont inefficaces pour éradiquer l’infection bactérienne, avec un risque élevé de carcinome hépatobiliaire. La découverte du rôle du biofilm devrait permettre le développement de nouveaux traitements pour diminuer le portage chronique à S Typhi et la transmission interhumaine.

Proc Natl Acad Sci USA, édition du 22 février 2010.

 Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Médecin: 8714