Depuis plusieurs années, une nouvelle approche thérapeutique est explorée dans l’HTA non contrôlée (malgré deux antihypertenseurs) ou résistante (malgré trois médicaments ou plus, dont un diurétique) : celle des inhibiteurs de l’aldostérone synthase. Ces médiacaments permettent de bloquer à la source la production de l’hormone, dont on connaît la forte implication physiopathologique dans la genèse de ces formes d’HTA, en favorisant la rétention hydrosodée, mais aussi l’atteinte des organes cibles (rigidité artérielle, fibrose cardiaque et rénale…).
Après un essai préliminaire de phase 2 positif dans l’HTA, l’essai de phase 3 multicentrique international BaxHTN a évalué l’efficacité et la sécurité du baxdrostat, un inhibiteur sélectif de l'aldostérone synthase, dans l’HTA non contrôlée ou résistante. L’analyse, à partir d’une cohorte de 794 patients (âge moyen de 62 ans, 39 % de femmes), démontre les bénéfices tensionnels de ce traitement chez ce profil de patients, qui sont à haut risque de complications cardiovasculaires et rénales. Les résultats, publiés dans The New England Journal of Medicine, ont été présentés au congrès de la Société européenne de cardiologie (ESC).
Une PAS en position assise à l’inclusion de 149 mm Hg en moyenne
Après douze semaines de traitement (en sus du traitement habituel qui comportait un diurétique), la baisse moyenne de la pression artérielle systolique (PAS) versus le placebo a été de − 8,7 mm Hg (IC 95 % − 11,5 à − 5,8) pour la dose de 1 mg et de − 9,8 mm Hg (IC 95 % − 12,6 à − 7,0) pour la dose de 2 mg (p < 0,001). Cette baisse de PAS s’est accompagnée d’une diminution de l’ordre de 60 % de la concentration d’aldostérone plasmatique – qui restait dans des valeurs normales à l’état basal malgré un traitement par un bloqueur du système rénine-angiotensine (SRA) – confirmant ainsi le rôle physiopathologique de l’aldostérone dans le non-contrôle et/ou la résistance tensionnelle.
La proportion de patients contrôlés (PAS < 130 mm Hg) était de 39,4 % sous baxdostrat 1 mg, 40,0 % sous 2 mg comparativement à 18,7 % dans le groupe placebo. Les résultats étaient cohérents dans les sous-groupes, y compris en cas d’HTA résistante (70 % de la cohorte).
Un effet rémanent à l’arrêt
Comme le souligne le Pr Michel Azizi (Hôpital européen Georges-Pompidou, Paris), l’un des contributeurs à cet essai, « cette baisse très nette de la PAS se maintient dans le temps, au moins pendant huit semaines, après l’arrêt du baxdrostat dans une autre phase de l’essai ». En effet, après la phase initiale en double insu de douze semaines, les patients étaient à nouveau randomisés dans un groupe baxdrostat 2 mg ou un traitement habituel pour un suivi additionnel de douze semaines en ouvert après lequel, les patients recevant le baxdrostat 2 mg, étaient randomisés pour le continuer ou recevoir un placebo pendant huit semaines avec un suivi en double insu. Dans le groupe placebo, la PAS s’est élevée à l’arrêt du traitement actif mais de façon très progressive et modérée (+ 1.4 mmHg), alors que sa baisse s’est poursuivie sous baxdrostat (− 3,7 mmHg).
« Cet effet rémanent observé dans le groupe placebo après arrêt du traitement actif est très inhabituel dans sa durée et son amplitude, indique le cardiologue. Il s’accompagnait d’une persistance de valeurs réduites d’aldostérone plasmatiques qui favoriserait une déplétion sodée résiduelle. Cet effet rémanent pourrait être aussi dû à une réduction de la rigidité artérielle du fait du bon contrôle tensionnel. Nous attendons les résultats de la quatrième partie de l’essai, en cours, qui suit les patients jusqu’à cinquante-deux semaines après l’inclusion ».
Point très important : la bonne tolérance du traitement, avec notamment peu d’hyperkaliémies significatives. Les événements indésirables observés étaient ceux attendus comme conséquence d’une inhibition de la synthèse de l’aldostérone. Un taux de potassium de plus de 6,0 mmol/L mesuré dans un laboratoire centralisé a été rapporté dans 2,3 % des cas sous baxdrostat 1 mg, 3,0 % sous baxdrostat 2 mg et 0,4 % dans le bras placebo. Il faut noter que la mesure simultanée de la kaliémie dans le laboratoire local de chaque centre (évitant ainsi une hémolyse, ou un retard dans le dosage) ne retrouve que trois cas (1,1 %) d’hyperkaliémie pour chacune des deux doses de baxdrostat.
De façon plus large, des effets indésirables ont été observés respectivement dans 47,3 %, 44,7 % et 41,3 % des cas, majoritairement modérés, le plus souvent à type d’élévation de la kaliémie (environ + 0,3 mmol/L), d’hyponatrémie très modérée, d’hypotension, de spasmes musculaires et de sensation de vertiges. Il n’y avait pas d’effets indésirables sexuels.
« Ces résultats tensionnels et de tolérance sont concordants avec ceux issus d’essais de phase 2 d’autres médicaments de cette classe en cours de développement (lorundrostat en particulier), ce qui renforce la confiance dans cette nouvelle classe thérapeutique, souligne le Pr Azizi. Cela devrait à terme changer la donne chez les patients avec HTA non contrôlée ou résistante, chez lesquels nous sommes aujourd’hui un peu démunis, compte tenu de la médiocre tolérance des antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes, en particulier de la spironolactone (seule à avoir l’AMM dans l’HTA), qui ne sont de ce fait que peu prescrits en pratique ou non pris/interrompus par les patients ».
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