Un nouveau statut loin d’être suffisant pour les Padhue. Dans une lettre ouverte adressée le 28 décembre à la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, Catherine Vautrin, et au ministre de la Santé et de l’Accès aux soins, Yannick Neuder, la Fédération des praticiens de santé (FPS) rappelle sa ferme opposition à la loi Valletoux, qui « institutionnalise la précarité en créant le statut de praticien associé contractuel temporaire (Pact) ». Deux décrets, parus au Journal officiel le 21 décembre en application de l’article 35 de la loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels (dite loi Valletoux), encadrent en effet les conditions d’exercice des Padhue, non lauréats aux épreuves de vérification des connaissances (EVC). Très attendus, ils sont entrés en vigueur le lendemain de leur publication.
Le premier décret définit les conditions de recrutement et d’exercice des Padhue, désormais étiquetés « Pact ». Ces professionnels assurent les actes médicaux de diagnostic, de traitement et de soins d'urgence dispensés par les établissements publics de santé et participent aux missions définies par le Code de la santé publique. « Ils exercent leurs fonctions par délégation, sous la responsabilité directe du praticien responsable de la structure dont ils relèvent ou de l'un de ses collaborateurs médecin, chirurgien, odontologiste ou pharmacien », souligne le décret. « Le but est de recruter des médecins à l’étranger pour combler les trous dans les déserts médicaux avant même de passer les EVC », soupire le Dr Ayoub Mdhafar, président de la FPS.
Concrètement, les médecins recrutés en tant que « Pact » bénéficient d’une attestation d’exercice provisoire, détaillée dans un second décret. D’une durée de treize mois maximum, celle-ci est renouvelable une fois « en cas d'échec aux épreuves de vérification des connaissances ou lorsque son titulaire fait valoir un motif impérieux l'ayant empêché de se présenter à ces épreuves, sous réserve qu'il s'engage à s'y présenter lors de la session suivante », précise le décret. L’avantage de ces deux décrets ? Ils donnent un peu d’air aux Padhue. Ces praticiens sont en effet essentiels dans certains hôpitaux en mal de médecins diplômés dans l'Hexagone par la voie classique mais, faute d’avoir réussi leurs EVC, ils sont aussi menacés de quitter leurs services, voire le pays. L’inconvénient est que la loi Valletoux ne résout pas le problème sur le long terme. Et que tout risque de recommencer au bout de 26 mois.
Vers une fuite des Padhue ?
« Ce statut dérogatoire et temporaire est indigne pour des médecins et praticiens déjà diplômés dans leur pays d’origine, affirme la FPS dans sa lettre ouverte. Même si les Pact ne sont soumis à aucune évaluation préalable, ils se trouvent limités à une autorisation temporaire d’une durée maximale de 26 mois. D’autant que leur statut autorise des contrats très courts pouvant être inférieurs à six mois et soumis également à une période d’essai. » Alors que ces praticiens sont contraints de passer les EVC pour continuer d’exercer en France, la FPS regrette qu’« aucune disposition statutaire ou incitation à la formation [ne soit] prévue dans leurs contrats pour les préparer à réussir ce concours ». Et pour cause, si le statut Pact est créé avant tout pour recruter des médecins à l’étranger, il concerne aussi des médecins diplômés hors Union Européenne qui exercent déjà en hôpital sans avoir passé les EVC. « Si ces gens-là font des gardes un jour sur deux, comment voulez-vous qu’ils passent un concours ? Et sans concours, passé 26 mois maximum, c’est dehors », s’émeut le président de la FPS.
Désaccords sur la réforme des EVC
Si « la FPS a toujours accepté les EVC comme condition préalable pour aboutir à l’autorisation de plein exercice », la fédération réclame une réforme de façon à « adapter les épreuves aux Padhue exerçant depuis un nombre d’années en France ». Ainsi, « il serait plus équitable pour ces praticiens que ces épreuves soient organisées sous forme d’examen, et non de concours comme c’est le cas actuellement ». Si une réforme des EVC est bien sur les rails, la copie présentée le 12 décembre lors d’une réunion avec la direction générale de l’offre de soins (DGOS, ministère de la Santé), le Centre national de gestion (CNG) et les syndicats ne rassure pas les Padhue. Sur la base de l’article 36 de la loi Valletoux, il serait question de scinder le concours en deux parties, créant une voie interne et une voie externe. La voie interne « serait destinée aux praticiens en poste sur le territoire national et comprendrait une seule épreuve portant sur les connaissances théoriques, qui pourrait prendre la forme de QCM », précise la FPS. La voie externe s’adresserait « à tous les autres candidats et maintiendrait les deux épreuves écrites sous la forme actuelle des EVC ». Si rien n’est acté pour l’instant, cette réforme ne convient que partiellement au FPS puisque, même si les épreuves sont adaptées au CV français des Padhue, l’aspect « concours » serait maintenu.
Autre point de crispation : le gouvernement proposerait aussi de raccourcir le parcours de consolidation des connaissances (PCC, pour les médecins lauréats du concours) à une durée variable selon les candidats avec une moyenne de six mois. « La FPS n’est pas favorable à cette proposition et recommande de conserver la durée de deux ans avant le passage devant la Commission nationale d’autorisation d’exercice (CNAE) », qui confirme leur aptitude à exercer en France, est-il écrit dans la lettre ouverte aux ministres. La fédération reste néanmoins favorable au fait de « permettre aux candidats à titre dérogatoire de présenter leur dossier devant la commission après une courte durée de PCC, du moment qu’ils remplissent certains critères préétablis selon leur spécialité ».
« Mon cabinet Grand Est », trait d’union entre générations de médecins pour faciliter l’installation en libéral
Dr Agathe Scemama : « Je ne peux presque plus me passer de l’IA vocale »
Mayotte : SOS Médecins envoie une première salve de volontaires et quatre tonnes de matériel
Accès direct et prescription des IPA : parution du décret, semi-victoire pour les infirmières