« Nous sommes médecins, nous le valons bien ». Tel était le premier nom du groupe Facebook ouvert en septembre 2022, désormais appelé « Médecins pour demain », et composé de 6 500 praticiens de la France entière. Leur point commun ? Un ras-le-bol des politiques de santé successives de ces dernières années et la volonté de voir la consultation revalorisée à hauteur de 50 euros.
Derrière ce mouvement se cachent 20 médecins, dont la fondatrice Dr Christelle Audigier, généraliste installée à Craponne (Rhône). Contactée entre deux consultations, elle raconte l’origine de cette initiative qui se revendique apolitique et asyndicale. « J’entendais beaucoup de détresse et de colère de la part de mes collègues depuis longtemps. J’ai créé un groupe sur Facebook pour ouvrir la parole entre confrères. J’y ai invité mes amis, eux les leurs, puis, au fur et à mesure, nous nous sommes rendu compte que nous ressentions tous la même chose. » Pour une première « mobilisation spontanée », la praticienne se dit « étonnée d’un tel écho » dans la profession. Depuis deux semaines, le mouvement s’organise et a créé des boucles WhatsApp, par régions, pour sortir de Facebook et toucher encore plus de confrères.
En s’installant, le Dr Audigier s’est trouvée confrontée à la place importante des forfaits dans son exercice, ce qui a créé « une forme de coercition. Il me semble nécessaire de retrouver notre côté libéral pour gérer notre argent comme nous l’entendons. L’exemple du forfait Rosp est probant : pour le toucher, certaines choses échappent à notre contrôle. Si l’on prescrit des semelles orthopédiques à une personne diabétique et que celle-ci ne les achète pas… nous ne pouvons pas être rémunérés. »
Objectif négociations conventionnelles
La généraliste qui n'a pas pu voter lors des dernières élections URPS en tant que remplaçante, dit s’engager « pour six mois », soit lors des négociations conventionnelles. Elle aimerait les voir se dérouler « comme de vraies négociations : chacun doit faire un compromis pour trouver un terrain d’entente. Nous ne devons pas nous contenter de récolter les miettes de l’État et tolérer ce qu'il nous impose ». Pour elle, « la revendication est simple pour repartir satisfaits de ces négociations » : la consultation, toute spécialité confondue, à 50 euros.
Pourtant, sur le groupe Facebook et les boucles WhatsApp, on croise des médecins remontés certes, mais également des figures syndicales : UFML-S, SML, MG France ou encore FMF. Un certain Dr Jean-Paul Hamon, président d’honneur de la FMF, y est particulièrement actif : « Je me suis branché sur le groupe, car je trouve la démarche intéressante. Je lis ainsi le ras-le-bol des médecins dont je prends le pouls et je constate les revendications diverses de chacun. » Le praticien installé à Clamart (Hauts-de-Seine) confirme que la revalorisation de la consultation est le principal point défendu par tous.
Soutien de la FMF et de l'UFML-S
« Le G à 50 euros ne serait pas un scandale, car la consultation n’a pas été revalorisée depuis sept ans, et plus longtemps encore pour les spécialistes. Je pense qu’il y a une marge à prendre du côté des complémentaires, de l’ordre de 20 milliards d’euros, lesquelles remboursent largement des naturopathes, magnétiseurs et ostéopathes à 60 ou 70 euros la séance… », martèle le Dr Hamon.
La FMF sera donc de la mobilisation le 1er décembre prochain, confirme le praticien. « Nous allons naturellement appeler à la grève et voir le niveau de mobilisation aux manifestations. Il faut faire comprendre au gouvernement qu’il a trop tiré sur la corde. Les derniers exemples en date ? Les transferts de tâches aux kinésithérapeutes et infirmiers dans le PLFSS 2023 ou les cabines de téléconsultation dans les Monoprix ! J’espère que le gouvernement va bouger… »
Lui aussi présent dans le groupe Facebook, le président de l’UFML-S, Dr Jérôme Marty affirme « soutenir la revendication du G à 50 euros » et avoir « beaucoup de bienveillance à l’égard du mouvement », qu’il juge compatible avec son syndicat. De son côté, le président de la CSMF, Dr Franck Devulder, est dubitatif quant à l'annonce d'ores et déjà d'une mobilisation du 1er décembre, sans connaître les moyens dont disposera la Cnam : « La CSMF n’a lancé aucun mot d’ordre, pour l’instant. Un collectif a lancé cette idée qui me semble prématurée, tant que les grandes lignes des négociations conventionnelles ne sont pas sur la table ».
Des fermetures de cabinets le 1er décembre
Côté jeunes, le Dr Élise Fraih, présidente de ReAGJIR, confie « partager certaines revendications, comme la place trop grande de l’administratif dans l’exercice » et donnera sa position sur le mouvement la semaine prochaine.
La grève du 1er décembre prochain reposera en grande partie sur « des fermetures de cabinets, simples à mettre en place » et, si les syndicats s’associent, « la signature de préavis de grèves. » Le Dr Audigier tient à « l’autonomie locale en fonction des territoires », glissant que « les choses se préparent… » Affaire à suivre.
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