Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 a été définitivement adopté ce lundi 4 décembre dans un hémicycle clairsemé et après le rejet d'une ultime motion de censure. Voici ce qu'il faut retenir de ce budget qualifié de « progrès social » par la Première ministre Élisabeth Borne, malgré le déclenchement d'un vingtième 49-3, en fin de semaine dernière.
Un contexte budgétaire plombé
Le déficit de la Sécu est estimé à 8,7 milliards d'euros en 2023, puis 10,5 milliards en 2024. Les comptes sont plombés par la hausse des dépenses de l'Assurance-maladie. Pour atteindre ses objectifs d'économies, le gouvernement prévoit de piocher 3,5 milliards dans les dépenses de santé, dont 600 millions d'euros à l'hôpital, 1,3 milliard sur les produits de santé (essentiellement via des baisses de prix des médicaments), 300 millions sur les soins de ville, en particulier les laboratoires d'analyses, et 1,25 milliard lié à la « responsabilisation » des professionnels et patients.
Malgré cet effort, les dépenses d'Assurance-maladie (Ondam) représenteront 8,7 % du PIB en 2024, contre 8,2 % avant la crise sanitaire du Covid-19.
Médecine libérale : haro sur la prescription par téléconsultation
Pour lutter contre l'augmentation des dépenses liées aux arrêts maladie, le gouvernement renforce les pouvoirs de contrôle des entreprises. Le médecin contrôleur mandaté par l’employeur – médecin agréé – pourra faire suspendre le versement des indemnités au patient lorsqu'il estime l'arrêt injustifié. La caisse pourra éventuellement décider de procéder à un deuxième examen. Le texte limite aussi à trois jours la durée des arrêts prescrits par téléconsultation (sauf exceptions, notamment pour le médecin traitant).
Exit en revanche la mesure du Sénat qui consistait à moduler la rémunération des professionnels de santé selon deux critères : le degré d'utilisation du dossier médical partagé et la participation à l'effort de maîtrise des dépenses maladie et aux mesures destinées à garantir la pertinence des soins.
Hôpital : ça bouge (un peu) sur les tarifs
Le président Emmanuel Macron veut réduire la tarification à l'activité (T2A) dans les hôpitaux. Le PLFSS 2024 introduit à cet effet deux modes alternatifs de financement sur les activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO), l'un fondé sur des « objectifs de santé publique » et l'autre sur « des missions spécifiques ». Cette réforme complexe commencera à être appliquée (pour partie de manière expérimentale) en janvier 2025.
Transports sanitaires : pression sur les patients
Les patients qui refuseront une offre de transport sanitaire (véhicule sanitaire léger ou taxi conventionné) partagée avec un autre patient, sans raison médicale valable, devront faire l'avance de frais, et ne seront remboursés que sur la base du prix d'un transport partagé.
Franchises médicales : rien d'acté mais…
Le gouvernement devra venir s'expliquer devant les commissions des Affaires sociales de l'Assemblée et du Sénat avant tout projet qui consisterait à augmenter les franchises médicales, une mesure réclamée par le ministre de l'Économie Bruno Le Maire mais sur laquelle hésite le ministre de la Santé Aurélien Rousseau.
Pénurie de médicaments : les pharmaciens monitorés
En cas de rupture d'approvisionnement sur un médicament, la délivrance à l’unité pourra être rendue obligatoire par arrêté. Les pharmaciens devront alors délivrer « la quantité adaptée » plutôt qu'une boîte entière.
Le gouvernement pourra aussi rendre obligatoire la réalisation par les pharmaciens d’un test rapide d’orientation diagnostique (TROD), pour délivrer directement par exemple certains antibiotiques.
Activité physique adaptée : remboursement expérimental
Pendant deux ans et à titre expérimental, l'Assurance-maladie pourra rembourser des séances d'activité physique adaptée pour les malades du cancer.
Santé sexuelle : dépistage pour les femmes et prévention pour tous
Le texte rend systématique le dépistage chez les femmes enceintes du cytomégalovirus, un virus pouvant affecter le développement du fœtus.
Une expérimentation de trois ans d'un parcours de soins dédié aux dépressions post-partum a été ajoutée.
Les protections périodiques réutilisables, c'est-à-dire les culottes et coupes menstruelles, seront remboursées pour les femmes de moins de 26 ans et toutes les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (CSS).
Le texte grave aussi dans la loi la gratuité des préservatifs pour tous les assurés de moins de 26 ans.
Cannabis thérapeutique : la détente ?
Un « statut temporaire » de cinq ans est accordé au cannabis thérapeutique, dans l'attente d'une décision d'autorisation de mise sur le marché par les autorités européennes. Déjà autorisé dans d'autres pays européens pour calmer la douleur et l'anxiété de certains patients, le cannabis médical ne l'est en France que dans le cadre d'une expérimentation qui doit se terminer le 26 mars.
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