Un impôt complexe
La cotisation foncière des entreprises (CFE) est, en principe, une taxe locale basée au réel sur la valeur locative de votre surface professionnelle. Ou, à défaut, sur une valeur locative forfaitaire, dite « CFE minimum », variant alors selon le montant de vos recettes. Elle est due chaque année par les personnes physiques ou les sociétés qui exercent à titre habituel une activité professionnelle libérale, mais aussi par les SCM (non exerçantes). Malgré les innombrables mesures de simplification appliquées à cette taxe depuis des décennies, elle reste d’une redoutable complexité.
Son montant, recouvré par les SIE (service des impôts des entreprises), est particulièrement disparate d’une commune (ou intercommunalités : EPCI) à l’autre, et cela à égalité de chiffre d’affaires et/ou de locaux dont le médecin a disposé : par exemple, de moins de 100 € à Neuilly ou Paris XVIe à plus de 2 000 € à Fos-sur-Mer ou Martigues. Et, selon les endroits, les sauts de tranche sont spectaculaires : la taxe « CFE minimum » peut plus que doubler lorsque les recettes annuelles franchissent – même de quelques euros ! – le seuil de 32 600 € ou celui de 100 000 € dans la même commune.
Principe systématique d’une CFE minimum
La dernière « simplification » frappant cet impôt a posé le principe d’un montant minimum de CFE en cas de trop faible taxation (ou faute d’appréciation possible) de votre surface professionnelle. En pratique, chaque médecin ou société de médecins ne bénéficiant pas des exonérations que nous avons listées ici il y a 15 jours est quasi systématiquement concerné(e). Ce montant est fixé à partir d’une base dont le niveau est déterminé par les conseils municipaux (ou les EPCI = sortes d’intercommunalités à fiscalité professionnelle unique) dans la fourchette de 237 à 7 349 € pour 2024. Une fois la base définie, les taux locaux tournant autour de 35 % sont appliqués pour le calcul de la taxe due. Ce principe de CFE minimum se révèle souvent redoutable pour les (modestes en surface) locaux à usage mixte dont, par définition, ceux des étudiants ou médecins remplaçants, dont ceux affiliés au RSPM.
Pour un exercice multisite, en cas de taxation par une CFE minimum, elle ne s’applique qu’au lieu du principal établissement
Exercice multisite
Sauf exceptions, la législation générale impose à une CFE distincte chaque établissement distinct (cabinet médical) utilisé par le même redevable libéral (exercice multisite). La principale exception est l’heureux principe dérogatoire suivant : en cas de taxation par une CFE minimum, cette dernière ne s’applique qu’au lieu du principal établissement indiqué sur votre déclaration de revenus professionnels. Alors même que le total des bases d’imposition en cas de pluralité de cabinets serait supérieur à la base minimum. Notre conseil : nous invitons les médecins multisites à vérifier l’application de cette règle dérogatoire à leur situation car, en pratique, nous constatons beaucoup de surtaxations ou multitaxations. Surtout en cas de cabinet(s) secondaire(s) situé(s) en zone déficitaire en offre de soins, autre exception notable.
Résumé de la règle de lieu d’imposition de CFE
• Remplaçant libéral : sauf en situation d’exonération, votre unique CFE est due à l’adresse de votre résidence principale, qui est le lieu de votre principal établissement.
• Collaborateur libéral : sauf en situation d’exonération, votre unique CFE est due à l’adresse du cabinet médical du (premier) médecin titulaire que vous aurez déclarée au fisc, qui est le lieu de votre principal établissement. À ce titre, cela vous laisse des latitudes de gestion si vous collaborez avec plusieurs titulaires dans des lieux différents : il vous suffira de choisir la « meilleure » adresse.
• Installé titulaire : sauf en situation d’exonération, vous devrez potentiellement autant de CFE que vous compterez de lieux d’exercice différents. Sauf en cas d’assujettissement à plusieurs CFE minimum, où une seule est alors due.
La cession de cabinet au profit d’un successeur
Cette situation constitue un maintien de l’activité économique du cabinet taxé à la CFE. Il ne s’agit que d’un changement d’exploitant, l’occupant au 1er janvier (= le cédant) restant le seul redevable sur l’année civile entière au regard du fisc. D’où les conséquences suivantes :
■ Durant l’année de la cession
• Si la cession intervient en cours d’année : le cédant reste seul redevable de la CFE de l’année de cession. Le successeur n’est pas individuellement imposable à la CFE sur les mois de l’année de cession au cours desquels il exerce en tant que successeur, et pour le cabinet médical cédé. Remarque sur les contrats de cession : il est fréquent que le contrat de cession mette la CFE de l’année de cession à la charge du successeur au prorata des mois correspondant à la succession. Ce genre de clause ne constitue qu’une pratique contractuelle, engageant certes les parties mais ne reposant sur aucun texte législatif, et n’est donc pas opposable à l’administration fiscale.
• Si la cession intervient au 1er janvier : il en résulte que seul le successeur est imposé. Précision : il le sera sur la valeur locative des biens professionnels dont son prédécesseur disposait au 31 décembre de l’année précédente.
■ Durant les deux ans qui suivent l’année de cession : de façon dérogatoire, le successeur est imposé sur les bases de la valeur locative de l’année de la cession, c’est-à-dire sur celle des biens professionnels dont le successeur disposait au 31 décembre de l’année de cession. Conséquence : il ne bénéficie pas de la réduction de 50 % en année N+1, contrairement à la règle s’appliquant en cas de création d’établissement comme déjà vu voici 15 jours.
La déclaration de CVAE
La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), taxe locale attachée à la CFE, ne concerne qu’une minorité de médecins libéraux (EI ou sociétés), réalisant plus de 152 500 € de recettes ou de chiffre d’affaires (CA). Et compte tenu du mode de calcul de cette taxe, seules les entreprises réalisant plus de 500 000 € de recettes seront tenues de la régler. Attention : tout médecin en régime BNC (ou en société) réalisant entre 152 500 et 500 000 € de recettes devra impérativement renseigner la page 2035-E de sa déclaration de résultat et déposer en sus le formulaire n° 1330-CVAE-SD auprès de son SIE. Même en l’absence finale de CVAE à régler, dans les faits.
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