« 8 millions de Français vivent dans un désert médical. En cause, la liberté d’installation des médecins ! ». Dès l’introduction du reportage le ton est donné par Élise Lucet.
Jeudi 13 janvier au soir sur France 2, le nouveau numéro de Cash Investigation aura pour thème la santé et un des sujets en particulier s’intéresse à la problématique des déserts médicaux. Mais disponible en exclusivité sur le site de France 2 une semaine avant sa diffusion, le reportage suscite d’ores et déjà la colère des médecins généralistes.
Car en fait d’investigation sur la problématique des déserts médicaux, il s’agit surtout d’une charge sur la liberté d’installation. Intitulé « Liberté, santé, inégalités », pendant 40 minutes le reportage force quelque peu sur le trait pour aborder le sujet. En opposition à sa virée dans un désert médical dans l’Orne, la ville de Biarritz est présentée comme « le paradis médical dont on rêve tous », avec autant de surfeurs que de médecins, musique des îles en fond sonore pour bien appuyer le message.
Pour traiter ce sujet, les journalistes font notamment intervenir les points de vue des Drs Jean-Paul Hamon, ancien président de la FMF, Guillaume Barucq ou encore Martial-Olivier Koehret, ancien président de MG France. Et ressortent les éléments à charge : rapport de la Cour des comptes qui juge les aides à l’installation inefficaces, comparaison avec les autres professions libérales régulées ou les pays ayant instauré la coercition. « Waouh une telle conscience de l’intérêt général, ça nous a un peu bousculés », ironise notamment la voix off en réaction au témoignage d’une généraliste québécoise contrainte de s’installer dans un désert et finalement heureuse de son sort.
La convention médicale : un roman-photo
Ironie et caricature, il en est question aussi quand il s’agit de parler de la raison à l’absence de mesures coercitives depuis des années : le syndicalisme médical. Ici « pas de manifestation et barbecue merguez » mais « ambiance feutrée et pull sur les épaules », décrivent les journalistes.
Pourquoi tous les ministres de la santé finissent-ils toujours par être d’accord avec les syndicats ? Selon Cash Investigation, c’est « grâce » au système de la convention médicale. Elle est ici tournée en dérision sous forme de roman-photo où le directeur général de l’Assurance maladie tente de séduire les médecins. « Il commence la négociation par un beau bouquet d’aides financières (…) mais quand il leur demande des contreparties, ça coince, (…) mais souvent il est obligé de céder », résume Cash Investigation.
Colère de la profession
Avant même sa diffusion télévisée, le sujet du magazine de France 2 a donc provoqué la colère et l’indignation des médecins généralistes. Sur Twitter, le Pr Olivier Saint-Lary le décrit comme simpliste et manichéen et tente de démonter les arguments qui y sont présentés.
1/#CashInvestigation
— Olivier Saint-Lary (@PIFOP) January 9, 2022
Chère @EliseLucet ,
Il m'était arrivé de regarder certaines de vos émissions avec intérêt.
L'espoir suscité par l'annonce d'une émission sur ce sujet crucial (et malheureusement absent du débat politique) n'a eu d'égal que ma déception en la regardant https://t.co/n0qIlQnl5f
D’autres s’appuient sur les chiffres pour souligner que la problématique des déserts médicaux n’est pas la conséquence de « l’abondance de médecins ingrats », comme voudrait le faire croire le reportage.
Coucou @EliseLucet, vu que vous voulez aborder la question des déserts médicaux uniquement sous le prisme de la liberté d’installation, je vous propose de faire un petit point d’information sur la démographie médicale avant de tout nous mettre sur le dos pour faire le buzz 1/ https://t.co/fNn7h9XXMZ
— Paracétamed ⚕ (@Paracetamed) January 9, 2022
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